Affaire Carteron

Publié le par Mémoires de Guerre

L’affaire Carteron, également connue sous le nom de tuerie de Bommiers, ou tuerie des Ajoncs Barrats, du nom du lieu-dit, proche de Bommiers dans l’Indre, défraya la chronique dans l’immédiat après-guerre. Le 21 juillet 1946, une famille de modestes paysans, les Carteron, est retrouvée assassinée dans la ferme au lieu-dit « les Ajoncs-Barrats », commune de Bommiers, Indre. Le mystère de cet assassinat sans mobile apparent n’a jamais été élucidé. 

Kléber Carteron, de sa femme Alphonsine

Kléber Carteron, de sa femme Alphonsine

Les faits

C’est seulement le matin du jeudi 25 juillet 1946 que Mme Jeanne Jugand, 35 ans, voisine immédiate des Carteron, inquiète de ne pas avoir vu ses voisins depuis plusieurs jours se rend à la ferme des Carteron, distante d’une centaine de mètres. Elle voit à travers une vitre cassée deux cadavres. Elle avertit son mari qui alerte le maire puis les gendarmes d’Ambrault. Un serrurier ouvre la porte : on découvre quatre cadavres : le corps de Kléber Carteron, de sa femme Alphonsine, de leur fils André et du jeune Claude Godard, pupille de l’Assistance publique sont retrouvés ligotés, ventre contre terre, exécutés d’une balle dans la nuque. Le chien a également été tué dans sa caisse. Le Parquet à Châteauroux demande le concours de la police judiciaire de Limoges. Plusieurs commissaires et commissaires-inspecteurs sont dépêchés et procèdent aux constatations d’usage, dont le commissaire Georges Daraud qui peu de temps après sera également chargé de l'affaire Mis et Thiennot à Saint-Michel-en-Brenne. 

L'enquête

Six douilles percutées sont trouvées sur la scène du crime ainsi que deux non percutées. Le procès-verbal des gendarmes souligne la situation relativement isolée de la ferme, décrit les trois pièces d’habitation et souligne que « la porte de la pièce où a été commis le crime est fermée à clef. La clef a été enlevée et n’a pu être retrouvée… La fenêtre a une vitre brisée... ». Malgré le désordre régnant dans la pièce et les armoires fouillées, rien ne laissait supposer qu’il y ait eu lutte5. Étonnamment, les limiers de la PJ ne vont pas rechercher tout de suite quelle arme a tiré ces douilles. Un armurier confirme juste que les six douilles proviennent de la même arme de calibre 9 mm. Le commissaire Daraud parle d’un revolver... Deux ans plus tard, on saura qu’il s’agit d’une mitraillette Sten.

Le meurtre de cette famille modeste, vivant entourée de la considération générale, est inexplicable. L’hypothèse du vol semble peu plausible tant la situation de cette famille était précaire. On écarte le crime de rôdeur, de vengeance sur affaire personnelle à la suite de quelque querelle avec un ancien légionnaire se trouvant à l’heure du crime à Sidi-Bel-Abbès. Ce dernier est rapidement mis hors de cause. L’enquête se poursuit par des interrogatoires. Les paysans berrichons se montrent peu loquaces et réticents à apporter des témoignages. Plusieurs hypothèses sont évoquées mais n’aboutissent sur rien.

De nouveaux indices apparaissent lorsqu’un autre ouvrier agricole, employé comme Kléber Carteron à la ferme des Paisseaux, relate les craintes exprimées par Carteron l’hiver précédent. À deux reprises Carteron rapporte avoir été suivi sur le chemin de terre qu’il empruntait pour regagner son domicile. À quelques centaines de mètres près de la forêt domaniale toute proche, on découvre une musette qui a appartenu à Carteron avec un cahier d’écolier, puis onze jours plus tard un bûcheron découvre un abri de fortune dans la forêt. On peut relier d’un trait la ferme du crime, le lieu où la musette a été retrouvée et la cachette en coupant à travers champs.

En même temps la rumeur publique évoque « une affaire de maquis ». Kléber Carteron, braconnier à ses heures, aurait surpris des maquisards détournant un butin parachuté dans la forêt toute proche. Or la mitraillette Sten est justement le type d’arme qui était parachutée pour les maquis. En avril 1947, un dernier rapport de Daraud clôt momentanément l’affaire sans trouver ni mobile ni coupable. 

La scène de crime

La scène de crime

Nouvelle enquête

L’enquête sera confiée ensuite à la police d’Orléans en 1948, René Rolland est mis sur la piste politique. On retrouve une mitraillette Sten chez un « capitaine Jacques » de réputation douteuse dans la région. Il animait un réseau de résistants de l'A.S. (Armée secrète) sur le secteur issoldunois. Un professeur spécialiste des armes confirme que c’est avec une mitraillette Sten qu’on a tiré les balles mais paradoxalement on ne lui propose pas la mitraillette retrouvée. Jusqu’ici aucune analyse balistique n’avait été réclamée. L’enquête qui semblait relancée est à nouveau interrompue en décembre 1946. Un non-lieu définitif est prononcé en 1957. 

Publié dans Evènements

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