Un tribunal au garde-a-vous
Vient l'ultime formalité : la signification de l'arrêt au condamné. Elle a lieu dans la salle d'audience qui a été évacuée. Ni
le public ni les juges ne sont plus là. La garde assemblée présente les armes.
C'est le greffier qui donne, solennellement, lecture de l'arrêt : « Le lieutenant Mendès France est-il coupable de désertion à l'intérieur en temps de guerre ? « A la majorité de six voix contre
une, oui, l'accusé est coupable. » Mendès France l'interrompt : « Le tribunal a menti. » Le greffier,
décontenancé, s'est arrêté un moment.
Puis il enchaîne : « Sur la seconde question, à la majorité, il existe des circonstances atténuantes. « En conséquence, le tribunal condamne le lieutenant de réserve Mendès France Pierre, Isaac,
Isidore à la peine de six ans d'emprisonnement et à la perte du grade... » Le greffier arrive au bout de sa lecture.
A peine s'est-il arrêté que le condamné se tourne vers la garde. Les soldats sont blêmes. Mendès France
s'avance vers eux. Il leur dit : « On vient de condamner un innocent par haine politique. Ce n'est pas la justice de la France, c'est celle de Hitler. Ne désespérez pas de la France. » J.-D. B.
Auteur : Jean-Denis Bredin
Editeur : Fayard
Date de parution : 17/09/2002
EAN13 : 9782213608730