Fajon Etienne

Publié le par Mémoires de Guerre

Étienne Fajon, né le 11 septembre 1906 à Jonquières (Hérault) et mort le 4 décembre 1991 à Argenteuil (Val-d'Oise), est un instituteur et homme politique français. Membre du comité central et du bureau politique du Parti communiste français, il est directeur de l'Humanité de 1958 à 1974 et député de 1936 à 1940, de 1945 à 1958 et de 1962 à 1978. 

Fajon Etienne

Carrière

Jeunesse

Fils d'un petit viticulteur et d'une institutrice, Étienne Fajon sort major de sa promotion à l'école normale d'instituteurs de Montpellier et est nommé instituteur près de Jonquières en novembre 1925. Il adhère au Parti communiste français (PCF) au début de 1927. 

Député de la Seine de 1936 à 1940

En 1925, à sa sortie de l'Ecole normale départementale, Etienne Fajon fut nommé instituteur dans l'Hérault. En 1926, il adhéra au syndicat unitaire de l'enseignement, puis au parti communiste. Il devint un des animateurs de l'Union départementale des syndicats de la C.G.T.U. Arrêté en 1929 pour son action politique, il obtint un non-lieu, mais en 1930 il fut mis en disponibilité. En 1932, répondant à l'appel de Romain Rolland et d'Henri Barbusse, il prit une part active à la préparation du congrès d'Amsterdam pour la paix. Inculpé de « provocation à un crime contre la sûreté de l'Etat », il fut condamné à une peine légère, puis amnistié. Lors des élections générales de 1932 il se présenta comme candidat du parti communiste dans la deuxième circonscription d'Alès (Gard). Lors du premier tour, le 1er mai, il n'obtint que 3.388 voix sur 14.593 votants, et au second, le 8 mai, 2.229 voix sur 15.421 votants. A la fin de l'année 1932, il fut élu membre du Comité central du parti communiste et chargé de l'éducation des militants.

En 1936, candidat à la députation dans la 10e circonscription de Saint-Denis, il n'obtint, au premier tour de scrutin, le 26 avril, que 6.090 voix sur 19.331 votants, mais il l'emporta au second tour, le 3 mai, avec 9.629 voix sur 19.566 votants, avec une faible marge d'avance sur Grisoni (9.331 voix). Nommé membre de la commission du règlement, de la commission de la législation civile et criminelle et de la commission de l'enseignement et des beaux-arts, il déposa deux propositions de loi, l'une sur le rajustement des taux de compétence judiciaire (1938), l'autre sur la répression des agissements des intermédiaires qui utilisent frauduleusement les annonces de presse (1938). Il prit part à la discussion des projets de budget portant particulièrement son attention sur les problèmes concernant l'éducation nationale et le travail. En 1939, il fut mobilisé comme lieutenant d'artillerie. Le 11 janvier 1940, il demanda à la Chambre « de rejeter comme arbitraire et illégal le projet de loi prononçant la déchéance de certains élus ». Le 16 janvier 1940, il prit part à la discussion de ce projet et demanda « la libération de ses collègues et amis communistes ». Il déposa une demande d'interpellation sur « les mesures que le gouvernement compte prendre pour que les soldats français reçoivent une solde égale à celle des soldats anglais et que les allocations militaires versées aux familles des mobilisés soient égales à celles que reçoivent les familles des soldats anglais » (janvier 1940).

Il fut déchu de son mandat de député le 20 février 1940. Etienne Fajon qui avait été condamné en avril 1940 à cinq ans de prison pour reconstitution de ligue dissoute est transféré, fin mars 1941, à la prison de Maison Carrée à Alger. Libéré le 5 février 1943, il reprend ses responsabilités au sein du Parti communiste et est nommé à l'Assemblée consultative provisoire. De retour à Paris en septembre 1944, il retrouve sa femme qui a milité activement dans la Résistance et devient membre suppléant du bureau politique lors d'une réunion du comité central le 23 janvier 1945. Ces responsabilités ne l'empêchent pas d'être un membre actif de l'Assemblée consultative, qui participe à plusieurs débats, notamment sur la politique économique et l'effort de guerre. Aux élections du 21 octobre 1945 pour la première Assemblée nationale constituante, Etienne Fajon dirige la liste de son parti dans la cinquième circonscription de la Seine où il recueille 38,5 % des suffrages exprimés. Les deux listes concurrentes, MRP et socialiste, sont largement distancées avec respectivement 27,5 et 23 % des voix. Aussi la liste communiste obtient-elle quatre des huit sièges à pourvoir (deux vont au MRP et deux à la SFIO). Pendant le mandat de l'Assemblée constituante, Etienne Fajon est membre de la Commission de la Constitution, participe au débat sur ce sujet en 1946 et vote pour le texte qui sera rejeté par référendum le 5 mai 1946.

