Boulanger Georges

Publié le par Mémoires de Guerre

Georges Ernest Jean-Marie Boulanger, né le 29 avril 1837 à la Calliorne à Rennes en France et mort le 30 septembre 1891 à Ixelles en Belgique, est un officier général et homme politique français. Ministre de la Guerre en 1886, il est notamment connu pour avoir ébranlé la Troisième République, porté par un mouvement nommé « boulangisme ». Il est le beau-père du colonel Émile Driant. 

Boulanger Georges
Boulanger Georges
Boulanger Georges

Carrière militaire

Fils d’Ernest Jean Rosalie Boulanger (16 juillet 1805, Rennes - 9 mai 1884, Paris), un bourgeois breton (avoué à Bourg-des-Comptes) et de Mary Ann Webb-Griffith, une noble galloise, il est élevé en Bretagne et fait ses humanités au lycée de Nantes où Clemenceau est son condisciple, entre 1848 et 1853. Après avoir fait ses études à Saint-Cyr, d'où il sort en 1856, promotion Crimée-Sébastopol, il participe aux campagnes de Kabylie comme lieutenant de turcos. En 1859 il participe à la campagne d'Italie. Une grave blessure à la poitrine à Robecchetto con Induno lui vaut la Légion d'honneur. En 1861, il participe à la campagne de Cochinchine contre Tự Đức. Il est à nouveau blessé à Traï-Dan d'un coup de lance empoisonnée à la cuisse. De retour en France en 1864, il épouse une cousine, Lucie Renouard (nièce du pair de France et sénateur Charles Renouard, petite-fille du bibliophile Antoine-Augustin Renouard) et cousine de Gabriel Richet le 22 février 1865. Il s'agit d'un mariage plus par intérêt que par amour. Ce n'est pas un mariage heureux, Lucie, grande fille dévote devenant au fil des années de plus en plus austère et Georges enchaînant les infidélités avec des maîtresses plus ou moins reluisantes (comme Berthe de Courrière). De leur union, naissent deux filles, Hélène Marie et Marcelle.

En 1866, il devient capitaine-instructeur à l'École spéciale militaire de Saint-Cyr. La guerre de 1870 le voit promu chef de bataillon, et il s’installe au château d'Issy. Il est blessé pour la troisième fois d'une balle dans l'épaule à la bataille de Champigny lors de la défense de Paris le 2 décembre 1870. Promu au grade de colonel, il reçoit le commandement du 114e régiment d'infanterie de ligne à la tête duquel il participe à la répression de la Commune de Paris, en particulier durant la Semaine sanglante. Le 24 mai, il est blessé lors de la prise du Panthéon. Cité dans le rapport du maréchal Mac Mahon, il est promu commandeur de la Légion d'honneur le 24 juin 1871. Mais son avancement est jugé trop rapide par les autorités militaires. La commission de révision des grades le rétrograde comme lieutenant-colonel puis le nomme au 109e à la date du 9 décembre 1871, et sa démission lui est refusée. Il est nommé plus tard commandant en second du 133e régiment d'infanterie de ligne. En 1874, il en devient commandant et retrouve son grade de colonel, avec pour supérieur le duc d'Aumale — un fils de Louis-Philippe — à qui il doit d'être nommé général de brigade le 29 avril 1880, ce qui fait de lui le plus jeune général de l'armée française.

Il est promu à la tête de la 14e brigade de cavalerie. En 1881, il représente la France lors des fêtes du centenaire de l'indépendance américaine à Yorktown (Virginie), où il retrouve le comte Dillon et crée un incident en demandant que l'on retire le pavillon allemand qui flottait aux côtés des couleurs franco-américaines, en célébration de l'aide de La Fayette et de Friedrich Wilhelm von Steuben au peuple américain. Le général estimait en effet que la France avait agi en tant que pays mais que Friedrich Wilhelm von Steuben n'était là qu'à titre privé. C'est la France qui sélectionna et expédia à ses frais le baron aux révoltés américains sur un navire de Beaumarchais. En 1882, le ministre de la Guerre, le général Billot le nomme directeur de l'Infanterie. C'est alors qu'il établit des réformes qui le rendent populaire. Deux ans plus tard, il devient général de division et commande le corps d'occupation de Tunisie. 

