Otero Caroline
Agustina Otero Iglesias, dite Caroline Otero, dite La Belle Otero, née à Pontevedra en Galice (Espagne) le 4 novembre 1868 et morte à Nice (Alpes-Maritimes) le 10 avril
1965, est une chanteuse et danseuse de cabaret et grande courtisane de la Belle Époque. Née dans une famille misérable d'un petit village de Galice (et non en Andalousie comme elle le raconte
dans ses Mémoires), Ponte Valga, où sa mère (Carmen Otero Iglesias) se retrouve célibataire et avec de nombreux enfants, elle se rend compte que sa mère se prostitue pour pouvoir subvenir aux
besoins de la famille.
Caroline Otero est, selon ses biographes, violée à onze ans sur la route par un cordonnier qui lui avait donné des chaussures. Dès lors, elle voue une haine envers la gent masculine, comme elle
le raconte dans ses Mémoires. Elle est chassée de la maison familiale par sa mère alors qu'elle n'a encore que douze ans. Elle débute dans les cabarets de Barcelone, puis se rend à Paris où elle
se produit au Grand Véfour et au Cirque d'été. Un avortement forcé la rend stérile alors qu'elle est prostituée de force par son mari.
En 1890, elle fait une tournée triomphale aux États-Unis. Revenue à Paris en 1892 et désormais lancée, elle se fait une spécialité des rôles de belle étrangère aux Folies Bergère et au théâtre
des Mathurins. Elle porte des tenues de scènes somptueuses, où des joyaux authentiques mettent en valeur ses seins, dont la renommée est telle que l'on murmure que les coupoles de l'Hôtel Carlton
à Cannes auraient été inspirées de leur moulage. Elle fait plusieurs tournées en Europe, en Amérique et en Russie. En août 1898, Otero devient « la première star de l'histoire du cinéma » lorsque
l'opérateur Félix Mesguich filme un numéro de danse au moyen d'un cinématographe Lumière à Saint-Pétersbourg. La projection qui a lieu le lendemain au music-hall Aquarium suscite des réactions si
violentes que Mesguich est expulsé de Russie.
Elle devient l'amie de Colette, et l'une des courtisanes les plus en vue de la Belle Époque, avec la Carmencita, Espagnole comme elle, Liane de Pougy, Cléo de Mérode et Émilienne d'Alençon. Elle
entretient avec Liane de Pougy une rivalité tapageuse : « On se rappelle l'idée qu'elle eut, écrit André de Fouquières, pour éclipser une rivale, d'apparaître un soir au théâtre dans un boléro
constellé de diamants. Mais la femme qu'elle jalousait était Liane de Pougy. Avertie de l'exhibition qui se préparait, elle arriva, les bras, le cou, les épaules et les mains absolument nus.
Quand elle fut dans sa loge, qui faisait face à celle de Caroline Otero, on put voir qu'elle était suivie de sa femme de chambre portant tous ses bijoux. » Elle séduit des rois — Édouard
VII du Royaume-Uni, Léopold II de Belgique —, des aristocrates russes et britanniques — le duc de Westminster, le grand-duc Nicolas de Russie —, des financiers, des écrivains tels que Gabriele
D'Annunzio et des ministres tel qu’Aristide Briand, qui reste longtemps son amant et le seul homme auquel elle s'est attachée. Elle fait tourner bien des têtes et serait à l'origine de plusieurs
duels et de six suicides, d'où son surnom de la « sirène des suicides ».
Pendant la Première Guerre mondiale, elle se produit pour soutenir le moral des soldats français. Puis, en 1915, encore belle et au sommet de sa gloire, mais étant conscience aussi qu'elle prend
de l'embonpoint et que son nouveau répertoire au théâtre — pièces plus classiques — risque de déplaire, elle prend sa retraite et s'installe à Nice. Elle y elle achète un manoir de quinze
millions de dollars courants, mais elle termine dans un petit hôtel près de la gare où elle a du mal à payer sa logeuse. Elle a en effet accumulé une fortune de 25 millions de dollars courants,
mais elle s'est par la suite ruinée dans les casinos. Apprenant ses difficultés financières, le directeur du casino de Monte-Carlo (société des bains de mer de Monaco) décide par la suite de
payer son loyer ainsi que de lui verser une pension jusqu’à sa mort. Elle se suicide au gaz à l'âge de 96 ans, oubliée et pauvre dans un studio de Nice.
Caroline Otero a fait l'objet du film La Belle Otero, réalisé par Richard Pottier en 1954. À Paris, elle résida à l'angle de l'avenue Pierre-Ier-de-Serbie et de la rue Georges-Bizet (16e
arrondissement), puis dans un hôtel particulier au 27 rue Fortuny (17e arrondissement). De 1903 à 1911, elle eut une maison à Andrésy (Yvelines) au 70 Grande Rue (actuellement rue du Général
Leclerc). Après 1915, elle habita à Nice, 26 rue d'Angleterre, dans un hôtel meublé, où elle reçut Félix Bonafé qui rapporte leur entrevue.