Morgan Michèle

Publié le par Mémoires de Guerre

Simone Roussel, dite Michèle Morgan, est une actrice française née le 29 février 1920 à Neuilly-sur-Seine et morte le 20 décembre 2016. Dans sa filmographie, riche de plus de soixante-dix films des années 1930 aux années 1980, figurent de grands réalisateurs français et américains de ces cinq décennies, dont Marcel Carné, Marc Allégret, Jean Grémillon, Julien Duvivier, Michael Curtiz, Carol Reed, René Clément, Claude Autant-Lara, René Clair, André Cayatte, Jean Delannoy, Henri Decoin, Henri Verneuil, Michel Deville, Claude Chabrol ou Claude Lelouch, et des partenaires tels Michel Simon, Raimu, Jean Gabin, Charles Boyer, Humphrey Bogart, Jean Marais, Gérard Philipe, Henri Vidal, Bourvil, Michel Piccoli, Marcello Mastroianni ou Alain Delon. Dans Le Quai des brumes de Marcel Carné, son partenaire Jean Gabin lui adresse l'une des répliques les plus célèbres du cinéma français : « T'as d'beaux yeux, tu sais. ». Élue dix fois par le public « actrice française la plus populaire », elle est également la première actrice à recevoir le prix d'interprétation féminine au premier Festival de Cannes en 1946 pour son rôle de Gertrude dans le film La Symphonie pastorale (1945). Très primée à l'apogée de sa carrière dans les années 1950, elle reçoit en 1992 un César d'honneur, ainsi qu'un Lion d'or en 1996, en hommage à sa contribution au cinéma. À partir des années 1970, elle se fait plus discrète à l'écran et consacre son temps à la peinture, passion qui remonte à sa rencontre avec le peintre franco-polonais Moïse Kisling aux États-Unis en 1943, qui fit alors son portrait. On lui doit quelque sept cents dessins et peintures. 

Michèle Morgan

Michèle Morgan

Carrière

Enfance et débuts

Michèle Morgan naît en 1920 au 9, rue de l'Église à Neuilly-sur-Seine sous le nom d'état civil de Simone Renée Roussel. Elle est l'aînée des quatre enfants (avec Paul, Pierre et Hélène) de Louis Roussel, chef du service des correspondances étrangères dans une maison d’exportation de parfums, et de Georgette Pavot, mère au foyer. Son père se trouve au chômage après la crise de 1929. En 1933, il installe sa famille rue de la Barre à Dieppe, où il reprend le fonds de commerce d'une épicerie, mais fait faillite deux ans plus tard. La jeune Simone découvre la scène à l'occasion de spectacles du casino de Dieppe. En 1935, elle décide de « monter à Paris » avec pour chaperon — pour convaincre sa mère de la laisser aller à Paris —, son frère cadet, Paul, 12 ans, et s'installe chez ses grands-parents maternels à Neuilly-sur-Seine. Par l'intermédiaire d'agences de casting, elle obtient son premier rôle comme figurante dans Mam'zelle Mozart. Le réalisateur Yvan Noé lui conseille de se perfectionner en prenant des cours d'art dramatique. L'année suivante, elle s'inscrit au cours Simon. Elle adopte en 1937 le pseudonyme de Michèle Morgan.

Actrice

En mars 1937, la scripte Jeanne Witta recommande Michèle Morgan au réalisateur Marc Allégret qui prépare son film Gribouille. Après un essai concluant, le milliardaire suisse Max Stoffel, producteur du film, insiste pour lui confier le premier rôle féminin. Elle signe son premier contrat pour un montant de 12 500 francs. Le film est un succès. La RKO lui propose un contrat à Hollywood sur la base de 2 000 F par semaine10. À la fin de 1937, elle tourne Orage avec Charles Boyer, grande vedette de l'époque. En 1938, elle tourne avec Jean Gabin dans Le Quai des brumes que réalise Marcel Carné. Son regard, d'un bleu limpide, un peu énigmatique et lointain, parfois comparé à celui de Greta Garbo, inspire à Jacques Prévert l'une des répliques les plus célèbres du cinéma dans ce film où le personnage, incarné par Jean Gabin, lui murmure : « T'as d'beaux yeux, tu sais. ». Le titre de ses mémoires, Avec ces yeux-là, publiés en 1977, y fait également référence. En 1999, son compagnon Gérard Oury, élu à l'Académie des beaux-arts l'année précédente, demande au graveur et sculpteur Pierre-Yves Trémois de graver cette même phrase sur son épée d'académicien. 

