Deng Xiaoping

Publié le par Mémoires de Guerre

Deng Xiaoping, né le 22 août 1904 à Guang'an et mort le 19 février 1997 à Pékin, est le Président de la Commission militaire centrale du Parti communiste chinois (PCC) de juin 1981 à novembre 1989 et officieusement le numéro un de la république populaire de Chine de décembre 1978 (date du IIIe plénum du XIe Comité central du PCC qui consacre la victoire de sa ligne) à juin 1989 (IVe plénum du XIIIe Congrès, qui consacre la victoire de Jiang Zemin comme secrétaire général du parti). Deng Xiaoping est généralement considéré comme étant à l’origine du développement économique de la Chine actuelle. Il est largement connu comme « l'architecte en chef de la réforme et ouverture ». Né dans une famille de fermiers à Guang'an dans le Sichuan, Deng étudie, adolescent en France dans les années 1920 où il est influencé par le marxisme. Il rejoint le Parti communiste chinois en 1923. Au cours des années 1930, il a participé à la « Longue Marche ». Après la fondation de la république populaire de Chine en 1949, Deng a travaillé au Tibet ainsi que dans le Sud-Ouest de la Chine pour consolider le contrôle communiste. Deng était l'un des dirigeants les plus importants de la Chine à l'époque de Mao Zedong. Il a joué un rôle important dans la « Campagne anti-droitiste » et la reconstruction économique après le « Grand Bond en avant ». Cependant, il a été purgé deux fois par Mao pendant la révolution culturelle.

Deng Xiaoping est devenu le leader de la Chine en décembre 1978. À la fin des années 1970, il a lancé le programme « Boluan Fanzheng » qui tentait de corriger les erreurs de la révolution culturelle. Il a lancé la réforme économique chinoise en 1978. Au début de 1979, Deng a commencé une guerre d'un mois avec le Vietnam. En août 1980, il démarre les réformes politiques de la Chine en fixant des limites de mandat pour les « hauts dirigeants » et en proposant une révision systématique de la Constitution chinoise (la Constitution de 1978) ; la nouvelle Constitution incarnait le constitutionnalisme à la chinoise et a été adoptée par l'Assemblée nationale populaire en décembre 1982. En 1989, Deng a joué un rôle controversé dans la répression des manifestations de la place Tian'anmen. En 1992, l'« inspection du sud de Deng Xiaoping » a repris le programme « réforme et ouverture ». Quoique retiré ensuite des affaires, il demeura un référent pour le régime jusqu'à son décès en février 1997, juste avant la rétrocession de Hong Kong à la Chine. Deng Xiaoping a été nommé « Personne de l'année » à deux reprises par Time Magazine en 1978 et 1985. Sa théorie du « socialisme aux caractéristiques chinoises » a été inscrite dans la Constitution chinoise en 1999. 

Deng Xiaoping

Carrière

La découverte de la politique

Fils d'un riche propriétaire fonciers du Sichuan, Deng Xiaoping part pour la France comme ouvrier-étudiant dans les années 1920. Il travaille dans les usines Schneider, au Creusot, puis chez Hutchinson, à Montargis. Là, il adhère à la branche européenne du Parti Communiste chinois et noue une amitié avec le jeune Zhou Enlai. Après un détour par Moscou, il rentre en Chine en 1926 et rejoint Mao Zedong, qui a fondé un république soviétique chinoise dans le Jiangxi. Lorsque Tchang Kaï-chek investit les bases du Jiangxi, Deng Xiaoping participe à la Longue Marche avec Mao. Dans la guerre civile qui suit, il s'affirme comme un stratège respecté. Nommé en 1945 au comité central du PCC, il en monte rapidement les échelons, après l'établissement du régime communiste en 1949. Gouverneur de sa province natale puis vice-premier ministre et ministre de l'économie, il représente une ligne plus pragmatique que celle du « Grand Timonier », marquée au sceau de l'utopie révolutionnaire.

Premiers succès

Secrétaire général du Parti entre 1956 et 1966, Deng Xiaoping s'impose progressivement comme le N°3 du régime, après Mao Zedong et Liu Shaoqi mais devant son ami et protecteur Zhou Enlai. En 1956, il supervise la campagne des « Cent Fleurs » contre les intellectuels : « Il faut déraciner les mauvaises herbes pour s'en servir comme engrais », affirme-t-il. Mais deux ans plus tard, en 1958, il se montre beaucoup plus critique à propos du « Grand Bond en avant », un désastre économique à l'origine de plus de trente millions de morts. Pragmatique, il lance en mars 1961 la plus célèbre de ses formules : « Peu importe que le chat soit noir ou blanc pourvu qu'il attrape les souris ! » Il se montre également favorable à la rupture idéologique avec Moscou. Dans son désir de remettre l'économie sur pied, il élabore en 1964 le programme des « Quatre Modernisations ». Mao, craignant d'être débordé, se tourne vers la gauche du parti communiste, représentée par sa femme Jiang Qing. En 1966, les jeunes gardes rouges se déchaînent contre les « révisionnistes » Liu Shaoqi et Deng Xiaoping dans le cadre de la « Révolution culturelle ».

