La France commémore la rafle du Vel d'Hiv, une page sombre de son histoire
publié le 16/07/2012 à 16h39
Sur les 13.152 victimes de cette rafle -la plus grande arrestation massive de juifs réalisée en France pendant la Seconde Guerre mondiale-, seule une centaine de personnes ont survécu, dont aucun enfant.
Soixante-dix ans après la rafle du Vel d'Hiv à Paris en juillet 1942 au cours de laquelle 13.152 Juifs avaient été arrêtés, un
hommage aux victimes a été rendu lundi à Drancy, l'un des lieux de leur internement avant leur
départ vers les camps de la mort.
Cette cérémonie organisée à l'emplacement de l'ancien camp de Drancy, au nord de Paris, sera
suivie dimanche à Paris par une célébration en présence du président français François Hollande, devant le
monument à la mémoire des victimes érigé à l'emplacement du Vel D'Hiv, un ancien vélodrome où des milliers d'entre eux avaient été parqués.
Les 16 et 17 juillet 1942, 13.152 Juifs étrangers réfugiés en France avaient été arrêtés à Paris et en banlieue par la police française, avant d'être déportés vers des camps d'extermination,
notamment Auschwitz.
Parmi eux, 8.160 personnes, dont 4.115 enfants, avaient été enfermés durant quatre jours au Vélodrome d'hiver, un stade voué aux courses cyclistes dans l'ouest de Paris. Les 4.992 autres, couples
sans enfants et célibataires, étaient entassés dans le camp de Drancy, une cité d'habitations
transformée durant la guerre en camp d'internement et de transit vers les camps de la mort.
Sur les 13.152 victimes de cette rafle seule une centaine ont survécu, dont aucun enfant.
En 1995 le président Jacques Chirac avait rompu avec l'histoire officielle attribuant la responsabilité de la
rafle aux seules autorités d'occupation en reconnaissant que l'Etat français y avait apporté son concours.
Le rabbin Moché Lewin, porte-parole du Grand Rabbin de France, a invité lundi chacun à participer au "devoir de mémoire", pour "transmettre les valeurs humanitaires (...) de génération en
génération".
"Tirer les leçons de l'Histoire"
"Il faut le faire pour le salut de l'humanité elle-même, pour ne pas laisser se développer à nouveau l'idéologie barbare", a-t-il insisté, devant plusieurs centaines de personnes, dont des
anciens déportés et des représentants des religions juive, catholique, protestante et musulmane.
"Notre souffle d'anciens survivants s'essoufle lentement. Mais sachez que notre mémoire est votre héritage", a souligné Yvette Levy, ancienne déportée, lors d'un discours devant le wagon témoin,
semblable à ceux qui avaient servi de moyen de transport vers les camps.
"A Drancy, ce fut l'antichambre de la mort. Les conditions étaient abjectes et dantesques",
a-t-elle témoigné, avant de rendre hommage "aux vies brisées" et "aux destins anéantis" par la "barbarie nazie".
"Quand je suis revenu en France, après la guerre, je faisais 29 kilos", a témoigné Charles Baron, 85 ans, déporté à l'âge de 16 ans et dont les deux parents sont décédés dans les camps. "Mais les
gens ne croyaient pas ce que nous avions vécu", a-t-il confié à l'AFP.
"Aujourd'hui, il est important que ce drame ne reste pas oublié. Si un jour la situation s'aggravait à nouveau, ceux qui oublient seraient les premières victimes", a-t-il ajouté, jugeant
important de "tirer les leçons de l'Histoire".
Cet anniversaire survient alors qu'un sondage publié lundi fait apparaître qu'une majorité des moins de 35 ans ne sait pas ce qu'est la rafle du Vel d'Hiv.
Le "chasseur de nazis" français Serge Klarsfeld a estimé que l'enseignement de la Shoah dans les écoles était
pourtant "remarquable", mais il a incriminé un "nouvel antisémitisme" chez "des jeunes qui ne veulent pas l'écouter pour des raisons politiques".
Le ministre de l'Intérieur Manuel Valls s'est récemment inquiété d'un "antisémitisme nouveau" qui se développe depuis plusieurs années dans les cités populaires, au nom "d'une identité qui se
sentirait menacée", notamment parmi des jeunes musulmans.