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Revue de presse de l'Histoire - La Seconde guerre mondiale le cinéma les acteurs et les actrices de l'époque - les périodes de conflits mondiales viètnamm corée indochine algérie, journalistes, et acteurs des médias

Spoliation des œuvres d'art durant la Seconde Guerre mondiale

La spoliation des œuvres d'art pendant la Seconde Guerre mondiale désigne la pratique par les vainqueurs au cours du second conflit mondial, de dépouiller un État ou une personne de son patrimoine artistique, par la violence, la fraude, la ruse, ou le dol. Violant l'article 56 de la Convention de la Haye de 1907, elle est initialement le fait des pays de l'Axe (principalement l'Allemagne nazie et le Japon) qui ont pillé systématiquement les territoires occupés, puis vers la fin du conflit, de l'Union soviétique, à son tour vainqueur, sur les territoires récupérés et occupés.

Le Maréchal Goering et Hitler

Le Maréchal Goering et Hitler

Historique

Japon

De 1942 à 1945, suite à l'invasion des Philippines, l'armée impériale japonaise et notamment le général Tomoyuki Yamashita y aurait créé des entrepôts secrets (dans des grottes, des tunnels et des complexes souterrains) dans lesquels elle stocke ses butins de guerre pris dans toute l'Asie du Sud-Est ou en Chine lors de la guerre sino-japonaise. Ce pillage aurait été organisé sur une grande échelle, par des gangsters yakuzas tels que Yoshio Kodama ou par des fonctionnaires, à la demande de l'empereur Hirohito qui a nommé son frère, le prince Chichibu, à la tête d'une organisation secrète appelée Kin no yuri (« Lys d'or ») chargée de gérer ce trésor, l'« or de Yamashita ».

Troisième Reich

Des services nazis de confiscation spécialement institués (telles les agences Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg), entreprennent, à partir de listes établies bien avant le déclenchement de la guerre, le pillage et la confiscation de collections publiques et privées dans tous les pays qu'ils occupent ainsi que la spoliation des Juifs qui commence en Allemagne dès 1933. Des petites équipes en France, en Belgique et aux Pays-Bas vident entièrement tous les appartements juifs (au total 70 000 logements dont 38 000 à Paris) dans le cadre de la Möbelaktion : leurs objets sans valeur sont brûlés, leurs livres servant à alimenter la bibliothèque de la Haute École de la NSDAP. Organisée par le théoricien nazi Alfred Rosenberg, cette spoliation concerne les juifs (la première collection visée en France est celle des Rotschild) mais aussi des musées et des collections privées dans tous les pays occupés. Les nazis justifient ce pilage par le Kunstschutz, principe de préservation du patrimoine artistique et le projet de musée allemand gigantesque, le Führermuseum. Certains États ou particuliers prennent des mesures pour évacuer leurs chefs-d'œuvre avant l'invasion des forces de l'Axe, tel le musée du Louvre.

Les nazis utilisent le musée du Jeu de Paume comme dépôt central avant d'orienter les œuvres vers différentes destinations en Allemagne. Une grande partie de ce butin de guerre est transférée à la fin de la guerre dans trois mines près de Salzburg, la plus connue étant la mine de sel d'Altaussee avec plus de 2 000 pièces. Rose Valland, attachée de conservation du musée du Jeu de Paume, dresse alors un inventaire précis des œuvres qui transitent par le musée et essaye de connaître leurs destinations (en tête de liste, Hitler et son musée Führermuseum ainsi que la collection personnelle d'Hermann Göring), les noms des personnes responsables des transferts, ainsi que le numéro des convois et des transporteurs. Le conservateur d'art George L. Stout persuade le commandement militaire allié de crér la Monuments, Fine Arts, and Archives program, organisme américain qui est fondé en 1943. Ses membres, les Monuments men, hommes ayant une formation de conservateur de musée, d'historien de l'art, d'architecte ou d'archiviste sont initialement chargés de préserver des combats les églises, musées et monuments nationaux au cours de la progression des Alliés puis, à la fin de la guerre de retrouver les biens pillés par les nazis et de les expertiser. La spoliation par le troisième Reich est évaluée à plus de cinq millions de tableaux et de sculptures.