De la disgrâce au triomphe

Deng Xiaoping figure parmi les premières victimes de cette nouvelle agitation. Il est évincé de la scène politique et, à 65 ans, doit se soumettre à une rééducation forcée. Son fils est quant à lui arrêté et torturé jusqu'à perdre l'usage de ses jambes. Mais le pays s'enfonce dans le chaos et Mao, désemparé, accepte en 1973 de le réhabiliter à la demande de Zhou Enlai. Il lui confie les postes de vice-premier ministre et chef d'état-major avec mission de rétablir l'ordre. L'ancien réprouvé apparaît désormais comme le dauphin du vieux chef ! Mais après la mort de Zhou Enlai et de Mao Zedong en 1976, Deng Xiaoping trouve face à lui la « Bande des Quatre » de Jiang Qing, autrement dit la faction gauchiste du parti. Il est brièvement démis de ses fonctions mais réhabilité dès l'année suivante, après l'éviction de la « Bande des Quatre ».

Les « années Deng »

Commencent en 1977 la « démaoïsation » et les « années Deng ». Celui que l'on surnomme désormais le « petit timonier », tant en raison de sa petite taille (1,50 m) que par référence à Mao, veut avant toute chose sortir la Chine populaire du marasme économique. Le défi est immense : avec un cinquième de la population mondiale, le pays ne pèse guère plus de 3% du PNB mondial... Dans un premier temps, Deng installe ses alliés au pouvoir, notamment Hu Yaobang et Zhao Ziang. Il les sacrifiera l'un après l'autre, en 1987 et 1989, pour se concilier le clan conservateur, nostalgique d'un communisme pur et dur. Fort de sa popularité, en qualité de vieux chef historique et d'opposant à Mao, Deng modernise le pays à marche forcée. Il allège la pression de l'État sur les entreprises et fait entrer la Chine au FMI et à la Banque Mondiale.

Fervent soutien de la propriété privée et de la libre entreprise, Deng Xiaoping crée quatre Zones Économiques Spéciales (Shenzhen, Zhuhai et Shantou dans le Guangdong et Xiamen dans le Fujian) afin de drainer des capitaux étrangers. Ces ZES ou zones franches sont à l'avant-garde du spectaculaire développement économique de la Chine. Le programme des « Quatre Modernisations » (industrie, agriculture, recherche, défense) ne prévoit toutefois pas de libéraliser le système politique. Seule concession à la liberté individuelle, certains sanctuaires chrétiens et bouddhistes sont à nouveau ouverts au culte. Le pouvoir s'immisce plus que jamais dans la vie des Chinois en imposant en 1979 l'enfant unique : toutes les familles de l'ethnie Han (les Chinois proprement dits) sont tenues de ne plus avoir qu'un enfant au maximum et toute une administration va se mettre pour traquer les contrevenants, contraignant des femmes à avorter, incarcérant des couples ou soumettant les récalcitrants à de très fortes amendes. Sont dispensées de cette limitation les minorités ethniques (y compris les Ouïghours, aujourd'hui persécutés).

Cette « politique de l'enfant unique » vise à réduire la croissance démographique dans un pays qui frise le milliard d'habitants en 1980 mais elle arrive mal à propos car, dans les faits, la fécondité chinoise a déjà amorcé une décrue spectaculaire comme dans la plupart des autres pays (Afrique exceptée), de 6 enfants par femme en 1970 à 2,5 en 1980. Pour des motifs anthropologiques qui échappent à la raison, elle va poursuivre sa décrue jusqu'à 1,5 enfants par femme en 2010. Craignant un vieillissement trop brutal de la population, le pouvoir va abroger cette politique en 2016 et, en 2021, autoriser les familles à avoir 3 enfants...  En attendant, Deng Xiaoping se résout à quitter la direction du Parti en 1987 mais continue d'oeuvrer dans l'ombre. Il est président de la commission des affaires militaires du PCC quand éclatent les troubles sociaux de mai-juin 1989, liés à l'absence d'évolution des libertés civiques, et approuve personnellement l'écrasement dans le sang des manifestations de la place Tienanmen.

