Heisenberg Werner
Werner Karl Heisenberg (5 décembre 1901 à Wurtzbourg, Allemagne - 1er février 1976 à Munich) était un physicien allemand. Il fut l'un des fondateurs de la mécanique quantique. Il est lauréat du prix Nobel de physique de 1932 « pour la création de la mécanique quantique, dont l’application a mené, entre autres, à la découverte des variétés allotropiques de l’hydrogène ».
Werner Heisenberg est né en 1901 à Wurtzbourg dans une famille d'enseignants (son père était l’helléniste August Heisenberg). Adolescent, Heisenberg fréquentait le lycée Maximilien de Munich ; il fut éclaireur dans des Mouvements de jeunesse. Il était passionné par les mathématiques et suivit en auditeur libre plusieurs cours de l’Université de Munich, notamment sur les méthodes mathématiques de la physique moderne. En fait, il voulait sauter les deux années préparatoires de mathématiques et à cette fin, il s'entretint avec un des professeurs de mathématiques, mais ce dernier se montra très critique vis-à-vis des mathématiques appliquées. Dans son autobiographie La Partie et le Tout (Der Teil und das Ganze), Heisenberg décrit l'entrevue comme un désastre : quand le professeur apprit qu'Heisenberg suivait les cours de physique, il rompit l'entretien avec ces mots : « Alors vous êtes vraiment perdu pour les mathématiques! » Il accomplit ses études de physique dans le délai record de trois ans, et soutint sa thèse sur « la stabilité des écoulements de fluide et la turbulence » sous la direction d’Arnold Sommerfeld. Dès 1924 il devenait l’assistant de Max Born à Göttingen puis il travailla avec Niels Bohr à Copenhague. C'est au cours des années suivantes qu'avec Max Born et Pascual Jordan, il jeta les bases théoriques de la mécanique quantique. Heisenberg fut recruté en 1927 comme professeur à l'Université de Leipzig âgé seulement de 26 ans. Il fit de cet établissement l'un des hauts-lieux de la physique théorique (et en particulier de la physique nucléaire) en Europe.
Il développa la première formalisation de la mécanique quantique, en 1925, en même temps qu'Erwin Schrödinger. Toutefois le formalisme mathématique était différent ; Heisenberg adopta une formalisation matricielle, la « mécanique matricielle », alors que Schrödinger utilisa une approche par les équations différentielles. Pour cette raison, on crut d'abord que les deux théories étaient distinctes, mais l'année suivante, Schrödinger établit l'équivalence mathématique des deux formulations. Heisenberg redécouvrit d'ailleurs à cette occasion les principaux résultats du calcul matriciel pour les besoins de l'expérimentation ; la théorie complète des matrices ne lui fut enseignée que plus tard par le physicien allemand Pascual Jordan. Son principe d'incertitude, découvert en 1927, affirme que la détermination de certains couples de valeurs, par exemple la position et la quantité de mouvement, ne peut se faire avec une précision infinie. On peut le formaliser sous la forme d'un produit : Δpx Δx ≈ h où Δpx représente l'indétermination sur la quantité de mouvement, l'indétermination sur la position et h la constante de Planck. Ce produit ne peut être inférieur à la constante h/4π (ou bien ħ/2, où ħ est la constante de Planck réduite) et donc toute précision dans la mesure d'une des deux quantités se fait au détriment de l'autre. Cette incertitude n'est pas liée à la mesure, mais est une propriété réelle des valeurs en question : améliorer la précision des instruments n'améliorera pas la précision de cette mesure simultanée.
À partir de 1929, il travailla avec Wolfgang Pauli à l'élaboration de la théorie quantique des champs. Il reçut le prix Nobel de physique en 1933 5(mais pour l'année 1932) « pour la création de la mécanique quantique, dont l'application a, entre autres, mené à la découverte des variétés allotropiques de l'hydrogène » (l'orthohydrogène et le parahydrogène). Après la découverte du neutron par James Chadwick en 1932, Heisenberg proposa le modèle proton-neutron du noyau atomique, et s'en servit pour expliquer le spin nucléaire des isotopes. La fission nucléaire fut découverte en Allemagne en 1938. Heisenberg resta en Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale et travailla sous le régime nazi : de 1942 jusqu'à 1945, Heisenberg dirigeait l’Institut de Physique Kaiser-Wilhelm à Dahlem et enseignait à l’Université Humboldt de Berlin, tout en étant l'un des pères du projet Uranium destiné au développement des armes secrètes allemandes. Il dirigea le programme allemand d'armement nucléaire au Kaiser Wilhelm Institut de Berlin, mais la réalité de sa collaboration est sujette à controverse. Il révéla l'existence du programme à Niels Bohr lors d'une conférence à Copenhague en septembre 1941. Cette réunion mit fin à la très longue amitié entre Heisenberg et Bohr, qui rejoignit le projet Manhattan. Cependant, les Allemands ne réussirent pas à produire d'arme nucléaire. Il y eut beaucoup de controverses pour savoir si Heisenberg avait vraiment tenté de ralentir le projet. Heisenberg affirma après la guerre qu'il aurait freiné ce programme s'il avait eu une chance de réussir. Le livre Heisenberg's War de Thomas Power, et la pièce de théâtre Copenhague de Michael Frayn exposent cette vision des choses.
En février 2002, on retrouve une lettre écrite par Bohr, mais jamais envoyée, datée 1957 et destinée à Heisenberg. Dans celle-ci, Bohr raconte qu'Heisenberg, lors de leur rencontre en 1941, n'exprima aucun scrupule moral concernant le projet allemand de bombe atomique, et qu'il avait passé les deux dernières années avant cette rencontre à travailler exclusivement sur ce projet. Il était convaincu qu'elle déciderait de l'issue de la guerre. De nombreux historiens des sciences prennent cette lettre comme une preuve de l'implication d'Heisenberg dans le programme allemand, mais plusieurs personnes ont avancé l'hypothèse que Bohr n'avait pas compris les intentions d'Heisenberg lors de cette réunion. Heisenberg écrivit plusieurs livres de vulgarisation, ainsi qu'un ouvrage intitulé Der Teil und das Ganze (La partie et le tout) à propos de sa vie, de son amitié avec Bohr et de l'évolution de la physique quantique.