Konrad Hermann Joseph Adenauer, né le 5 janvier 1876 à Cologne et mort le 19 avril 1967 à Rhöndorf, est un homme d'État allemand. Maire de Cologne, opposant au nazisme après l'avènement du Troisième Reich, membre de l'Union chrétienne-démocrate, il est le premier chancelier fédéral de la République fédérale d’Allemagne, de 1949 à 1963. À la tête du gouvernement, il est l’auteur de son redressement et de son ancrage atlantiste et européen. Il est ainsi souvent considéré comme le « fondateur » de l'Allemagne contemporaine. Avec le général de Gaulle, il est l'un des promoteurs de la réconciliation franco-allemande. Il est également considéré comme l'un des pères fondateurs de la construction européenne. Surnommé Der Alte (« le vieil homme »), il est le plus vieux dirigeant exécutif d'une démocratie dans l'histoire, ayant quitté la chancellerie fédérale à 87 ans.
Konrad Adenauer naît le 5 janvier 1876 à Cologne, dans la province prussienne de Rhénanie, dans une famille de la bourgeoisie catholique2. Après des études de droit et d'économie, il choisit une carrière dans l'administration. Il rencontre sa future femme, Emma Weyer durant l'été 1901 dans un club de tennis, ils se marient le 26 janvier 1904 et le réseau politique de sa belle famille lui permet d'évoluer au sein de la municipalité de Cologne. Il a trois enfants avec elle, Konrad, né le 21 septembre 1906, Max né le 21 septembre 1910 et Maria, née le 7 octobre 1912. Emma Adenauer meurt le 6 octobre 1916 d'un empoisonnement aux champignons, à l'âge de 36 ans.
Il épouse en secondes noces Augusta « Gussie » Zinsser, le 26 septembre 1919 ; Gussie n'est connue qu'en 1958 du grand public quand le photographe allemand Heinrich Gergerusi publie avec son accord un portrait de l'épouse du chancelier fédéral. Il a cinq autres enfants avec elle, Ferdinand né en 1920 et mort peu après la naissance, Paul né en 1923, Charlotte, née en 1925, Elisabeth, née en 1928 et Georg, né en 1931. Augusta décède en 1948, soit d'une leucémie, soit des suites d'une tentative de suicide en 1944 lors de son arrestation par la Gestapo afin d'obtenir des renseignements sur les agissements de son mari.
En 1906 il adhère au parti du Centre (Zentrum) et devient conseiller municipal deux ans plus tard ; de 1917 à 1933 il est maire de la ville de Cologne et à partir de 1919, il prend position en faveur du mouvement partisan d'une autonomie de la Rhénanie vis-à-vis du Royaume de Prusse. Il est membre et président du Conseil d'État de Prusse de 1920 à 1933 où il joue un rôle important dans la tentative d'accroître l'autonomie de la Rhénanie après la fin de la Première Guerre mondiale. Toutefois, il ne se rallie pas au séparatisme rhénan (visant à une indépendance de la République rhénane) au début des années 1920.
Sous la République de Weimar de 1931 à 1933, il est vice-président de la Société coloniale allemande (Deutsche Kolonialgesellschaft) pour la défense de la pensée coloniale. En 1933, démis par Hermann Göring de toutes ses fonctions en raison de son hostilité affichée au nazisme (il refusait par exemple d'arborer le drapeau nazi à côté du drapeau allemand), il est emprisonné brièvement après la nuit des Longs Couteaux, en 1934, puis entre juillet et novembre 1944 après l'attentat contre Hitler du 20 juillet 1944.
Après la Seconde Guerre mondiale, l'administration militaire américaine lui confie à nouveau le poste de maire de Cologne, mais les Britanniques le congédient peu après, ne le considérant pas à la hauteur. Il est très actif dans le parti de l'Union chrétienne-démocrate d'Allemagne nouvellement créé et en devient vite le chef : en 1946, il est élu président de la CDU dans la zone britannique, et de 1950 à 1966 pour la République fédérale allemande. Le 1er septembre 1948, le Conseil parlementaire chargé de la rédaction d'une constitution le choisit pour président. Avec une voix d'avance, il est élu chancelier le 15 septembre 1949, poste qu'il occupe jusqu'en 1963. Par trois fois, en 1953, 1957 et 1961 il remporte les élections législatives avec la CDU/CSU, toujours avec une avance notable sur le Parti social-démocrate. En 1957, il obtient même la majorité absolue.