De nouveau candidat aux élections du 2 juin 1946 pour la seconde Assemblée nationale constituante, Etienne Fajon connaît une certaine érosion de son capital électoral (36,6 % des suffrages exprimés). Aussi les communistes perdent-ils un siège qui revient à Edmond Barrachin, candidat du Parti républicain de la liberté. Comme précédemment, les principales interventions du député de la Seine portent sur le second projet de Constitution. Le 20 août 1946, il est chargé par son parti d'en faire une critique en règle. D'après lui ce texte marque un retour à la Constitution de 1875 parce qu'il donne trop de pouvoirs au Conseil de la République et au Chef de l'Etat, ce qui risque d'entraîner des crises politiques graves. Néanmoins, le 28 septembre 1946, avec son groupe il vote la future Constitution de la IVe République. Lors des élections législatives du 10 novembre 1946, la liste conduite par Etienne Fajon réalise 39 % des suffrages exprimés et obtient cinq élus au lieu de trois, un siège supplémentaire ayant été attribué à la circonscription. 

Pendant cette législature, Etienne Fajon appartient à la Commission des affaires étrangères. Il ne dépose que deux textes : une proposition de résolution concernant l'Ecole Nationale Professionnelle de Saint-Ouen qui relève de sa circonscription et une proposition de loi sur l'assurance vieillesse des conjoints survivants de cadres. Ses interventions sont également peu nombreuses, en raison des responsabilités importantes dont Etienne Fajon est chargé au sein de son parti à cette époque. En effet, toujours responsable de la section d'éducation, Etienne Fajon devient membre titulaire du bureau politique en juillet 1947 et participe, avec Jacques Duclos, à la réunion fondatrice du Kominform à Slarska-Poreba. Au sein de cette nouvelle forme de l'Internationale communiste, il est chargé de diverses missions sensibles. Il dirige de fait l'Humanité à partir d'août 1948 (il succède officiellement à Marcel Cachin en 1958) et entre officieusement au secrétariat du PCF en 1950 (officiellement en 1954) ; il en est alors le numéro quatre et joue un rôle de procureur lors de l'éviction des dirigeants historiques André Marty, Charles Tillon et Auguste Lecoeur.

Les interventions parlementaires d'Etienne Fajon sont suscitées par le climat de guerre froide existant entre les élus communistes et les autres députés. Le 3 juin 1947, il intervient longuement à propos du projet de réquisition des gaziers et électriciens, signe supplémentaire de la dégradation du climat social depuis la grève chez Renault en mai. Il échange des propos très vifs avec le président du conseil, Paul Ramadier, qui dénonce pour sa part « le chef d'orchestre clandestin » (c'est-à-dire le Parti communiste) qui pousse les salariés à la grève pour rendre la tâche du Gouvernement plus difficile. Etienne Fajon participe également aux séances très agitées qui accompagnent les grandes grèves de novembre 1947 où les élus communistes pratiquent l'obstruction systématique pour bloquer les décisions gouvernementales. Sa dernière prestation à la tribune est suscitée par le projet de réouverture de la frontière espagnole. 

Le 27 février 1948, il reprend les thèses développées alors par le Kominform et voit dans le rapprochement avec le régime franquiste l'un des éléments de la stratégie de l'« impérialisme américain » en Méditerranée. C'est l'occasion pour lui de dénoncer l'« alignement » du Gouvernement français sur le camp occidental et la « trahison du combat antifasciste qui a fondé la nouvelle République ». Comme cette intervention survient peu après le coup de Prague, elle provoque de violentes prises à partie de l'orateur et plus généralement des députés communistes. Accaparé par ses fonctions de dirigeant, Etienne Fajon ne participe plus ensuite aux débats jusqu'à la fin de la législature.