Ministre de la Guerre

Il est familier de Georges Clemenceau — l'un de ses condisciples du lycée de Nantes — qui l'impose à Freycinet comme ministre de la Guerre dans le cabinet formé le 7 janvier 1886. Un de ses premiers actes à cette fonction est de faire accélérer l'adoption et la mise en fabrication du fusil Mle 1886 dit fusil Lebel. L'arme utilisait pour la première fois la poudre sans fumée et avait des performances balistiques sans égales pour l'époque. Ses réformes — dont l'autorisation du port de la barbe — le rendent populaire chez les militaires. Il parvient à régler la crise des mines de Decazeville sans faire tirer les soldats ce qui le rend populaire à gauche (par exemple Henri Rochefort). Cette réputation de général républicain est confirmée après la loi du 22 juin 1886 qui interdisait le séjour sur le territoire national « aux chefs des familles ayant régné sur la France et leurs héritiers directs » et prévoyait aussi leur exclusion de l'armée. Boulanger fait signer à Jules Grévy et notifier aux membres de la maison d'Orléans leur radiation des cadres de réserve, en particulier au duc d'Aumale (qui avait pourtant protégé sa carrière). Le duc ayant protesté par écrit contre cette mesure, fut expulsé en Belgique par le directeur de la Sûreté le 14 juillet.

La popularité de Boulanger ne cesse de croître et lui permet de devenir le point central de la revue du 14 juillet 1886 — qui célébrait aussi le retour de l'expédition du Tonkin. Sa prestance y fait impression. Il est célébré par la chanson de Paulus, En revenant de la revue. Il ne tarde pas à parcourir la France pour des inaugurations, des discours, etc. Le 17 septembre, à Libourne, il se distingue par un discours belliqueux — « Nous pouvons enfin renoncer à la triste politique défensive ; la France doit désormais suivre hautement la politique offensive ». Il ne tarde pas à représenter l'image du « Général Revanche » qui séduit les nationalistes. Après un meeting organisé par Déroulède et la Ligue des patriotes au Cirque d'hiver à Paris, le refrain « C'est boulange, boulange, boulange, c'est Boulanger qu'il nous faut » est crié par 10 000 personnes sur les boulevards. L'amendement d'un député sur la suppression des sous-préfets fait tomber le gouvernement le 3 décembre. Mais René Goblet, qui succède à Freycinet, est obligé de reprendre Boulanger dans une configuration plus à droite, puisque les radicaux abandonnent le gouvernement auquel les conservateurs apportent leur soutien.

Le ministre Boulanger semble dès lors cumuler les provocations envers l'Allemagne (érection de baraquement dans la région de Belfort, interdiction d'exporter des chevaux, interdiction de la représentation de Lohengrin, etc.) qui amènent l'Allemagne à convoquer plus de 70 000 réservistes au mois de février. Enfin, le 20 avril 1887, survient l'affaire Schnaebelé. Seules des difficultés au sein de chacun des gouvernements permettent d'éviter la guerre. Désormais Boulanger, qui a organisé un réseau d'informateurs en Allemagne sans vraiment avertir la Présidence, semble dangereux pour le gouvernement. Le 17 mai 1887, le gouvernement Goblet chute. Le 31 mai est formé un nouveau cabinet, mené par Maurice Rouvier, qui ne comprend pas Boulanger — le général Ferron reçoit le ministère de la Guerre. Cette éviction choque les nationalistes. C'est alors que naît le mouvement boulangiste. 

Chef du mouvement boulangiste

Sans poser sa candidature — mais à l'appel de Rochefort — 100 000 bulletins portent le nom de Boulanger lors d'une élection partielle de la Seine. La présence du général ne cessant d'aller croissant, le gouvernement le « limoge » en le nommant commandant du 13e corps d'armée à Clermont-Ferrand. Son départ le 8 juillet donne lieu à une manifestation de foule : 10 000 personnes envahissent la gare de Lyon, couvrent le train d'affiches « Il reviendra » et bloquent son départ pendant plus de trois heures et demie. Survient le scandale des décorations dans lequel Boulanger est un temps mis en cause. Cependant le président Grévy doit démissionner le 2 décembre. Boulanger devient un acteur clé des tractations pour élire son successeur, les monarchistes offrant leur voix au candidat s'engageant à prendre Boulanger comme ministre de la Guerre. Finalement c'est Sadi Carnot qui est élu président et, prenant Pierre Tirard comme chef de cabinet, il refuse l'accès de Boulanger au ministère.

