Dupuy Charles
Charles-Alexandre Dupuy, né le 5 novembre 1851 au Puy-en-Velay et mort le 23 juillet 1923 à Ille-sur-Têt, est un homme politique français qui occupe cinq fois la fonction de président du Conseil sous la IIIe République.
Ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de philosophie, inspecteur d’académie, il est élu député républicain en 1885 et participe activement aux discussions sur les réformes de l’enseignement. Il est ministre de l'Instruction publique, des Beaux-Arts et des Cultes en 1892, pendant les deux premières présidences d’Alexandre Ribot. À la suite du scandale de Panama, qui fit tomber le cabinet Ribot, il est appelé à la présidence du Conseil, prenant également le ministère de l’Intérieur et des Cultes. Il travaille alors à l’alliance franco-russe et fait face aux troubles sociaux dans le Midi (grèves de Carmaux) et dans le Nord. Il est président du Conseil quand Sadi Carnot est assassiné le 24 juin 1894, il décide alors d'être candidat à l’élection présidentielle qui s’ensuit. Échouant, il s’entend mal avec le nouveau président de la République Jean Casimir-Perier qu’il réussit à faire démissionner au bout de six mois.
C’est également sous son ministère que Dreyfus est condamné en 1894. Il avait une réputation de courage, due à une phrase, prononcée alors qu’il était président de la Chambre et qu’explosa en 1894 une bombe lancée par l’anarchiste, Vaillant : « La séance continue ». On a prétendu que cette phrase n’aurait jamais été prononcée ou qu’elle aurait été le fruit d’un réflexe machinal car l’auteur n’aurait jamais eu conscience de l’avoir prononcée. De même, on a raconté qu’il avait arraché de sa joue un clou de la bombe qui s’y serait fiché. Ce n’est que le soir lorsqu’il se trouva dans sa chambre et qu’il peignait, comme d’habitude, sa barbe qui était très fournie qu’il en tomba un clou. C’est à ce moment-là qu’il aurait vraiment pris conscience du danger qui l’avait menacé et, une seconde durant, aurait ressenti une impression de panique.
Il s'attaque au mouvement socialiste (circulaire d'octobre 1894) tout en renforçant la police politique à la suite de l'attentat de Vaillant. Revenu à la présidence du Conseil en novembre 1898, en pleine affaire Dreyfus, il s'oppose avec détermination à la révision du procès et ne peut contenir l’agitation croissante des ligues d'extrême-droite : quand le baron Cristiani agresse à coups de canne le président Loubet au champ de courses d’Auteuil, on l’accuse presque de complicité, car les policiers, pourtant présents en nombre, n’interviennent que mollement. Cet incident lui vaut une motion de censure. Il est sénateur de 1900 jusqu’à sa mort en 1923. Il est cinq fois président du Conseil sous quatre présidents de la République différents :
- Sadi Carnot (4 avril au 3 décembre 1893 puis du 30 mai au 1er juillet 1894), dont il assura l’intérim (jusqu’au 27 juin 1894) ;
- Jean Casimir-Perier (du 1er juillet 1894 au 15 janvier 1895), dont il assura l’intérim (jusqu’au 17 janvier 1895) ;
- Félix Faure (du 1er novembre 1898 au 18 février 1899), dont il assura l’intérim (jusqu’au 18 février 1899) ;
- Émile Loubet (du 18 février au 12 juin 1899).
Le témoignage d’Anatole France : « Henri Brisson dura peu. Il ne dut qu’à son énergie de durer assez pour faire son devoir, et introduire la révision du procès de 1894, devenue nécessaire après les aveux et le suicide du colonel Henry. Il n’y a pas de mots pour peindre le ministère Dupuy qui lui succéda. Ce fut le chaos, l’écroulement et l’abîme. La République allait où l’emportait l’Affaire, que soulevaient en hurlant les nationalistes, entraînés par les bandes romaines. Alors régnèrent dans les villes les matraques et les bayados, et une canne aristocratique défonça le chapeau du président Loubet. » — in L’Église et la République (1904).