Einstein Albert

Publié le par Mémoires de Guerre

Albert Einstein né le 14 mars 1879 à Ulm, dans le Wurtemberg (Empire allemand), et mort le 18 avril 1955 à Princeton, dans le New Jersey (États-Unis), est un physicien théoricien. Il fut successivement allemand, apatride (entre 1896 et 1901), suisse (1901) et de double nationalité helvético-américaine (1940). Il épousa Mileva Marić, puis sa cousine Elsa Einstein. Il publie sa théorie de la relativité restreinte en 1905 et sa théorie de la gravitation, dite relativité générale, en 1915. Il contribue largement au développement de la mécanique quantique et de la cosmologie, et reçoit le prix Nobel de physique de 1921 pour son explication de l’effet photoélectrique. Son travail est notamment connu du grand public pour l’équation E=mc2, qui établit une équivalence entre la masse et l’énergie d’un système. Il est aujourd'hui considéré comme l'un des plus grands scientifiques de l'histoire, et sa renommée dépasse largement le milieu scientifique. Il est la personnalité du XXe siècle selon l'hebdomadaire Time. Dans la culture populaire, son nom et sa personne sont directement liés aux notions d'intelligence, de savoir et de génie. 

Einstein Albert

La jeunesse d'Einstein

L'année qui suit sa naissance, ses parents s'installent à Munich, qui va être le cadre de son enfance. Son père, un juif qui appartient à la petite bourgeoisie souabe aux idées libérales, y a fondé une modeste usine d'appareils et d'outillage électriques. Albert fait au lycée des études médiocres, sans que rien laisse alors présager une vocation exceptionnelle ; aucun de ses professeurs ne se souviendra plus tard de lui ; il y supporte d'ailleurs fort mal une discipline quasi militaire. Dès cette époque, l'autorité indiscutée et la contrainte lui paraissent intolérables. Après une crise de ferveur religieuse, Albert adopte une attitude de libre penseur qu'il qualifiera lui-même de fanatique. Lorsqu'il atteint l'âge de quinze ans, ses parents et sa sœur émigrent à Milan dans l'espoir d'une situation plus florissante, et il va poursuivre ses études à Aarau, en Suisse, grâce à l'aide de parents fortunés. Après un premier échec, il passe son baccalauréat, entre en 1896 à l'Institut polytechnique de Zurich et décide de se consacrer à l'enseignement plutôt que d'aborder la carrière d'ingénieur. Il adopte alors la nationalité suisse.

Ayant terminé ses études, il cherche en vain une situation dans l'université ; toute sa vie, il regrettera de n'avoir pas eu à instruire de jeunes enfants. Grâce au père d'un camarade, ému de ses difficultés, il obtient enfin en 1902 un emploi à l'Office fédéral des brevets, à Berne. Cette situation modeste lui permet alors d'épouser une étudiante serbe, Mileva Marec, un peu plus âgée que lui, qui se destine aussi à l'enseignement de la physique. Deux fils naîtront de cette union. Bien qu'Einstein exerce son humble métier avec une grande conscience, les larges loisirs qui lui sont offerts lui permettent de réfléchir aux graves problèmes qu'en ce début de siècle commence à poser la physique. En effet, les fondements de la mécanique résistent mal à l'analyse critique de l'Autrichien Ernst Mach (1838-1916). H.A. Lorentz a dû introduire une contraction longitudinale des objets en mouvement et une altération locale du temps. Albert Michelson (1852-1931) vient de mettre en évidence la constance de la vitesse de la lumière, en dépit du mouvement de l'observateur par rapport au milieu de sa propagation. Planck, enfin, a suggéré que l'énergie rayonnante doit être émise de façon discontinue.

