Affaire Tiphaine Véron

Publié le par Mémoires de Guerre

Tiphaine Véron est une touriste française disparue au Japon le 29 juillet 2018. Alors âgée de 36 ans et partie seule en vacances au Japon, elle disparaît dans la ville de Nikkō, une cité touristique fréquentée dans la préfecture rurale de Tochigi, située à 150 kilomètres de Tokyo après avoir été vue pour la dernière fois dans son hôtel alors qu'elle prenait son petit-déjeuner. Son histoire illustre des différences d'approche dans la recherche de disparus au Japon et en Europe. 

Affaire Tiphaine Véron
Historique

Personnalité de la personne disparue

Tiphaine Véron naît en juillet 1982 à Rennes, elle habite Poitiers dès 1984. Passionnée d'art et de langues étrangères, elle obtient une licence en histoire de l'art et s'initie à la pratique du russe et du japonais. Alors qu'elle débute sa vie professionnelle et devient assistante scolaire pour enfants handicapés, elle développe divers problèmes de santé en raison d'une épilepsie réfractaire aux traitements habituels. Après quelques années, un traitement s'avère efficace et lui permet une vie normale.

Chronologie des évènements

Tiphaine Véron atterrit à l’aéroport international de Tokyo le 27 juillet 20182. Elle doit passer trois semaines de vacances dans le pays (jusqu'au 14 août), voyage minutieusement étudié et planifié comme en témoignent les notes manuscrites qu'elle a prises sur les sites à visiter. Elle passe une première nuit à Tokyo. Le lendemain, elle se rend à Nikkō en train et se rend à pied à son hôtel comme en témoignent plusieurs images de caméra de surveillance. Elle arrive vers 16h à l'hôtel Turtle Inn d'où elle envoie via WhatsApp une série de photos à sa famille. Le 29 juillet, confirmé par cinq témoins, elle prend son petit déjeuner à l'hôtel puis se dirige vers des points d'intérêts précédemment identifiés. Le propriétaire de l'hôtel n'ayant pas de nouvelle de sa cliente prévient la police le 30 juillet. 

Première enquête en 2018 et 2019

Le 1er août 2018, la famille est prévenue par l'ambassade de France au Japon. La sœur et les deux frères de Tiphaine se déplacent alors au Japon le 6 août et participent aux recherches avec les policiers nippons. Rapidement, Anne Désert, sa mère, adresse un courrier au président de la République, Emmanuel Macron, pour « réclamer plus de moyens de recherches ». Le 9 septembre, Sibylle Véron, sa sœur, lance un appel aux touristes à Nikkō pour savoir s’ils disposent de photos. Elle interpelle Emmanuel Macron dans la cour de l’Élysée le 17 octobre à l’occasion de la visite du Premier ministre japonais, Shinzo Abe. La mobilisation débute en France et près de 500 citoyens participent à une marche à Poitiers « pour retrouver Tiphaine » le 10 novembre 2018, débutant ainsi une campagne d'information. Du 7 au 17 mai 2019, une mission de recherches est organisée au Japon avec des spécialistes du secours en montagne, mais ne donne aucun résultat. Un autre séjour de la famille a lieu fin juillet 2019 pour organiser une manifestation à Nikkō, un an jour pour jour après sa disparition. Début août 2019, de nouvelles recherches sont menées autour de l’hôtel avec Damien Véron, cinq bénévoles et sept chiens de Japan Rescue Dog, mais sans donner de résultat. 

Position de la famille

Après d’importantes recherches menées au mois de mai 2019, la famille déclare ne pas croire à la thèse de l’accident et prépare de nouveaux déplacements pour poursuivre leur enquête. Elle doute également sur le fait que le dossier remis aux autorités françaises soit complet. Elle considère notamment que les auditions menées par les enquêteurs japonais sont incomplètes et extrêmement contradictoires autour du départ de l’hôtel de Tiphaine. La famille de Tiphaine a longuement travaillé sur les données du compte Google Maps de Tiphaine Véron. Les points GPS ont permis de suivre les déplacements dès son arrivée au Japon et jusqu'au dimanche 29, 11h40, où sa trace disparaît (fin de la connexion wifi). Les proches évoquent un « manque d’expérience » de la police japonaise dans la recherche des disparus. 

Statut de l'enquête japonaise et aspects culturels

Au Japon, la disparition inexpliquée d'une personne majeure, en l'absence d'une trace évidente d'origine criminelle, n'est pas considérée comme un élément suffisant dans la procédure pénale nippone. De surcroît, la loi japonaise rend difficile le traçage des données personnelles des individus. Chaque année, environ cent mille personnes disparaissent au Japon dont une grande proportion est composée de disparus volontaires. Communément dénommés « jōhatsu » (évaporés), ce phénomène s’est accentué ces dernières années, notamment en raison de la conjoncture économique, certains japonais préférant disparaître plutôt que de subir l'affront de l'endettement. Le sujet est souvent considéré comme tabou pour la population japonaise et les enquêtes de police sont souvent très succinctes comparées à ce qui peut être pratiqué en Europe. 

Mobilisations

Les proches de Tiphaine ont créé une association, « Unis pour Tiphaine ». Xavier Niel, fondateur de l'opérateur de téléphonie mobile Free, a répondu à une interpellation de la famille et a contribué au volet technique de l'enquête. Il permettra notamment d'établir que le portable de Tiphaine Véron n'a pas été éteint de manière habituelle mais a été coupé de façon violente (la batterie a été arrachée ou le téléphone brisé). En juillet 2020, pour commémorer les 2 ans de la disparition de Tiphaine Véron, un appel est lancé sur les réseaux sociaux par l'humoriste Élie Semoun. L'enquête bénéficie également du support local de Kazunari Watanabe, retraité japonais ayant multiplié ses visites à Nikkō (plus d'une quarantaine) afin d'assister la famille dans ses recherches. 

Reprise de l'enquête en 2020

En juillet 2020, le cabinet Dupond-Moretti est chargé de la reprise du dossier et dit être en train d'identifier le meilleur « levier » au Japon pour de prochaines actions. Une juge d'instruction a été nommée à Poitiers, l'enquête demeure ouverte en France pour « enlèvement et séquestration », thèse privilégiée par la famille, persuadée qu'il ne s'agit pas d'un accident. Fin 2020, la famille annonce qu'elle engage Jean-François Abgrall, un ancien gendarme et enquêteur privé notamment reconnu pour avoir été à l'origine de l'arrestation de Francis Heaulme, un tueur en série français. 

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