En 1992, il se replace en revanche dans la dynamique de l'ouverture au capitalisme en lançant la doctrine de « l'économie socialiste de marché », contre l'opposition conservatrice au sein du Parti. Il installe à la présidence de la République Jiang Zemin et se retire progressivement des affaires politiques, avant de disparaître en 1997. Sous la présidence de l'américanophile Jiang Zemin, la Chine va poursuivre son expansion économique avec un taux de croissance de l'ordre de 10% par an, du jamais vu dans l'histoire de l'humanité, d'autant que cette croissance concerne plus d'un milliard d'hommes et se prolonge pendant trois décennies, jusqu'en 2012. Mais elle va aussi de pair avec une aggravation spectaculaire de la corruption et des inégalités sociales et géographiques. Pour y remédier,  le président Hu Jintao, successeur de Jiang Zemin en 2003, amorce une timide politique sociale et environnementale. Quoi qu'il en soit de ces faiblesses, l'entrée de la Chine à l'OMC (Organisation Mondiale du Commerce) en 2001, le succès des Jeux Olympiques de Pékin en 2008 et l'accession de la Chine populaire au deuxième rang des puissances économiques mondiales consacrent le triomphe posthume de Deng Xiaoping.

Mort de Deng Xiaoping

Deng Xiaoping s’éteint le 19 février 1997, à l’âge de 92 ans, des suites d’une infection aux poumons et de la maladie de Parkinson. Ses funérailles ont lieu le 24 février 1997. Un grand hommage lui est rendu. Même s’il n’est plus au pouvoir depuis des années, il reste considéré comme un des dirigeants de la république populaire de Chine. Le Gouvernement central le décrit comme un « grand marxiste, un grand révolutionnaire du Prolétariat, un homme d’État, militaire, diplomate ; un des plus grands dirigeants du Parti communiste chinois, de l’Armée de libération populaire et de la république populaire de Chine ; le grand architecte de l’ouverture et la construction moderne de la Chine, le fondateur de la théorie de Deng Xiaoping ». Les drapeaux restent en berne pendant plus d’une semaine. Deng est incinéré et ses cendres dispersées en mer, selon ses volontés. De nombreux dirigeants étrangers lui rendent hommage. Ainsi le président français Jacques Chirac écrit-il au président chinois Jiang Zemin : « Deng Xiaoping restera dans l’histoire comme le principal artisan des transformations que la Chine connaît depuis près de vingt ans, et dont j’ai pu mesurer l’ampleur lors de mes voyages en 1978 et en 1991 ». Kofi Annan appelle la communauté internationale à se souvenir de Deng comme le « principal architecte de la modernisation de la Chine et de son formidable développement économique ». 

John Major, alors Premier ministre de la Grande-Bretagne, souligne le rôle majeur qu’a tenu Deng Xiaoping lors du retour de Hong Kong à la république populaire de Chine. Le président de la république de Chine (Taïwan) présente ses condoléances. Le 14e Dalaï Lama exprime lui aussi ses regrets, déclarant qu’il « prie pour qu’il ait une bonne réincarnation et souhaite offrir ses condoléances aux membres de sa famille. Ayant rencontré Deng Xiaoping à plusieurs reprises, je le connaissais comme quelqu’un ayant une forte personnalité, qui finissait ce qu’il avait commencé. Je regrette donc que Deng Xiaoping n’ait pas réussi à régler le problème tibétain de son vivant. En tant que dirigeant du système totalitaire du Parti communiste, il a inévitablement commis des erreurs, parce que pris au piège du système qu’il incarnait ». Il faut en effet rappeler qu’en 1979, Deng Xiaoping a proposé qu’à l’exception de l’indépendance, les autres problèmes concernant le Tibet, puissent être tous résolus par la négociation, ce qui avait influencé le Dalaï Lama dans sa renonciation à l’indépendance du Tibet. En novembre 2008, les autorités chinoises ont affirmé que Deng Xiaoping n’avait pas prononcé cette phrase, bien que d’autres dirigeants chinois comme Li Peng aient tenu des propos similaires à ceux de Deng Xiaoping. 

Famille

Deng Pufang (né en 1944), premier fils de Deng Xiaoping, assurera à plusieurs reprises la présidence de la fédération chinoise des handicapés. Pendant la Révolution culturelle, à la suite d’un accident provoqué par les gardes rouges, Deng Pufang deviendra paraplégique. Deng Nan (née en 1945), sa seconde fille, a été ministre des Sciences et des technologies de la république populaire de Chine entre 1998 et 2004. En 2013, son petit-fils, Deng Zhuodi, né aux États-Unis et diplômé de l’université Duke en Caroline du Nord, est désigné, à l’âge de 28 ans, comme responsable dans un secteur rural de la province du Guangxi. Plusieurs membres de la famille Deng possèdent des intérêts à Hong Kong. 

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