Des découvertes majeures : le photon, la relativité restreinte

L'attention d'Einstein se porte d'abord sur la structure atomique de la matière, sur l'interprétation statistique de la thermodynamique et sur cette hypothèse des quanta de Planck (→ théorie quantique). Il est le premier à comprendre la portée des discontinuités quantiques, qui n'intéressent pas la seule émission ; il en fait l'application à l'énergie rayonnante, ce qui l'amène à l'hypothèse des grains de lumière, ou photons, ressuscitant la vieille théorie corpusculaire de Newton ; il peut ainsi expliquer l'effet photoélectrique et en découvrir les lois. Appliquant d'autre part le calcul des probabilités au mouvement brownien, il en édifie la théorie et arrive à obtenir une valeur correcte du nombre d'Avogadro. Trois articles de lui, publiés en 1905 par les Annalen der Physik font connaître ces travaux. Et la même année, dans la même publication, il écrit encore deux articles, beaucoup plus originaux : Sur l'électrodynamique des corps en mouvement et L'inertie d'un corps dépend-elle de son contenu en énergie ?, où se trouve un exposé complet d'une théorie entièrement créée par lui, celle de la relativité restreinte ; celle-ci modifie les lois de la mécanique newtonienne et introduit l'équivalence de la masse et de l'énergie avec la célèbre formule E = mc2.

Einstein professeur

Alors que ces articles annoncent la force qui va bouleverser le monde, personne ne semble d'abord les avoir remarqués. Ce n'est que trois ou quatre ans plus tard que l'attention du monde savant se porte sur eux. Einstein devient brusquement l'homme dont on parle. Ses idées, qui ne sont d'ailleurs pas souvent comprises, sont âprement discutées ; mais elles ouvrent au jeune homme, non sans difficulté, les portes de la carrière universitaire. Après un bref passage à l'université de Berne, où il est employé comme maître de conférences, Einstein est appelé, en 1909, comme professeur extraordinaire, c'est-à-dire suppléant, à Zurich. Puis, après un séjour à l'université allemande de Prague (1911-1912), il obtient une chaire à l'École polytechnique fédérale de Zurich, sur les bancs de laquelle il a été élève. Enfin, sur les instances de Planck et de Nernst, il accepte, en 1913, d'aller enseigner à l'institut Kaiser-Wilhelm de Berlin et d'entrer à l'Académie des sciences de Prusse. Bien que son caractère indépendant, ses idées politiques et sociales ne puissent l'attirer vers l'Allemagne de Guillaume II, il part pour Berlin, qui est alors un des centres les plus brillants de la science européenne : il se laisse en effet tenter par l'espoir de travailler aux côtés des grands maîtres qui ont sollicité sa venue. C'est pendant cette période qu'il s'emploie à élargir la théorie de la relativité en y intégrant la gravitation. Mais sa nomination en Allemagne est aussi marquée pour lui par la dislocation de son ménage, dans lequel la bonne entente s'est progressivement altérée.

La relativité générale

Einstein a exigé de conserver sa nationalité helvétique ; c'est ce qui lui permet d'adopter une attitude de neutralité pendant la Première Guerre mondiale. Il peut, en la faisant valoir, refuser de signer le manifeste des quatre-vingt-treize intellectuels, cette capitulation de l'indépendance spirituelle allemande, et il fait entendre une voix discordante dans le concert de haine. « Les siècles futurs, écrit-il à Romain Rolland, dont il admire la prise de position, pourront-ils vraiment glorifier notre Europe, où trois siècles du travail culturel le plus intense n'ont abouti à rien de plus qu'à passer de la folie religieuse à la folie nationale ? ». À ce moment de sa vie, il retrouve une famille en se remariant avec sa cousine Elsa, déjà mère de deux filles ; celle-ci, jusqu'à sa mort, prendra discrètement soin de lui. C'est dans la quiétude de ce nouveau foyer qu'il approfondit peu à peu ses théories et aboutit en 1916 à la relativité généralisée, théorie de la gravitation concernant un univers à quatre dimensions, courbe et fini, qui va engendrer la cosmologie moderne.

En dépit de la guerre, ce travail est connu en Angleterre. Aussi, en 1919, l'astronome britannique Eddington vérifie-t-il lui-même, dans le golfe de Guinée, la courbure des rayons lumineux rasant le bord de la Lune lors d'une éclipse solaire (→ lumière). Alors que le Suisse Charles Eugène Guye (1866-1942) avait, avec Lavanchy, dès 1913, mesuré l'augmentation de masse d'électrons très rapides, prévue par la relativité restreinte, c'est maintenant la confirmation, beaucoup plus difficile, de la relativité générale. Annonçant ce résultat, le président de la Société royale de Londres qualifie la théorie d'Einstein comme « la plus grande découverte concernant la gravitation qui ait été faite depuis que Newton a énoncé ses principes ».