Après guerre

La chute de Berlin se traduit également par le pillage systématique de l'Allemagne occupée et des anciens territoires orientaux du Reich allemand par les Soviétiques en guise d'indemnité de guerre. Les nombreuses destructions de patrimoine au cours de ce conflit sont à l'origine de la Convention pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé en 1954. Dès la fin de la guerre se pose le problème de la restitution des œuvres d'art pillées sous le troisième Reich qui s'inscrit notamment dans les politiques de réparation. Une Commission des restitutions au Congrès juif mondial est instituée à cet effet en 1947 tandis que la Jewish Claims Conference voit le jour en 1951. En Allemagne, cette question prend une ampleur particulière dans le cadre de la politique allemande de réparation des crimes du régime national-socialiste. Les procédures d'indemnisation y sont prévues par la loi fédérale BrüG entrée en vigueur le 19 juillet 1957.

En France, dès la Libération, les autorités françaises élaborent des textes affirmant la nullité des actes de spoliation intervenus pendant la période puis organisent les modalités pratiques des réparations et restitutions. Un organisme est créé à cet effet : la CRA (Commission de récupération artistique), instituée le 24 novembre 1944. Dotée de deux services spécialisés l’un pour les œuvres d’art et objets précieux, l’autre dirigée pour les livres et archives, elle est chargée de recevoir les doléances des familles spoliées et diligente des missions en Allemagne pour tenter de récupérer les biens. Elle dépend de l'OBIP (Office des Biens et Intérêts Privés, structure du ministère des Affaires étrangères fondée en 1919 et dont l'objet est de sauvegarder les biens des ressortissants français) qui est chargé, par l’ordonnance du 13 décembre 1944, de « recenser et restituer l’ensemble des biens spoliés en France par les occupants et transportés hors du territoire national ».

45 400 tableaux sont notamment identifiés et restitués via cette Commission. 13 000 œuvres dont les propriétaires ne sont pas identifiés sont vendues aux enchères par le Service des domaines (administrateur provisoire des actions et parts sociales appartenant à des Juifs en vertu de la loi du 22 juillet 1941) alors que les pièces de plus grande valeur (au total 2 058 œuvres en déshérence) sont inscrites sur des listes dites MNR (Musées nationaux de récupération) et, dans l'attente d'une réclamation, distribuées dans les musées de France. Il est cependant difficile de démêler l'écheveau après guerre car autant la spoliation est, selon le vocabulaire nazi, un « vol légal » documenté dans des fonds d’archives, autant le pillage et les exactions incontrôlées sont des pratiques qui ne laissent pas de traces archivistiques écrites. De plus, il est parfois difficile de distinguer le pillage de la confiscation ou de la spoliation obtenue sous pression fiscale et financière à des collectionneurs privés juifs en Allemagne (un collectionneur allemand peut à cette époque réaliser une acquisition de bonne foi auprès d'un juif en « faisant une bonne affaire », ce dernier voulant par exemple fuir rapidement) ou dans les zones occupées par les nazis. C'est ainsi que de nombreuses œuvres restent orphelines compte tenu de l'ampleur du pillage, de la dispersion des biens spoliés (dans des fondations, musées, bibliothèques ou collections), du manque d'archives, des spoliés juifs morts en déportation, des droits régissant les restitutions différents selon les pays et des efforts d'identification d'après-guerre insuffisants.

La thématique des restitutions remonte à la surface depuis les années 1970 et surtout depuis les années 1990 avec la réunification allemande, le développement des travaux historiques et universitaires sur ce domaine, mais aussi le dynamisme du marché de l'art (la création en 1991 du Art Loss Register est révélatrice à cet égard) et les médias qui se passionnent pour les découvertes de trésor et de butin cachés pendant des décennies. Différentes commissions nationales et internationales (telle la Commission Bergier en Suisse ou la Commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation en France) de restitution et d’indemnisation sont depuis cette époque mises en place et des dispositions sont prises pour mener des recherches de provenance qui se révèlent parfois complexes comme le montre l'affaire en 2012 du Trésor artistique de Munich. ​En octobre 2009, l'Unesco adopte une résolution prenant acte d'un projet de déclaration relatif aux objets culturels déplacés en relation avec la Seconde guerre mondiale. En 2011 est ouvert un portail Internet, géré par les archives nationales américaines, qui permet d'accéder aux archives nationales de plusieurs pays européens relatifs aux biens culturels (en) spoliés sous l'ère nazie.

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