Afghanistan : Joe Biden annonce le retrait des troupes américaines d'ici au 11 septembre

Publié le par Le Journal du Dimanche par Aude Le Gentil

Vingt ans après le début de l'intervention américaine en Afghanistan, le président des Etats-Unis, Joe Biden, a annoncé que toutes les troupes seront parties d'ici au 11 septembre. Les forces alliées de l'Otan se retireront également.

 Joe Biden détaille son plan pour mettre fin à l'intervention américaine en Afghanistan. (Reuters)

Joe Biden détaille son plan pour mettre fin à l'intervention américaine en Afghanistan. (Reuters)

La fin de "la plus longue guerre de l'Amérique". La décision avait été annoncée la veille et a été confirmée mercredi par le président américain Joe Biden : les Etats-Unis vont rapatrier leurs dernières troupes engagées sur le terrain en Afghanistan. "L'heure est venue de mettre fin à la plus longue guerre de l'Amérique", a déclaré le chef de l'Etat dans un discours solennel depuis la Maison-Blanche. "Les Etats-Unis vont entamer leur retrait définitif le 1er mai", mais "ne partiront pas de manière précipitée", a-t-il poursuivi. 

La date symbolique du 11 septembre. Les troupes auront "quitté l'Afghanistan avant le 20e anniversaire de ces attentats odieux du 11-Septembre", a précisé Joe Biden. Ce sont ces attentats, contre les tours jumelles à New York et contre le Pentagone, qui avaient motivé en 2001 l'intervention armée américaine contre le régime des talibans, accusés d'avoir servi de base arrière à la nébuleuse djihadiste Al-Qaïda. Depuis, cette intervention s'est enlisée. Elle a mobilisé jusqu'à 100.000 militaires américains en 2010-2011 avant un désengagement progressif, accéléré sous le mandat de Donald Trump. Aujourd'hui, 2.500 militaires sont concernés.

Les forces alliées de l'Otan se retirent aussi. Après le discours du président américain, les pays membres de l'Alliance atlantique ont confirmé dans un communiqué qu'ils commenceraient "d'ici la 1er mai" un retrait "ordonné, coordonné et délibéré" des forces de la mission Resolute Support. En tout, celle-ci mobilise 9.600 militaires de 36 Etats. Ils ont donné leur accord à la décision américaine au cours d'une visioconférence entre les ministres des Affaires étrangères et les ministres de la Défense des pays membres de l'Otan. La France, elle, avait déjà retiré ses troupes.

Un report par rapport à l'accord de 2020. En février 2020, l'administration de Donald Trump avait conclu un accord avec les talibans à Doha, au Qatar. Il prévoyait un retrait total des troupes au 1er mai 2021, à condition que les insurgés empêchent la reconstitution d'une base pour les groupes terroristes dans les zones qu'ils contrôlent. Le nouveau président américain retarde donc de cinq mois la date butoir. 

De quoi crisper le camp adverse, à quelques jours de la conférence sur la paix en Afghanistan, prévue du 24 avril au 4 mai à Istanbul. "Si l'accord est violé et les forces étrangères ne quittent pas notre pays à la date prévue", "il y aura sûrement des problèmes et ceux qui ne respectent pas l'accord seront tenus pour responsables", a mis en garde mercredi le porte-parole des talibans Zabihullah Mujahid. Les insurgés avaient prévenu qu'ils refuseraient de participer à la conférence sur la paix, destinées à relancer les négociations entre les talibans et le gouvernement de Kaboul.

La menace talibane est toujours présente. De fait, malgré cet accord, la violence est toujours présente entre les forces afghanes et les insurgés, et la crainte d'une victoire des talibans et du retour d'un régime fondamentaliste est croissante. Dans un rapport paru mardi, le renseignement américain a estimé que le gouvernement de Kaboul allait "peiner à résister" en cas de départ de la coalition internationale. Dans son discours, Joe Biden a reconnu ces difficultés mais a jugé vain d'attendre "de créer les conditions idéales pour un retrait". Il a insisté sur le fait qu'il était le quatrième chef de l'Etat à devoir gérer ce dossier et a fait part de sa volonté de ne pas transmettre "cette responsabilité à un cinquième".

Selon Joe Biden, l'objectif premier, qui était de "s'assurer que l'Afghanistan ne serve pas de base pour attaquer à nouveau" les Etats-Unis, est "rempli". Cependant, il a prévenu qu'il tiendrait les talibans pour "responsables" s'ils devaient trahir leur "engagement". "Nous continuerons à soutenir le gouvernement afghan", a-t-il indiqué, appelant les autres acteurs de la zone, notamment le Pakistan, parrain historique des talibans, à faire "davantage" pour soutenir le pays voisin.

Des réactions diverses. La classe politique américaine a diversement accueilli cette annonce. "C'est la bonne décision", a réagi l'ancien président Barack Obama. En 2009, il avait choisi d'envoyer d'importants renforts dans le pays, contre l'avis de son vice-président de l'époque, Joe Biden. A l'inverse, la députée républicaine Liz Cheney a estimé que "retirer nos forces d'Afghanistan d'ici le 11 septembre ne fera qu'enhardir les djihadistes qui ont attaqué notre pays vingt ans plus tôt".

Au sein de l'Otan, la Belgique a également fait part de ses réserves par la voix de sa ministre des Affaires étrangères, Sophie Wilmès. Pour elle, "l'annonce de notre retrait militaire à quelques jours de la conférence de paix sur l'Afghanistan [...] pourrait avoir pour conséquence de diminuer la pression sur les talibans, dès lors potentiellement moins enclins à chercher à dégager un accord". 

Pourquoi c'est important. Ce conflit a coûté la vie à des dizaines de milliers d'Afghans et à 2.000 militaires américains. L'opinion, à l'image de Donald Trump, était de plus en plus réticente face à cet engagement meurtrier et coûteux. Dans son discours, Joe Biden a promis de "mettre fin aux guerres sans fin" de l'Amérique.

Publié dans Articles de Presse

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