Un scientifique célèbre et engagé

En 1921, enfin, Einstein reçoit le prix Nobel de physique, mais, comme la relativité paraît encore trop aventureuse pour figurer parmi les motifs, ce prix est « décerné à M. Einstein pour ses mérites dans le domaine de la physique théorique, et spécialement pour sa découverte de la loi de l'effet photoélectrique ». Il en partage le montant entre sa première femme et une œuvre charitable. Devenu célèbre, Einstein effectue de nombreux voyages qui le conduisent d'Amérique en Extrême-Orient. Il profite de sa notoriété pour défendre les causes qui lui tiennent à cœur ; ennemi de l'injustice, il tente, en toute occasion, de venir en aide aux opprimés. On le consulte à tout propos et il est appelé à faire partie de la Commission de coopération intellectuelle créée par la Société des Nations.

Cependant, il poursuit toujours ses travaux scientifiques. Ayant eu connaissance, par l'intermédiaire de son ami P. Langevin, de la fameuse thèse de Louis de Broglie, il publie en 1924 une note où, en se servant aussi d'un récent travail du physicien indien Satyendranath Bose, il crée une statistique valable pour les particules indiscernables (statistique de Bose-Einstein). En 1929, il expose, dans une communication à l'Académie des sciences de Prusse, sa « théorie du champ unitaire », qui résume, en une série d'équations, les lois qui gouvernent les deux forces fondamentales de l'univers, la gravitation et l'électromagnétisme. Plus tard, lorsque d'autres forces seront identifiées, notamment les forces nucléaires, il tentera de les englober dans cette synthèse (→ interactions fondamentales).

Einstein et la bombe atomique

Jusqu'en 1933, Einstein demeure à Berlin ou dans sa maison de campagne de Caputh, non loin de la capitale. Mais, lorsqu'il apprend d'Amérique, où il effectue un de ses fréquents séjours, l'accession de Hitler au pouvoir, il décide de ne pas retourner en Allemagne, où sa situation était déjà devenue difficile ; il abandonne tous ses biens et envoie sa démission à l'Académie des sciences de Prusse. Il réside d'abord au Coq-sur-Mer, en Belgique, dont le couple royal compte parmi ses amis, envisage un moment d'accepter une chaire qu'on lui offre au Collège de France et s'installe enfin aux États-Unis, où il devient directeur de l'Institute for Avanced Study de Princeton. Il peut, dans le calme qui entoure ce haut lieu de l'esprit, reprendre le cours de ses recherches. En 1940, il acquerra la nationalité américaine.

La mort de son épouse en 1936, les odieuses persécutions raciales du régime national-socialiste, l'annonce du cataclysme qui va fondre sur le monde assombrissent ses jours. Malgré son horreur du militarisme, Einstein déplore l'impréparation à la guerre des démocraties occidentales. Lorsque Niels Bohr, de passage en Amérique, propage la nouvelle de la découverte du phénomène de fission, Fermi et Leo Szilard interviennent auprès de lui, et Einstein envoie en 1939 au président Roosevelt le message suivant : « Les résultats des recherches effectuées récemment par E. Fermi et L. Szilard, qui m'ont été soumis en manuscrit, me démontrent qu'on peut s'attendre à ce que l'élément uranium puisse, dans un avenir immédiat, devenir une nouvelle et importante source d'énergie. Ce nouveau phénomène peut conduire aussi à la construction de bombes extrêmement puissantes. Une seule de ces bombes, transportée par bateau, et qu'on laisserait exploser dans un port, pourrait détruire tout le port et le territoire environnant. » On connaît les suites de cette lettre ; comme il le dira plus tard avec tristesse, lui, pacifiste convaincu, il a « pressé sur le bouton ».