Le 3 septembre 1939, la guerre éclate, Jean Gabin est mobilisé à Cherbourg dans la marine nationale. Il obtient une permission exceptionnelle pour terminer le film Remorques qu'ils tournent ensemble. Alors qu'ils entretiennent une brève idylle, ils partent l'un et l'autre, séparément, pour Hollywood. Pendant la guerre, elle tourne cinq films aux États-Unis, tous assez décevants. En 1942, elle tourne un bout d'essai pour le rôle principal de Soupçons, le film que prépare Alfred Hitchcock ; elle n'est pas retenue à cause de son anglais insuffisant. Pressentie pour Casablanca, qui révèlera la comédienne Ingrid Bergman, elle est convoquée et auditionnée mais, son agent ayant réclamé un cachet beaucoup trop élevé, le rôle lui échappe. Elle reçoit en compensation celui de Passage pour Marseille. Elle reconnaîtra par la suite avoir commis plusieurs erreurs durant sa carrière : elle refuse ainsi le rôle principal de Johnny Belinda, qui vaut à Jane Wyman l'Oscar de la meilleure actrice, et celui de La Nuit de Michelangelo Antonioni. De même, par peur de la scène, elle renonce à participer à la création de Thé et Sympathie, qui connaît ensuite le succès avec Ingrid Bergman.

À son retour en France, elle reçoit en revanche le premier prix d'interprétation féminine de l'histoire du Festival de Cannes en 1946 pour le rôle de Gertrude dans La Symphonie pastorale de Jean Delannoy. En 1948, elle divorce de William Marshall, puis épouse le 6 février 1950 l'acteur Henri Vidal. Tous deux résident dans un appartement de l'hôtel Lambert, à Paris, et tourneront plusieurs films ensemble. En 1955, elle forme un couple avec Gérard Philipe dans Les Grandes Manœuvres de René Clair. Elle est alors au sommet de sa célébrité. En 1957, elle tourne Retour de Manivelle, film qui marque un tournant dans sa carrière : incarnant jusqu'ici principalement des héroïnes fragiles, elle y joue une femme fatale de série noire, ce qui lui vaut ce jugement : « On est étonné de voir comment ses yeux peuvent devenir durs, sa bouche méprisante et sa voix cruelle. » Après la mort d'Henri Vidal, en 1959, elle devient la compagne du cinéaste Gérard Oury, rencontré sur le tournage du film Le Miroir à deux faces d'André Cayatte, l'année précédente. Ils resteront ensemble jusqu'au décès de Gérard Oury en 2006, mais n'auront pas d'enfants. 

Ignorée par les cinéastes de la Nouvelle Vague, qui jugent les acteurs d'avant-guerre trop chers mais aussi trop intimidants (seul Claude Chabrol fait appel à elle en 1962 dans Landru), elle joue dans des films noirs dans les années 1960. Elle doit à Michel Deville une belle occasion de rappeler sa sensualité, en interprétant une comtesse rouée dans Benjamin ou les Mémoires d'un puceau en 1967. Michèle Morgan suspend ensuite sa carrière, enregistre des poèmes et se consacre essentiellement à la peinture (gouaches, collages, huiles), dont la passion correspond à sa rencontre avec le peintre franco-polonais Moïse Kisling qui avait réalisé son portrait en 1943 à Los Angeles, et à la haute couture. Elle réapparaît épisodiquement pour la télévision, le cinéma ou le théâtre. Elle préside également le jury du Festival de Cannes 1971. En 1975, Claude Lelouch la fait revenir à l'écran dans Le Chat et la Souris. Elle annonce son retrait du cinéma après ce film. En 1986, elle joue dans la série Le Tiroir secret dans laquelle elle est accompagnée de son fils Mike Marshall et de sa belle-fille Tonie Marshall. En 1996, elle est la marraine du Festival de Cannes et reçoit un Lion d'or pour l'ensemble de sa carrière. En 1997, elle joue dans le téléfilm Des gens si bien élevés, dont le scénario est écrit par Danièle Thompson, fille de Gérard Oury. Après avoir été élue dix fois par le public « actrice française la plus populaire », Michèle Morgan annonce la fin de sa carrière en janvier 2001. 

Décès

Michèle Morgan meurt le 20 décembre 2016 à son domicile de Neuilly-sur-Seine : « Dans sa 97e année, les plus beaux yeux du cinéma se sont fermés définitivement ce matin, mardi 20 décembre », annonce sa famille. Après des obsèques le 23 décembre à l'église Saint-Pierre de Neuilly-sur-Seine, elle est inhumée au cimetière du Montparnasse (5e division), dans le carré juif, au sein du caveau familial où se trouvent son compagnon, le cinéaste Gérard Oury, la mère de celui-ci, Marcelle Houry, et son ex-épouse Jacqueline Roman (mère de Danièle Thompson). La comédienne étant catholique, le grand-rabbin a accordé une dérogation. De nombreux souvenirs lui ayant appartenu ont fait l'objet d'une vente publique aux enchères, à Paris le 21 décembre 2017. 

