Éric Zemmour pourrait-il vraiment supprimer les allocations aux étrangers ?

Publié le par RTL par Lison Bourgeois

FACT CHECKING - Invité du Grand Jury de ce dimanche 24 octobre, Éric Zemmour a affiché sa volonté d'enlever la "solidarité nationale aux étrangers". Seulement, l'application de cette mesure n'est pas si simple. 

Eric Zemmour était l'invité du Grand Jury le 24 octobre 2021. Crédit : RTL

Eric Zemmour était l'invité du Grand Jury le 24 octobre 2021. Crédit : RTL

"Si je ne discrimine pas le fait d'être Français et étranger, ça veut dire que la nation n'existe pas". Lors du Grand Jury RTL, Le Figaro, LCI, le polémiste Éric Zemmour a expliqué vouloir "enlever la solidarité nationale aux étrangers". Mais est-ce vraiment possible ?

Tout d'abord, il faut rappeler les différentes significations du mot "étrangers". Il peut s’agir d’une personne en situation régulière (étudiants ou travailleurs, parfois avec leur famille, par exemple), en cours de régularisation, en demande d’asile (réfugiés) ou encore d’une personne issue de l’immigration illégale. Selon les cas, l’accès aux prestations sociales n’est pas toujours possible.

Éric Zemmour assure que "les étrangers n'ont pas à toucher la solidarité nationale. Pourquoi ? Parce qu'ils ne sont pas Français. Je divise entre Français et étrangers".

Qui a droit à quoi ?

Selon l’administration française, un étranger non-européen peut prétendre aux prestations familiales seulement s'il réside habituellement en France et qu'il détient un titre de séjour, avec des enfants à charge présents légalement sur le territoire. Ainsi, les travailleurs détachés temporairement et non affiliés à la Sécurité sociale n’ont pas le droit aux prestations. Les étrangers en situation régulière ont également le droit de prétendre aux aides au logement (APL, ALF et ALS) sous condition de ressources.

Les migrants en situation irrégulière, par définition des personnes présentes en France sans en avoir le droit, ne bénéficient pas des prestations sociales évoquées plus haut. Cependant, ils peuvent recevoir l’aide médicale d’État (AME) qui est destinée à permettre l’accès des personnes en situation irrégulière aux soins médicaux. Pour bénéficier de cette aide, il faut résider en France de manière stable et ne pas gagner plus d’un certain revenu.

Une proposition difficile à appliquer en réalité

Interrogé par RTL, Pierre Egéa, avocat et professeur de droit à l'université de Toulouse assure qu'il "est certain que ce type de mesures proposées par Eric Zemmour pose un problème au niveau de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH)". Selon ce dernier, la France interdit de "faire de l'étranger une catégorie différente du non-étranger". Il nuance ensuite ses propos en disant qu'il est possible de faire une distinction "sur les droits politiques, mais pas sur les droits sociaux."

Pierre Egéa ajoute que "la jurisprudence du Conseil constitutionnel est très claire là-dessus : on peut faire une différence de traitement uniquement lorsqu'il y a une différence appréciable de situation". Puis il éclaire sa position : "Les étrangers en situation régulière paient des impôts, me semble-t-il. Donc ils sont placés dans la même situation que les Français à cet égard." Selon lui, "une distinction qui n'est pas légitime est une discrimination".

Lise Faron, responsable des questions liées au droit du séjour à La Cimade, ajoute que la notion d'aides financières est abusive. "C'est un piège de dire qu'il s'agit d'aides financières puisqu'il s'agit rarement de versements financiers" a-t-elle déclaré. En effet, certaines aides sont des prestations sociales. Ainsi, l’aide médicale d’État (AME) ne se concrétise pas dans un versement financier. Lise Faron conclut : "C'est en donnant largement accès aux droits que l'on arrivera à créer du vivre ensemble".

Publié dans Articles de Presse

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