Deprat Jacques
Jacques Deprat est un géologue et écrivain français né à Fontenay-aux-Roses le 31 juillet 1880 et mort le 7 mars 1935. Accusé de forfaiture en 1917 et exclu de la
communauté scientifique, il est le seul exemple connu de radiation puis de réhabilitation (posthume) dans l'histoire de la géologie française. Membre de la Société géologique de France en 1899,
dès l'âge de 19 ans, il fait des études secondaires en géologie à Besançon, puis à Paris où il s'inscrit à la Sorbonne pour préparer une thèse sur la géologie de l'île d'Eubée sous la direction
du géologue Alfred Lacroix, au Muséum national d'histoire naturelle. Il obtient son doctorat en 1904. Le géologue Pierre Termier lui propose le poste de Chef du Service Géologique de l'Indochine
(SGI), basé à Hanoï où il s'installe en famille en 1909. Il collabore avec l'Ingénieur du Corps des Mines Honoré Lantenois et profite de ses nombreuses missions dans le Tonkin, le Yunnan et le
Laos pour constituer une œuvre scientifique remarquée.
À l'été 1913, il est nommé vice-président pour l'Indochine du Congrès mondial de la géologie organisé à Toronto. Les compte-rendus de ses synthèses géologiques qui parviennent à l'Académie des
sciences lui valent rapidement les honneurs. Il reçoit un prix de la Société géologique de France (SGF) en 1914 et le prix Tchihatchef de l'Académie des Sciences qu'il partage avec le
paléontologue du SGI, Henri Mansuy. En 1917, il est soupçonné de fraude par son supérieur hiérarchique Honoré Lantenois et son collègue Henri Mansuy qui lui reprochent d'avoir introduit des
fossiles apocryphes dans ses collections et d'en avoir fait un usage "considérable" dans ses publications scientifiques. Il refuse de se soumettre à une procédure de vérification, et tombe sous
le coup d'une procédure administrative le 7 octobre 1917. Il est suspendu de ses fonctions par le Gouverneur Général d'Indochine pour refus d'obéissance. Une enquête administrative est menée
durant l'année 1918 au cours de laquelle il dénonce un complot et au terme de laquelle le rapporteur (Habert) recommande le recours à un comité de savants parisiens. La décision est acceptée par
les parties.
Un ensemble d'auditions sont menées en mai 1919 à l'issue desquelles le Comité de Savants présidé par Emmanuel de Margerie conclut à l'unanimité à sa culpabilité. Le 26 octobre 1919, l'affaire
rebondit en tombant dans le cadre de la loi d'amnistie. Jacques Deprat et Honoré Lantenois s'obstinent dans une lutte interpersonnelle. Le 4 novembre 1919, il est exclu de la Société géologique
de France au motif d'indignité, ce qui met un terme à sa carrière scientifique. Début 1919, il quitte l'Indochine et rentre en France où il se fixe avec sa famille à Moulins. Réduit au chômage,
il entreprend au cours des années 1920 une nouvelle carrière d'écrivain. Il publie en 1926 un roman auto-biographique à clefs (Les Chiens aboient) où il transpose son drame de géologue. Il
poursuit ensuite une carrière littéraire à succès, en remportant notamment le Grand Prix des Français d'Asie avec son roman La Paroi de Glace (1927), face à La Voie Royale d'André Malraux.
Adepte de ski, alpiniste chevronné, il trouve la mort lors d'une ascension du Lezat (Pyrénées) le 7 mars 1935, dans des circonstances curieusement proches de celles qu'il décrit dans l'un de ses
romans. Au terme d'un long cheminement, « l'affaire Deprat » fait l'objet d'un mémoire écrit par l'ancien Président de la SGF, Michel Durand Delga. À la lumière des avancées géologiques et
tectoniques du XXe siècle, la suspicion de fraude perd de plus en plus de sa consistance. Le 10 juin 1991, la Société Géologique de France décide de réintégrer officiellement Jacques Deprat comme
membre de la SGF à titre posthume. En 1999, l'écrivain anglais Roger Osborne fait de The Deprat Affair un roman à succès.