Vie privée

Elle vécut une histoire d'amour avec Gérard Oury qui dura cinquante ans sans habiter sous le même toit. Après avoir rompu avec Gabin, elle épouse aux États-Unis l'acteur William Marshall, dont elle a un fils, Mike Marshall (1944-2005). 

Distinctions

Récompenses
  • 1946 : Festival de Cannes : grand prix d'interprétation féminine pour La Symphonie pastorale
  • 1950, 1952, 1953, 1954 et 1955 : Premier prix de popularité du magazine Ciné-revue
  • 1950, 1954, 1955 et 1956 : Victoires du cinéma français (Cinémonde) : meilleure actrice
  • 1954 : Triomphes du cinéma (Ciné-revue) : meilleure actrice pour Les Orgueilleux
  • 1961 : Prix de la meilleure actrice étrangère pour Grand Hôtel (Espagne)
  • 1992 : Césars du cinéma : César d'honneur pour l'ensemble de sa carrière
  • 1996 : Mostra de Venise : Lion d'or pour la carrière
Décorations
  • Grand-croix de la Légion d'honneur Grand-croix de la Légion d'honneur (2013) ; grand officier (2009) ; officier (1994) ; chevalier (1969)
  • Grand-croix de l'ordre national du Mérite Grand-croix de l'ordre national du Mérite (2004) ; grand officier (1998) ; commandeur (1991) ; officier (1975) ; chevalier (1964, 1re promotion))
  • Commandeur de l'ordre des Arts et des Lettres Commandeur de l'ordre des Arts et des Lettres (1985) ; officier ; chevalier (1960)
  • Médaille de vermeil de la Ville de Paris (1967)
Hommage
  • Hollywood Walk of Fame : étoile inaugurée le 8 février 1960, face au 1645 Vine Street, à Hollywood
Morgan Michèle

Filmographie

Télévision

  • 1953 : Studio One, épisodes Camille et Silent the Song
  • 1967 : La Bien-aimée de Jacques Doniol-Valcroze : Fanny Dréal
  • 1976 : Hommage à Raimu, documentaire de Raymond Castans et Solange Peters : elle-même
  • 1981 : Le Tout pour le tout de Jacques Brialy
  • 1984 : Chéri d'après Colette, captation théâtrale d'Yves-André Hubert : Léa
  • 1986 : Le Tiroir secret, feuilleton en six épisodes d'Édouard Molinaro, Roger Gillioz, Michel Boisrond et Nadine Trintignant : Colette Dutilleul-Lemarchand
  • 1995 : La Veuve de l'architecte de Philippe Monnier : Héléna Kramp
  • 1997 : Des gens si bien élevés d'Alain Nahum : Geneviève
  • 1999 : La Rivale d'Alain Nahum : Judith Legrand
  • 2007 : Michèle Morgan avec ces yeux-là, documentaire d'Anne Andreu : elle-même
  • 2010 : Les Trois Glorieuses, documentaire d'Henry-Jean Servat et Pierrick Bequet : elle-même

Théâtre

  • 1936 : La Fête du printemps, Monsieur Mécano : petits rôles
  • 1978 : Le Tout pour le tout de Françoise Dorin, mise en scène Raymond Gérôme, théâtre du Palais-Royal
  • 1982 : Chéri de Colette, mise en scène Jean-Laurent Cochet, théâtre des Variétés
  • 1983 : Chéri de Colette, mise en scène Jean-Laurent Cochet, théâtre des Célestins
  • 1988 : Une femme sans histoire d'Albert Ramsdell Gurney, mise en scène Bernard Murat, théâtre des Champs-Élysées
  • 1993 : Les Monstres sacrés de Jean Cocteau, mise en scène Raymond Gérôme, avec Jean Marais, théâtre des Bouffes-Parisiens

Publications

  • Michèle Morgan, Mes yeux ont vu, Éditions U.G.E., coll. « Voici », 1965, 182 p. (ASIN B0000DVL3P)
  • Michèle Morgan (avec Marcelle Routier), Avec ces yeux-là, Robert Laffont, 1977, 329 p. (ISBN 2221002229 et 978-2221002223)
  • Michèle Morgan, Le Fil bleu. Le roman de ma famille, Plon, 1993. (ISBN 225902680X et 978-2259026802)

Article Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Mich%C3%A8le_Morgan

Publié dans Acteurs et Actrices

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