Le 1er janvier 1888, le général eut une entrevue secrète, en Suisse, avec le prince Napoléon, lui apportant le soutien bonapartiste. Pour l'élection du 26 février suivant, la candidature du général, présenté comme bonapartiste, est posée dans sept départements dans lesquels il obtient 54 671 voix. Cependant le général, toujours en activité, est alors inéligible. Le 15 mars, le général Logerot, ministre de la Guerre, le relève de ses fonctions et, le 24 mars, Boulanger est rayé des cadres de l'Armée et cassé de son grade. En avril, il se présente aux élections en Dordogne et dans le Nord où il reçoit respectivement 59 000 et 172 500 voix : il est de nouveau élu à la Chambre. Une foule importante assiste à son entrée à la Chambre des députés le 12 juillet suivant. De nombreuses caricatures de presse illustrent la crise. Dès le 13, il se bat en duel contre Charles Floquet, le président du Conseil, qui le blesse. Outre les bonapartistes, Boulanger ne tarde pas à recevoir le soutien des monarchistes qui ont manqué la restauration et cherchent à affaiblir le régime républicain. La duchesse d'Uzès finance Boulanger au nom du prince Philippe d'Orléans (3 millions de francs). Albert de Mun et Henri de Breteuil dînent avec lui en secret.

En août, Boulanger se présente à plusieurs élections et est élu dans le Nord, la Somme et la Charente-Inférieure. Les boulangistes ne tardent pas à présenter un candidat dans chaque département. La tension est à son comble lorsque Boulanger se présente à Paris en remplacement de Hude, député décédé, sur un programme en trois mots : « Dissolution, révision, constituante ». Ses adversaires lui opposent le président du Conseil général de la Seine, Édouard Jacques. Le 27 janvier 1889, Boulanger obtient 244 000 voix contre 160 000 voix à son adversaire. Tandis que sa maîtresse, Marguerite de Bonnemains, dîne seule dans un salon voisin, Boulanger célèbre la victoire avec son état-major au café Durand, place de la Madeleine, en présence de 50 000 personnes. Certains interpellent Boulanger, lui demandant de prendre l'Élysée. Boulanger choisit de rester dîner sur place, ses partisans sont déçus et les craintes de ses adversaires attisées, qui désormais s'attellent à le discréditer.

Le ministre de l'Intérieur, Ernest Constans, poursuit la Ligue des patriotes, l'un des soutiens de Boulanger, en vertu d'une loi sur les sociétés secrètes. Puis il fait savoir à Boulanger qu'un ordre d'arrestation doit être porté contre lui le 1er avril et que le même jour le ministre de l'Intérieur demanderait à la Chambre la levée de son immunité parlementaire. Inquiet, Boulanger s'enfuit à Bruxelles — fuite favorisée par le ministère. Le 4 avril 1889, un vote de 333 voix contre 190 lève son immunité parlementaire. Boulanger est poursuivi pour « complot contre la sûreté intérieure » mais aussi pour détournement des deniers publics, corruption et prévarication. Le 14 août le Sénat réuni en Haute Cour de justice condamne par contumace Boulanger, Rochefort et le comte Dillon à la « déportation dans une enceinte fortifiée ». Boulanger vit ensuite en exil en Belgique où on le trouve encombrant.

Boulanger se suicide sur la tombe de Marguerite de Bonnemains au cimetière d'Ixelles le 30 septembre 1891. Madame de Bonnemains était ancienne épouse du fils du lieutenant-général Pierre Bonnemains. Elle meurt de tuberculose le 15 juillet 1891. Rencontrée dans un salon en 1887, elle est devenue la maîtresse de Boulanger : le coup de foudre est en effet immédiat et réciproque au point que le général intente un divorce contre son épouse début 1888, mais il n'y donne pas suite. Madame de Bonnemains le suit en exil. Elle est probablement en partie responsable de sa décision d'attendre des élections favorables au lieu de tenter un coup d'État. La mère Quinton, surnommée la « Belle Meunière » dans sa jeunesse, fut la confidente de l'amour clandestin entre le général Boulanger (« L'Empereur des Amoureux ») et sa maîtresse, la vicomtesse Marguerite de Bonnemains (« La Dame aux œillets rouges »). 

Elle les a accueillis quatre fois secrètement dans son auberge des Marronniers à Royat, au pied des volcans d'Auvergne, dont le 24 octobre 1887 pour la première fois. Elle les suit dans leur exil dans l'île de Jersey, puis à Londres pour finir à Bruxelles. Elle devait élever leur enfant illégitime et partir aux États-Unis avec eux. Après leur mort, la veuve Marie Quinton (1854-1933) sort un succès de librairie republié quarante-deux fois de son vivant, Le Journal de la Belle Meunière : le général Boulanger et son amie, souvenirs vécus, ce qui lui vaut une grande notoriété : lors de l'Exposition universelle de 1900, à Paris, on installe même au pied du palais du Trocadéro le cabaret « Belle Meunière » ; on fait des chars au carnaval de Nice comme en 1909, sans oublier la pièce de théâtre, de Maurice Rostand, sur le général Boulanger donnée porte Saint-Martin à Paris en 1931 dont Marie Quinton est la narratrice. 

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