Réseau Alliance
Alliance est un réseau de renseignement de la résistance intérieure française pendant la Seconde Guerre mondiale. Fondé par Georges Loustaunau-Lacau, officier politiquement situé à l'extrême-droite, il est composé principalement d'officiers (en grande partie de l'Armée de l'air), mais également de cadres de l'administration, et recrute dans les milieux politiques de droite. Créé au sein du régime de Vichy, il se rattache en premier lieu à l'Intelligence Service, puis aux services giraudistes après le débarquement en Afrique du Nord. Il est finalement rattaché aux services du Comité français de libération nationale, lors de la fusion de l'ensemble des services de renseignements français libres. Son fondateur étant rapidement empêché d'exercer son commandement, c'est Marie-Madeleine Méric, alors son second, qui en prend la tête, de juillet 1941 jusqu'en juillet 1943, date à laquelle elle part pour Londres. Son adjoint, Léon Faye devient le chef opérationnel à partir de ce moment jusqu'à son arrestation en septembre 1943 ; leur successeur, Paul Bernard, est pris en mars 1944. Méric reprend la tête du réseau depuis Londres, répartissant l'opérationnel entre le nord (Jean Roger), le sud-ouest (Henri Battu) et le sud-est (Helen des Isnards) — et laissant à Georges Lamarque le commandement du sous-réseau Druides. Après juillet 1944, le réseau, à nouveau sous l'autorité globale de Méric revenue en France, travaille à la libération de la France au sein des forces alliées.
Réseau couvrant l'ensemble du territoire métropolitain français durant la quasi-totalité de la guerre, Alliance compte jusqu'à 1 000 membres permanents, revendiquant à la fin de la guerre plus de 2 400 recrutements, dont 431 personnes qui perdront la vie durant la guerre. C'est le plus grand réseau dépendant de l'Intelligence Service sur le territoire français ; c'est également le plus grand réseau commandé par une femme durant cette période, et plus du quart de ses membres sont également des femmes. Par leurs noms de code, inspirés pour la majeure partie de noms d'animaux, ses agents sont surnommés par les services allemands « l'Arche de Noé ». Les autorités allemandes d'occupation confient la lutte contre le réseau et ses agents aux services de contre-espionnage de l'Abwehr (Abwehr IIIF) de Lille — les premières arrestations de membres du réseau s'effectuant dans le Nord — puis de Dijon. Trois procès, se déroulant devant la Cour martiale du IIIe Reich, sont organisés pour juger les membres principaux du réseau qui ont été arrêtés ; tous sont condamnés à mort ou mourront en déportation. L'ordre de faire disparaître entièrement le réseau entraîne l'exécution des condamnés, ainsi que le massacre, dans les derniers mois de la guerre, de la quasi-totalité des prisonniers arrêtés ou condamnés en tant que membres de l'Alliance, dont une centaine au camp de concentration de Natzweiler-Struthof.
Le réseau dénombre au total 438 morts sur 1 000 arrestations. Chaque membre, pour préserver son identité, se vit désigner un matricule par l'IS. Puis, pour rendre plus pratique la communication entre les différentes parties, ils adoptèrent des surnoms ou pseudonymes. Les fondateurs du réseau Alliance et la plupart des autres membres choisirent de porter comme pseudonymes des noms d'animaux. C'est pourquoi la police allemande lui a attribué le nom original d'Arche de Noé. Toutefois, certains groupes à l'intérieur du réseau reçurent des pseudonymes de métier, ou de tribus indiennes...
Le réseau s'est d'abord implanté en zone sud, sous le nom de "Croisade", en novembre 1940 puis s'est étendu dans les zones occupées et interdites à partir de 1942. Alliance était un réseau dont le commandement était de forte culture militaire et de tendance droite nationaliste. Il a été fondé par le commandant Georges Loustaunau-Lacau, officier nationaliste et pétainiste. Pour des raisons politiques, financières et militaires, il préfère se rapprocher en 1941 de l'IS britannique plutôt que de la France libre. Alliance va recruter dans tous les milieux sociaux, mais notamment auprès de la droite militaire et nationaliste (dont les anciens de Corvignolles), les hauts fonctionnaires, les cadres, les professions libérales… La moitié des membres appartenait à la fonction publique, et plus du quart du réseau était composé de femmes.
Le réseau accueille les différentes vagues de déçus du pétainisme. Par exemple son sous-réseau Druides est constitué en 1943 par l’encadrement des Compagnons de France (organisation de jeunesse créée par l'État Français). Le S.R. Alliance se chargera du renseignement sur les sous-marins pour la bataille de l'Atlantique, du départ du général Giraud vers l'Algérie en novembre 1942 et devient l’un des éléments de la résistance giraudiste, toujours sous le commandement anglais.
Il transmet les informations sur les nouvelles armes mises au point par l'Allemagne, et arrive à communiquer à Londres les emplacements des bases de lancement. Mais en 1943, la pénétration d'un agent du poste Abwehr de Dijon provoque l'effondrement du réseau, alors que "Hérisson" est à Londres. Début 1944, il ne reste plus que 80 agents actifs. Le réseau ne rejoint le Bureau Central de Renseignements et d’Action de la France libre qu’au moment de la fusion entre les services d’Alger et ceux de Londres au printemps 1944.
Membres
- Commandant Georges Loustaunau-Lacau, dit "Navarre", héros de la première guerre mondiale, spécialiste du renseignement mais exclu de l’armée en 1938 pour y avoir créé le groupe anticommuniste Corvignolles. Sous le régime de Vichy en 1940, il est délégué national à la Légion française des combattants. Il sera déporté.
- Marie-Madeleine Fourcade, née Bridou, dite "Poz 55" puis "Hérisson" fut à la fois son égérie et à partir de Mai 1941 son chef durant 31 mois.
- Officier de marine Jean Boutron, dit "Aso 43" puis "Taureau", un des membres fondateurs, rescapé de Mers El Kébir
- Commandant d'aviation Léon Faye, dit "Aigle", un des chefs du réseau, fusillé à Sonnenburg.
- Paul Bernard, dit "Martinet", un des chefs du réseau.
- Capitaine Fourcaud
- Colonel Georges Groussard
- Edouard Kauffmann, dit "Criquet", lieutenant-colonel de l'Armée de l'Air
- Louis Jacquinot, avocat et futur homme politique de droite.
- Jean Roger, dit "Jean Sainteny", dit "Dragon", chef régional du réseau (Normandie), Compagnon de la Libération.
- Georges Lamarque, dit "Pétrel", chef des Druides, Compagnon de la Libération.
- André Girard, dit "Pointer", chef régional du réseau (Centre-Ouest).
- Léonce Vieljeux, colonel de réserve et maire de La Rochelle. Fusillé au Struthof en 1944.
- Jacques Stosskopf, ingénieur du génie maritime et directeur adjoint de la base de Lorient.
- Robert Bernadac, dit "Rouge-gorge", père de l'écrivain Christian Bernadac
- Ferdinand Rodriguez-Redington, dit "Pie", chef radio détaché auprès du réseau par le S.O.E.
- Monique Bontinck, dit "Hermine", aide de camp de Marie Madeleine Fourcade.
- Jean Philippe, commissaire de police de Toulouse, dit "Basset", chef du réseau sud-ouest. Arrêté par la Gestapo le 29 janvier 1943, il fut fusillé à Karlsruhe le 1er avril 1944.