Einstein et la paix du monde

« La guerre est gagnée, mais non pas la paix », écrit-il à la fin du cauchemar. L'explosif nucléaire menace la survie de l'humanité. Dès 1946, Einstein sait que « détourner cette menace est devenu le problème le plus urgent de notre temps ». Avec la conscience de cette mission à accomplir, il a trouvé le sens de la vie qu'il lui reste à vivre. Il mène une ardente campagne contre la bombe à hydrogène et prend vigoureusement le parti des victimes du maccartisme. Alors qu'il a soutenu en vain les projets de contrôle international de l'énergie atomique, le plan qu'il préconise est l'établissement d'un gouvernement mondial, et il l'annonce en 1947 dans une lettre ouverte aux Nations unies. Il multiplie les appels aux dirigeants et aux responsables des décisions qui engagent le destin du monde. Mais la mort vient le surprendre avant qu'il ait pu aboutir à un exposé définitif de sa théorie du champ unitaire et sans que ses paroles humanitaires aient été vraiment entendues. Ainsi que l'a écrit Louis de Broglie, « par la nouveauté et la profondeur des idées qu'il a introduites en physique, par les répercussions profondes que ces idées ont eues sur toute l'orientation de la science contemporaine, Albert Einstein mérite d'être regardé comme l'un des plus grands esprits scientifiques de tous les temps ».

Einstein Albert

Einstein et la religion

Einstein écrit plusieurs textes traitant des relations entre science et religion. Dans son article paru en 1930, Einstein distingue trois formes de religion :

  • la première est due à la crainte et à une incompréhension de la causalité des phénomènes naturels, d’où l'invention d’êtres surnaturels ;
  • la deuxième est sociale et morale ;
  • la troisième, qu’Einstein appelle « religiosité cosmique », est une contemplation de la structure de l'Univers. Elle est compatible avec la science et n'est associée à aucun dogme ni croyance. Einstein déclare être religieux, mais seulement dans ce troisième sens qu’il voit dans le mot religion.

Lorsque, en 1929, le rabbin Herbert S. Goldstein lui demande « Croyez-vous en Dieu ? », Einstein répond : « Je crois au Dieu de Spinoza qui se révèle lui-même dans l’ordre harmonieux de ce qui existe, et non en un Dieu qui se soucie du destin et des actions des êtres humains. ». Einstein se réclame également du panthéisme de Spinoza dans son ouvrage Comment je vois le monde. Il définit le sentiment religieux du scientifique comme la croyance en l'intelligibilité du monde, et en une « raison supérieure » qui se dévoile dans « le monde de l'expérience ». Selon lui, les religions traditionnelles relèvent de l'histoire et de la psychologie. Einstein a souvent utilisé le mot Dieu, comme dans ses célèbres formules « Dieu est subtil, mais pas malveillant » ou « Dieu ne joue pas aux dés », cependant le sens qu’il donnait à ce mot fait l’objet de diverses interprétations. Une partie du clergé a considéré que les vues d’Einstein étaient compatibles avec la foi. À l’inverse, le Vatican dénonce alors « un authentique athéisme même s'il est dissimulé derrière un panthéisme cosmique ». Si Einstein rejette les croyances traditionnelles, il se distingue personnellement des athées et répète qu’il est « un non-croyant profondément religieux ».

Une lettre manuscrite écrite en allemand un an avant sa mort, et adressée au philosophe Eric Gutkind, a été vendue sur eBay en octobre 2012 pour la somme de 3 000 100 $US. Einstein y écrivait : « Le mot Dieu n’est pour moi rien de plus que l’expression et le produit des faiblesses humaines, la Bible un recueil de légendes, certes honorables mais primitives qui sont néanmoins assez puériles. Aucune interprétation, aussi subtile soit-elle, ne peut selon moi changer cela. » Einstein répondra d’ailleurs à un journaliste lui demandant s’il croit en Dieu : « Définissez-moi d’abord ce que vous entendez par Dieu, et je vous dirai si j’y crois. » Un militant de l’athéisme comme Richard Dawkins considère également que la position d’Einstein était seulement de l’athéisme poétiquement embelli. Lors de la campagne d’affichage de slogans en faveur de l’athéisme sur les bus de Londres en 2008 (soutenue par Dawkins), une citation d’Einstein fut utilisée. Cela provoqua des protestations, cette utilisation ayant tendance à assimiler Einstein à un athée. Dans ses mémoires, le diplomate Harry Kessler mentionne le fait d'avoir assisté à un échange entre l'une de ses connaissances et Einstein. À la question : « Professeur, est-ce vrai que vous êtes profondément religieux ? », Albert Einstein aurait répondu :