Lors des élections législatives du 17 juin 1951, la liste communiste toujours conduite par Etienne Fajon arrive à nouveau en tête avec 35,3 % des suffrages exprimés, mais elle perd deux élus en raison du nouveau mode de répartition des restes applicable au département de la Seine alors que l'ancienne loi électorale lui aurait assurée quatre députés. Pendant cette législature, Etienne Fajon siège à la Commission de la presse, choix logique pour le dirigeant de l'organe du PCF. Il cosigne plusieurs propositions de résolution demandant diverses mesures sociales relatives, notamment, à la fixation du salaire minimum et au traitement de base des fonctionnaires (6 et 20 octobre 1953). Ses interventions publiques les plus importantes concernent la politique étrangère, en particulier le projet de création de la Communauté européenne de défense et la guerre d'Indochine

Le 11 février 1952, Etienne Fajon interpelle le Gouvernement à propos du plan Pleven et dénonce le réarmement allemand suscité par les Etats-Unis. Après les grèves du mois d'août 1953, des sanctions ont été prises contre certains fonctionnaires ou salariés. Etienne Fajon en profite pour attaquer la « politique sociale réactionnaire du Gouvernement ». Le 6 novembre suivant, il présente sa défense contre les demandes d'autorisation de poursuites qui le visent avec Jacques Duclos, François Billoux, Raymond Guyot et André Marty. Reprenant les thèses de son parti contre la guerre d'Indochine, il stigmatise l'atteinte à la liberté d'expression et le complot du Gouvernement qui veut étouffer la voix de ceux qui osent montrer les impasses de la politique officielle.

Aux élections du 2 janvier 1956, la liste du député sortant reste stable avec 35,8 % des suffrages exprimés et conserve ses trois élus. Pendant la dernière législature écourtée de la IVe République, Etienne Fajon appartient à la Commission de la reconstruction, des dommages de guerre et du logement. Ses interventions en séance, au nombre de cinq, sont consacrées à la critique de la politique algérienne des gouvernements successifs. Les deux principales se situent les 12 juin et 12 novembre 1957. Lors de la première séance citée, il expose les raisons du refus communiste de soutenir l'investiture du Gouvernement Bourgès-Maunoury. Rappelant les activités passées du président du conseil désigné (notamment son soutien à la Communauté européenne de défense et à l'expédition de Suez), Etienne Fajon voit dans le chef du Gouvernement un défenseur de la politique ultra en Algérie. Contre l'actuelle majorité, il préconise la constitution d'une nouvelle majorité de gauche avec les socialistes qui, selon lui, pourrait mener une politique de paix et de progrès social. Cinq mois plus tard, lors du débat sur la reconduction des pouvoirs spéciaux, Etienne Fajon reprend son argumentation contre la politique algérienne. 

Malgré les démentis des membres du Gouvernement, il dénonce l'usage de la torture en s'appuyant sur les témoignages des avocats des victimes et sur les cas de Djamila Bouhired et de Maurice Audin. Il critique aussi la répression qui touche les opposants à la guerre et les conditions de vie dont sont victimes les travailleurs algériens immigrés en France. Enfin il appelle à une solution négociée et à un dialogue avec le FLN. Avec son groupe il votre contre l'investiture du Général de Gaulle (1er juin 1958), puis refuse les pleins pouvoirs au Gouvernement et la révision constitutionnelle (2 juin). Sous la Ve République, après un échec aux élections de novembre 1958 dans la 39e circonscription de la Seine, Etienne Fajon devient député de cette circonscription aux élections de novembre 1962. Réélu dans la 1re circonscription de la Seine-Saint-Denis lors du découpage du département de la Seine en 1967, il conserve ce mandat lors des renouvellements de 1968 et de 1973.

Mandats

  • Député PCF de la Seine (1936-1940, 1945-1958 et 1962-1967)
  • Député PCF de la Seine-Saint-Denis (1967-1978) (Épinay-sur-Seine, Villetaneuse, Pierrefitte-sur-Seine, Saint-Ouen et L'Île-Saint-Denis)

Distinctions

  • Chevalier de la Légion d'honneur (26 avril 1983)
  • Ordre de l'Amitié des peuples. (10 avril 1985)

Publications

  • Les grands problèmes de la politique contemporaine, Bureau d'Éditions, 1938.
  • Le Communisme et l'homme, Éditions Liberté, 1943.
  • En feuilletant l'Humanité (1904-1964), Éditions de l'Humanité 1964.
  • L'Union est un combat, Éditions Sociales, 1975.
  • Ma vie s'appelle liberté, préface de Georges Marchais, Éditions Robert Laffont, 1976.
  • ABC des communistes, Éditions Sociales, 1979

Articles Sources

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