Zone d'occupation italienne en France
Une « zone d’occupation italienne en France » lors de la Seconde Guerre mondiale (bataille de France) a été instituée par l’armistice du 24 juin 1940 signé entre les représentants de la France et de l’Italie. Ce nouvel armistice est signé peu après l’armistice du 22 juin 1940 entre la France et l’Allemagne.
L’armistice du 24 juin 1940 a été signé à la villa Incisa, à Olgiata près de Rome. Suite à la bataille des Alpes, la zone d'occupation italienne en France se résume à quelques zones frontalières attribuées aux Italiens. En effet, Hitler a rencontré Mussolini le 18 juin à Munich pour le convaincre de s'en tenir à ses vues : le Duce voulait s'emparer de la flotte et de l'aviation françaises, occuper la France jusqu'au Rhône, annexer Nice, la Savoie, la Corse, la Tunisie, la Côte française des Somalis, les villes d'Alger, d'Oran et de Casablanca, ce qui n'entrait pas dans les plans de Hitler qui considérait ces prétentions démesurées et de nature à compromettre la signature de l'armistice. Les Français émettent des protestations sur les conditions d'armistice concernant l'Italie, la France n'ayant pas été vaincue dans cette partie du conflit. Cette zone d'occupation est d’importance réduite : 800 km, 28 000 habitants. Quatre départements sont ainsi partiellement occupés : Alpes-Maritimes, Basses-Alpes (Alpes-de-Haute-Provence depuis 1970), Hautes-Alpes, Savoie. D’autres sources indiquent que la Haute-Savoie était aussi concernée. Cette zone occupée (Menton pour l'essentiel de la population) fut annexée de facto à l'Italie.
En outre, une zone démilitarisée était établie en territoire français sur une largeur de 50 km à vol d’oiseau à partir de la frontière ou de la zone d'occupation italienne en France le cas échéant. Cette démilitarisation annulait l'effort de fortification effectuée par la France sur sa frontière alpine qui remontait à la période de tension entre les deux pays (l'Italie, l'Allemagne et l’Autriche-Hongrie s'allièrent au sein de la Triplice ou Triple-Alliance en 1882) et avait été repris durant l'entre-deux-guerres pour constituer la « Ligne Maginot alpine ». Le département de la Corse (scindé en deux départements en 1976) ne fut ni occupé ni démilitarisé. L'Italie, bien que revendiquant l'ancien comté de Nice et la Savoie, dont elle n'est pas parvenue à s'emparer, doit donc se contenter en 1940 de quelques zones frontalières dont la ville de Menton constitue sa principale « prise ». Les occupants s'efforcent d'italianiser la ville. L'italien devient la langue officielle et obligatoire. L'enseignement est donné en italien. La signalisation des rues est en italien. De nouvelles bornes kilométriques indiquent la distance avec Rome.
Les habitants reçoivent une carte d'identité italienne et utilisent des timbres-poste italiens. Un nouveau journal, Il Nizzardo, est créé. La lire italienne est la monnaie légale. Les autres territoires revendiqués à la frontière entre la France et l'Italie ne sont occupés par l'armée italienne qu'ultérieurement, à partir du 11 novembre 1942, lors de l'invasion par les Allemands de la zone libre, antérieurement non occupée, en représailles au débarquement allié en Afrique du Nord. La ville de Nice par exemple est occupée par les Italiens dès le 11 novembre 1942. Une zone d’occupation italienne en France plus conséquente est alors établie, par voie d'accords entre l'Allemagne nazie et l’Italie fasciste. Les Italiens aspirent alors à étendre leur zone d’occupation à toute la rive gauche du Rhône et à la Corse. L’Italie renouait avec la politique de Charles-Emmanuel Ier de Savoie (1562-1630), qui avait tenté de s'emparer du Dauphiné et de la Provence à la faveur des guerres de religion.
« Le Rhône sert de frontière entre les deux pays de l'Axe. Le tracé commence au sud-ouest de Genève, suivant une voie ferrée de la frontière suisse jusqu’à Bellegarde-sur-Valserine, Châtillon-en-Michaille et Nantua (Ain), avant de rejoindre Maillat, Poncin (Ain), La Verpillière, Heyrieux Vienne (Isère) et Ambérieu (Rhône). La nouvelle limite épouse ensuite le cours du Rhône, jusqu'en amont d'Avignon où elle s’infléchit vers l’est jusqu'à la côte méditerranéenne au niveau de l'arsenal de Toulon, occupé conjointement. Bien que situées en partie ou en totalité à l'est du Rhône, Lyon, Avignon, Aix, Marseille, La Ciotat se trouvent en zone allemande. » Les Italiens débarquèrent en Corse qui fit désormais partie de la zone d'occupation italienne. Dans leur zone d’occupation, les autorités italiennes — grâce à l'action du banquier juif italien Angelo Donati, du capucin Père Marie-Benoît et du comité Dubouchage —, protégèrent les Juifs de la persécution des Allemands et des autorités de Vichy.
Des milliers de Juifs furent mis en « résidence forcée » dans la zone de Vence et de Saint-Martin-Vésubie. Ces centres de « résidence forcée » étaient en réalité destinés à protéger les Juifs, qui purent s’échapper vers l’Italie après l’armistice entre les Italiens et les Alliés le 3 septembre 1943. Le général Mario Vercellino, commandant en chef de l'armée d'occupation italienne, refusa de livrer les Juifs, pendant que l'évêque de Nice, Mgr Paul Rémond (reconnu Juste parmi les nations), avec le réseau Marcel, sauva des centaines de personnes. Pour sa part, le maréchal Ugo Cavallero, chef d'État-Major général des armées italiennes, manifesta, début novembre 1942, sa désapprobation concernant certains aspects de la politique allemande, notamment envers les Juifs. Il déclara aux Allemands : « Les violences contre les Juifs ne sont pas compatibles avec l'honneur de l'armée italienne. » D'autres raisons, moins idéalistes, sont toutefois évoquées par l'historien Davide Rodogno.
Le 8 septembre 1943 les territoires occupés par les Italiens sont contrôlés par les Allemands suite à la signature de l’armistice de Cassibile entre l'Italie et les Alliés. Les territoires annexés de facto par l'Italie (Menton...) reviennent de facto sous administration du régime de Vichy. Les troupes italiennes présentes sur le territoire français ne se considèrent plus comme des troupes d'occupation et regagnent progressivement l'Italie, alors que dans le Nord, se met en place une République sociale italienne (RSI) vassale de l'Allemagne. Les troupes qui restèrent malgré tout en Provence sont désarmées par les Allemands et envoyés dans des camps de prisonniers en Allemagne. La Corse est le premier département français libéré à la suite de combats contre les Allemands, qui durent du 8 septembre au 4 octobre 1943 et grâce au concours des Alliés (opération « Vésuve », ordonnée, depuis Alger, par le général Giraud), des résistants et d'une partie des troupes italiennes (qui perdent 600 hommes), ralliées aux Alliés. Le reste des territoires de l'ancienne zone d'occupation italienne sont libérés des Allemands en septembre 1944 par les troupes américaines et françaises qui débarquent ensuite en Provence à partir du 15 août 1944.