« Certainement, ça dépend des points de vue. Quand j'essaie de pénétrer avec nos moyens limités les secrets de la nature, on découvre derrière tous les rapports qu'on peut connaître quelque chose de très subtil, d'insaisissable, d'inexplicable. Ma religion, c'est le profond respect de ce qu'il y a au-delà des domaines que nous pouvons explorer. C'est ainsi en effet que je suis croyant. » En 1929 le Saturday Evening Post publie une interview d'Einstein par George Sylvester Viereck. Interrogé sur la personne de Jésus-Christ, Albert Einstein qualifie le Jésus de l'écrivain Emil Ludwig de peu profond, ajoutant que personne ne peut exprimer le christianisme avec un bon mot. Il accepte en revanche sans hésitation l'existence du Jésus historique. Il déclare d'ailleurs, concernant les Évangiles, que personne ne peut les lire « sans ressentir la présence réelle de Jésus. Sa personnalité résonne dans chaque mot. Aucun mythe n'est rempli d'une telle vie… ». Il déclare quelques lignes plus loin : « Aucun homme ne peut nier le fait que Jésus ait existé ou que ses paroles soient magnifiques. Bien que certaines aient été dites auparavant, personne ne les a exprimées si divinement. » Plus tard, interrogé par Denis Brian pour sa biographie Einstein : a life sur l'authenticité de ces phrases, Einstein a répondu : « Oui, c'est ce que je crois. ».

Einstein et le judaïsme

Albert Einstein s'intéresse aux questions du sionisme et de l'antisémitisme durant l'entre-deux-guerres, surtout entre 1919 et 1930, période pendant laquelle Einstein a produit de nombreux écrits attestant de ses positions sur ces questions. Durant l'entre-deux-guerres, il se rend en Palestine pour participer à la création de l'université hébraïque de Jérusalem ; il en sera gouverneur non-résident jusqu'à sa mort en 1955 et léguera tous ses écrits et son patrimoine intellectuel à cette université. 

Einstein et les mathématiques

Albert Einstein étudia les mathématiques auprès de professeurs comme Adolf Hurwitz ou Hermann Minkowski, mais reconnaît dans ses Documents autobiographiques (Œuvres choisies) que son « intuition dans le domaine des mathématiques n'était pas assez forte pour distinguer avec sûreté ce qui est essentiel et fondamental du reste. (…) Mon intérêt pour la connaissance de la nature était réellement plus fort ; et du temps de mes études, il ne m'était pas évident que l'accès à une connaissance plus approfondie des principes de la physique passe obligatoirement par les méthodes mathématiques les plus raffinées ». D'ailleurs, Albert Einstein, en 1921, lors de la conférence berlinoise intitulée la géométrie et l'expérience (conférence considérée comme le texte épistémologique le plus important d'Einstein, selon l'étude de Michel Paty, Einstein philosophe), déclara des propos confirmant la « destitution » de la géométrie euclidienne : « Pour autant que les propositions de la mathématique se rapportent à la réalité, elles ne sont pas certaines, et pour autant qu'elles sont certaines, elles ne se rapportent pas à la réalité. » Cette prise de distance très significative chez Einstein, par rapport aux mathématiques, trouve sa description dans un ouvrage de 1917, La Théorie de la relativité restreinte et généralisée mise à la portée de tous : la configuration géométrique/mathématique du monde devient elle-même quelque chose de relatif, dépendant de la distribution des masses et de leur vitesse.