Il a marqué la politique de son époque au point que l'on parle d'une « ère Adenauer » (liée aussi à sa longévité au pouvoir). Son action porte essentiellement sur la restauration de la souveraineté allemande et le rétablissement de la confiance des Alliés envers leur ancien ennemi qui passait par l'intégration de la RFA dans le bloc de l'Ouest. Ce dernier point entraîne un vif combat avec l'opposition. Si cette politique aggrave en effet le fossé séparant les deux Allemagnes, Adenauer la considérait comme nécessaire : seule une Allemagne forte face à l'Union soviétique pouvait mener à une réunification. L'Allemagne de l'Ouest (RFA) est membre-fondateur de la CECA en 1951, puis de la CEE en 1957 lors de la signature du traité de Rome. Elle entre au Conseil de l'Europe en 1951 et à l'OTAN en 1955.
Après sa nomination comme premier chancelier fédéral, Konrad Adenauer fit pression pour que Bonn devienne la capitale « provisoire » de la nouvelle République fédérale d'Allemagne. Dès 1949, Adenauer sent l'Allemagne de l'Ouest prête à une coopération dans le domaine de la défense dans un cadre européen. Cette coopération démarre lors de la guerre de Corée et des discussions internationales qu'elle entraîne (CED en 1952, avant d'être abandonnée en 1954). Il demande en échange la souveraineté de la RFA (accords de Paris). Adenauer est l'objet d'un attentat manqué le 27 mars 1952, organisé par des anciens membres de l'Irgoun opposés au rapprochement entre le nouvel État d'Israël et la République fédérale d'Allemagne.
Diplomatiquement, Adenauer crée des liens avec l'État d'Israël et se réconcilie avec la France. Le traité de l'Élysée, signé le 22 janvier 1963, annonce une coopération avec la France dans tous les domaines. Lors de sa visite à Moscou en 1955, Adenauer obtient la libération des 10 000 prisonniers de guerre allemands restants et accepte les liens diplomatiques proposés par l'URSS. En 1958, il participe avec le maire de Berlin-Ouest, Willy Brandt, aux protestations contre « l'ultimatum de Khrouchtchev » qui marque le début de la crise de Berlin. Pourtant, il ne peut que subir l'édification du mur de Berlin en 1961.
Lorsqu'elle voit le jour en 1949, la République fédérale d'Allemagne est un État sans armée. La guerre est à peine terminée et nombre de politiciens et de militaires sont réticents à remettre un uniforme aux Allemands. Cette réticence est perceptible en RFA même, et parmi les partis chrétiens-démocrates et socialistes de la majorité. Les plans de réarmement de Konrad Adenauer ne font donc pas l'unanimité. Pour le chancelier, la volonté de son pays de se défendre aux côtés d'autres nations occidentales contre une attaque venue de l'Est n'est rien de plus que l'expression du droit d'exister de la République, qui avait pour voisins directs deux États satellites du bloc soviétique : la Tchécoslovaquie et la République démocratique allemande. Avec ses 50 millions d'habitants, soit près du triple de la RDA, la RFA figure en outre à la première place du classement démographique européen. L'idée du réarmement connaît de nombreuses étapes, dont la rédaction en 1950 du document fondateur de la future armée fédérale, le Mémorandum Himmerod, fruit du travail d'anciens officiers de la Wehrmacht réunis à l'initiative du chancelier.
Il faut attendre que le Parlement français rejette le plan Pleven en août 1954, pour qu'Adenauer et ses collaborateurs disposent de la liberté de manœuvre nécessaire. Le 5 mai 1955, la RFA adhère officiellement à l'OTAN et en novembre de la même année, la Bundeswehr est constituée. Au début, elle ne compte que des volontaires, parmi lesquels de nombreux vétérans de la Wehrmacht, enrôlés dans la BGS et qu'une promotion et un salaire à l'avenant ont achevé de convaincre. Bien que les candidats aient subi un examen approfondi sur leur attitude pendant la guerre et de leur attachement à la démocratie, on reproche à Adenauer d'avoir mis des fidèles du régime nazi à la tête des forces armées ouest-allemandes. Le chancelier répond aux critiques que l'OTAN n'a pas demandé des généraux de dix-huit ans. C'est ainsi que la Bundeswehr devient, en termes numériques, la composante la plus importante des forces armées de l'OTAN en Europe. Ainsi, 500 000 soldats allemands, soit 46 % des effectifs totaux, sont déployés devant le rideau de fer, davantage que les États-Unis et le Royaume-Uni réunis.
Au milieu de son quatrième mandat, le 15 octobre 1963, Konrad Adenauer, âgé de 87 ans, démissionne sous une forte pression de son propre camp. Son ministre de l'Économie, Ludwig Erhard, père de l'économie sociale de marché, est choisi par le Bundestag pour lui succéder. Konrad Adenauer meurt le 19 avril 1967 à Rhöndorf. Une cérémonie funèbre a lieu à la Cathédrale de Cologne en présence de Charles de Gaulle, Lyndon B. Johnson et Heinrich Lübke.