Andreas-Salomé Lou

Publié le par Roger Cousin

Andreas-Salomé LouLou Andreas-Salomé, née Louise von Salomé (12 février 1861 à Saint-Pétersbourg - 5 février 1937 à Goettingue) était une femme de lettres allemande d'origine russe. Son père Gustav Salomé (1804-1879) était issu d'une famille de huguenots originaire d'Avignon qui avait quitté la France après la Révolution française pour aller s'établir dans les pays baltes. A l'âge de six ans, il fut envoyé à Saint-Pétersbourg pour y recevoir une éducation strictement militaire. Après s'être distingué par sa vaillance au cours de l'insurrection polonaise de 1831, il fut élevé à la noblesse héréditaire par le tsar Nicolas 1er.

Ayant obtenu le grade de général, il entra dans l'état-major d'Alexandre II, qui le nomma inspecteur des armées. En 1844, il épousa Louise Willm, née en 1823, « fille d'un opulent fabricant de sucre d'origine danoise et nord-allemande », qui lui donna six enfants : cinq garçons et, en 1861, une fille qu'ils prénommèrent Louise. La petite Louise grandit, « entourée d'uniformes d'officiers », pour une large part à l'écart de la société russe, dans la petite communauté d'émigrés germanophones, pour laquelle son père avait obtenu du Tsar l'autorisation de créer une Eglise réformée, devenue « une sorte de bastion de la foi pour les familles étrangères ». Parlant et écrivant essentiellement en allemand, mais connaissant évidemment le russe et le français (langue de la haute société) et fréquentant l'école privée anglaise, elle n'en avait pas moins « le sentiment d'être russe ». Elle lut très jeune Spinoza et Kant.

À vingt et un ans, elle fait la rencontre de Friedrich Nietzsche, trente-huit ans, qui, durant l’année 1882, vit sa seule véritable histoire d’amour dans une escapade à trois avec Paul Rée, un philosophe allemand qui demande Lou en mariage. L’amour des trois intellectuels reste cependant platonique. Elle a en commun avec Nietzsche d’avoir réfléchi à la mort de Dieu ; au décès de son père, une passion pour l’hindouisme et une santé faible qu’elle ne peut soigner qu’en Italie où elle fait de nombreux voyages… Lou et Nietzsche passèrent trois semaines d’errance à discuter de philosophie. Nietzsche voit en Lou une enfant remarquablement douée et en même temps insupportable. C'est finalement Elisabeth Nietzsche, la sœur du philosophe, qui écarte la jeune Russe, ce que son frère ne lui pardonnera jamais. Nietzsche sombre alors dans une profonde dépression et écrit Ainsi parlait Zarathoustra (Also sprach Zarathustra). En fait, la vie de "Lou Andreas-Salomé" reste celle d’une bohémienne intellectuelle pan-européenne qui voyage en permanence et correspond avec les plus grands penseurs de son temps.

Femme libre avant son temps, en 1897, à trente-six ans, elle rencontre Rainer Maria Rilke, qui a quatorze ans de moins qu'elle. Pour Rilke également, cette rencontre occupe une place déterminante dans sa vie. Elle part en voyage avec lui en Russie en 1900. Leur relation amoureuse dure trois ans puis se transforme en une amitié qui se prolongera jusqu'à la mort de Rilke, et dont témoigne leur correspondance. Il est probable, mais non certain, que Rilke ait été son premier amant. Ses rencontres avec des figures parmi les plus importantes de la culture germanique de son temps ont nui à la connaissance de son œuvre, d'une grande richesse, qui reste encore à étudier. Y voisinent les romans : Ruth (1895), Enfant des hommes (1899), Rodinka (1922) ; des essais sur Nietzsche, sur Léon Tolstoï, sur Rilke, sur la psychanalyse, sur le féminisme ; une autobiographie qu'elle a voulue posthume, Ma vie (1951), et une très importante correspondance.

Toutefois, parmi l'ensemble de ses rencontres, celle avec Sigmund Freud, en 1911, durant les années de naissance de la psychanalyse, demeure la plus marquante. Lou Andreas-Salomé devient l’amie de la fille chérie du psychanalyste, Anna Freud. Lou entretient une correspondance avec le médecin de Vienne et participe activement à l’établissement des principaux concepts du maître par un esprit critique. Elle s’oppose d'ailleurs à lui au sujet de la religion qui intéresse Freud à la fin de son œuvre. Elle meurt à soixante-seize ans dans une Allemagne dominée par l'idéologie nazie.


Publié dans Ecrivains

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