Einstein et l’astrologie

Contrairement à la citation qui lui est attachée par de nombreuses publications, en particulier celle de l’astrologue Élizabeth Teissier, Einstein ne croyait pas en l’astrologie. La citation apocryphe qui lui est attribuée est : « L’astrologie est une science en soi, illuminatrice. J’ai beaucoup appris grâce à elle et je lui dois beaucoup. Les connaissances géophysiques mettent en relief le pouvoir des étoiles et des planètes sur le destin terrestre. À son tour, en un certain sens, l’astrologie le renforce. C’est pourquoi c’est une espèce d’élixir de vie pour l’humanité. ». Ce faux a pour origine le Huters astrologischer Kalender de 1960, publié en 1959. La phrase a donc été forgée environ cinq ans après la mort d’Einstein. Son opinion négative sur l’astrologie est exprimée dans une introduction écrite en 1951 pour l’ouvrage de Carola Baumgardt. Einstein rappelle que Kepler avait su accepter l’idée que l’expérience seule pouvait décider de la validité d’une théorie mathématique, aussi belle soit-elle. Il cite alors l’astrologie comme illustration, dans la pensée képlérienne, d’un reste de manière de penser animiste et téléologiquement orientée omniprésente dans les recherches « scientifiques » de l’époque. 

Einstein et le végétarisme

Albert Einstein soutient la cause végétarienne. Il considère le végétarisme comme un idéal sans pourtant le pratiquer lui-même malgré quelques problèmes de conscience. Ses arguments se basent principalement sur des raisons de santé, mais il croit également à l’effet bénéfique du régime végétarien sur le tempérament des hommes. Un an avant sa mort, il décide de mettre en pratique ses idées et entame un régime végétarien. On peut trouver les raisons philosophiques de ce choix dans son livre Comment je vois le monde, concernant sa judaïté : « Les points essentiels de la conception juive de la vie paraissent les suivants : affirmation du droit à la vie pour toutes les créatures ; la vie de l'individu n'a de sens qu'au service de l'embellissement et de l'ennoblissement de l'existence de tous les êtres vivants ; la vie est sacrée, c'est-à-dire qu'elle est la valeur suprême d'où dépendent toutes les évaluations. » — Albert Einstein, Comment je vois le monde, « Les idéaux juifs ».

Vie familiale

Sa première épouse, Mileva Maric est atteinte de coccygodynie, ce qui la rend boiteuse. C’est aussi une jeune physicienne brillante, élève du Polytechnicum. Elle tombe enceinte alors qu’ils ne sont pas encore mariés, et elle accouche en janvier 1902 chez ses parents, en Serbie, d’une fille prénommée Lieserl (Élisabeth ?), qu'Albert oblige probablement à abandonner et dont on perd la trace, bien qu'une biographe conclut que l'enfant, handicapée mentale, a été élevée par sa mère Mileva et les parents de cette dernière, et qu'elle est morte en bas âge de la scarlatine. Einstein se montra très dur avec son épouse, ainsi qu'avec sa compagne suivante, Elsa Einstein, doublement sa cousine. Elsa et Albert commencent leur relation à Pâques 1912. Après avoir abandonné sa première épouse, et un divorce en 1919 où il la dénigre auprès de ses amis et de ses avocats, en regrettant d'avoir accepté de concevoir des enfants « avec une personne moralement et physiquement inférieure… », Einstein épouse sa double cousine, le 2 juin 1919. Il voit peu son fils Hans-Albert, né en 1904, qui, à l’âge adulte, travaille en Californie. 

La santé mentale d'Eduard, son autre fils, surdoué mais sensible, né en 1910, se détériore brutalement alors qu’il est âgé de vingt ans et diagnostiqué schizophrène, et il doit être interné une première fois en 1930 à la clinique psychiatrique universitaire de Zurich. Mileva supporte seule la maladie de son fils pendant presque trente ans jusqu’à sa mort en 1948, en donnant des cours de mathématiques et de piano. Avant de s'exiler, Albert rend une dernière visite à son fils en 1933 dans cette clinique où il meurt en 1965. D’abord critique envers la psychanalyse (« Il n'est peut-être pas toujours bon de fouiller dans l'inconscient. Croyez-vous que connaître le mouvement de tous les muscles qui composent nos jambes nous aiderait à marcher ? »), il s'oppose au désir de son fils Eduard d'entreprendre des études pour devenir psychiatre ou psychanalyste, puis refuse que celui-ci suive un nouveau traitement psychanalytique. En 1933, il choisit cependant Sigmund Freud pour publier un échange de lettres intitulé Pourquoi la guerre ?. 

Distinctions

  • 1921 : prix Nobel de physique ;
  • 1929 : médaille Max-Planck ;
  • 1931 : prix Jules-Janssen ;
  • 1935 : médaille Franklin.
Albert Einstein et Mileva maric

Albert Einstein et Mileva maric

Publications

Articles scientifiques

  • Zur Elektrodynamik bewegter Körper, dans Annalen der Physik 17/1905, pages 891-921 ; traduit en français (Gauthier-Villars 1925, réédition Gabay 2005) « Sur l’électrodynamique des corps en mouvement ».
  • Über einen die Erzeugung und Verwandlung des Lichtes betreffenden heuristischen Gesichtspunkt, dans Annalen der Physik 17/1905, p. 132-148 ; trad. « Un point de vue heuristique concernant la conception et la transformation de la lumière ».
  • Ist die Trägheit eines Körpers von seinem Energieinhalt abhängig?, dans Annalen der Physik 18/1905, pages 639-641 ; traduit en français (Gauthier-Villars 1925) « L’inertie d’un corps dépend-elle de sa capacité d’énergie ? »
  • Zur Quantentheorie der Strahlung, dans Mitteilungen der Physikalischen Gesellschaft Zürich 18/1916 et Physikalische Zeitschrift 18/1917, p. 121 et ss. ; trad. « Sur la théorie quantique du rayonnement ».
  • Über Gravitationswellen, Comptes-rendus de l’Académie des sciences de Prusse (Berlin), 1918, 154 ; trad. « Des ondes gravitationnelles ».
  • (avec Boris Podolsky et Nathan Rosen) Can Quantum Mechanical Description of Physical Reality Be Considered Complete?, dans Physical Review, 15 mai 1935 ; trad. « La description de la réalité physique par la mécanique quantique peut-elle être considérée comme complète ? »
  • Par ailleurs, une sélection des œuvres d’Einstein, notamment ses articles scientifiques originaux, est disponible en traduction française commentée sous le titre Œuvres choisies aux éditions du Seuil/CNRS éditions, dans la collection Sources du savoir (6 volumes parus depuis 1989).
  • Albert Einstein, Françoise Balibar (éd.) et al. (trad. Marie Artaud), Albert Einstein, physique, philosophie, politique, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Sciences » (no 150), 2002 (ISBN 978-2-020-39658-5, notice BnF no FRBNF38897733). Livre de poche qui contient des « morceaux choisis » issus de la sélection précédente.

Autres ouvrages

  • Albert Einstein, La théorie de la relativité restreinte et générale (1916, édition française Gauthier-Villars 1956).
  • Albert Einstein, Sigmund Freud et Christophe David (présentation) (trad. Blaise Briod), Pourquoi la guerre [« Warum Krieg? »], Paris, Payot & Rivages, coll. « Petite bibliothèque » (no 488), 2005 (ISBN 978-2-743-61364-8, OCLC 67613759, notice BnF no FRBNF39922897).
  • Comment je vois le monde (1934, édition française Flammarion 1934, coll. « Bibliothèque de philosophie scientifique »), réédition Flammarion, 1989, collection Champs 183, (ISBN 978-2-08-081183-7). Essai politico-philosophique, où Einstein expose ses positions dans différents domaines : social, économique, politique, religieux, culturel et scientifique.
  • Albert Einstein et Léopold Infeld (trad. Maurice Solovine), L'évolution des idées en physique : des premiers concepts aux théories de la relativité et des quanta, Paris, Flammarion, coll. « Champs » (no 119), 1983 (1re éd. 1938), 284 p. (ISBN 978-2-080-81119-6 et 2-080-81119-3, OCLC 417584350). Au format poche, une histoire de la physique, de la mécanique de Newton jusqu’aux théories modernes (relativité, quanta), écrite en 1936 par Einstein et l’un de ses disciples à Princeton, pour financer le séjour de ce dernier.
  • Albert Einstein, Pourquoi le socialisme ?

Publié dans Scientifiques

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