Larry Flynt
Larry Flynt (The People VS. Larry Flynt) est un film américain réalisé par Miloš Forman et sorti en 1996. Ce film a obtenu l'Ours d'or au Festival de Berlin en 1997. Larry Flynt est un personnage scandaleux. Propriétaire d'une petite boîte de strip-tease, animé d'une ambition sans limites, il lance, dans les années 70, un concurrent au mauvais goût délibéré du magazine Playboy, qu'il baptise Hustler. Cette publication s'illustre par son audace et son immoralité, provoquant la réaction des ligues de vertu, qui ne tardent pas à lui intenter un procès. Larry n'en a cure. Il considère les institutions américaines de la même manière que ses collaborateurs, avec un solide mépris. On l'emprisonne, mais cela ne suffit pas à le faire taire, au contraire. Il s'attache aussi à dénoncer les horreurs de la guerre et devient l'homme à abattre...
Larry Flynt de Miloš Forman
Fiche technique
- Titre original : The People VS. Larry Flynt
- titre français : Larry Flynt
- Réalisation : Miloš Forman
- Production : Michael Hausman, Oliver Stone, Janet Yang
- Scénario : Scott Alexander, Larry Karaszewski
- Musique : Thomas Newman
- Directeur de la photographie : Philippe Rousselot
- Montage : Christopher Tellefsen
- Société de distribution : Columbia Pictures
- Pays d'origine : États-Unis
- Langue : anglais
- Durée : 129 minutes
- Dates de sortie : États-Unis : 13 octobre 1996, France : 19 février 1997
Distribution
- Woody Harrelson (VF : Dominique Collignon-Maurin ; VQ : Bernard Fortin) : Larry Flynt
- Courtney Love (VF : Marie Vincent ; VQ : Chantal Baril) : Althea Leasure
- Edward Norton (VF : Damien Boisseau ; VQ : Antoine Durand) : Alan Isaacman
- Brett Harrelson (VF : Bernard Gabay ; VQ : Jean-Luc Montminy) : Jimmy Flynt
- Donna Hanover (VF : Anne Rochant ; VQ : Élizabeth Lesieur) : Ruth Carter Stapleton
- James Cromwell (VF : Michel Bardinet ; VQ : Claude Préfontaine) : Charles Keating
- Richard Paul (VF : Raymond Gérôme ; VQ : Edgar Fruitier) : Jerry Falwell
- Crispin Glover (VF : Éric Metayer ; VQ : Benoit Rousseau) : Arlo
- Vincent Schiavelli (VF : Jean-Claude Balard ; VQ : Jean-Marie Moncelet) : Chester
- Miles Chapin (VF : Érik Colin) : Miles
- James Carville (VQ : Éric Gaudry) : Simon Leis
- Burt Neuborne (VF : Patrick Messe) : Roy Grutman
- Oliver Reed (VF : Henri Poirier ; VQ : Roger Briand) : le gouverneur Rhodes
- Jan Triska : l'assassin
- Cody Block : Larry à 10 ans
- Ryan Post (VF : Hervé Grull) : Jimmy à 8 ans
- Stephen Dupree (VF : Pascal Renwick) : un photographe
- Larry Flynt (VF : Raoul Delfosse ; VQ : Hubert Gagnon) : le juge Morrissey
- D'Army Bailey (VF : Luc Bernard ; VQ : Pierre Chagnon) : le juge Thomas Alva Mantke
- Nancy Lea Owen (VF : Nicole Favart) : la mère de Larry
- John Fergus Ryan (VF : Jacques Dynam) : le père de Larry
- Jim Grimshaw (VF : Gabriel Cattand) : le juge en chef William Rehnquist de la Cour suprême
- James Smith (VF : Georges Berthomieu) : le juge Thurgood Marshall de la Cour suprême
- Rand Hopkins (VF : Joseph Falcucci) : le juge Antonin Scalia de la Cour suprême
- Charles M. Crump (VF : René Bériard) : le juge John Paul Stevens de la Cour suprême
Critique du 24/05/2008 Par Aurélien Ferenczi
Film de Milos Forman (The People vs Larry Flint, USA, 1996). 125 mn. VF. Avec Woody Harrelson : Larry Flynt. Courtney Love : Althea.
Genre : rêve américain déculotté.
Ex-directeur de strip-shows, Larry Flynt a l'idée de concurrencer le magazine Playboy : il fonde Hustler, aux images plus crues. Le journal est un succès. Les ligues de vertu veulent l'interdire... On doit cet itinéraire, authentique, d'un célèbre pornographe à deux brillants scénaristes, Scott Alexander et Larry Karaszewski, champions de la bio « zarbi » (depuis Ed Wood). Ici, la dialectique est limpide : doit-on défendre un salaud au nom du premier amendement de la Constitution, qui garantit la liberté de penser et de s'exprimer ?
La mise en scène classique de Milos Forman n'est pas toujours à la hauteur de l'ironie réelle de la vie de Larry Flynt. Elle fait du personnage un héros de cinéma et bute aussi sur la crudité, difficile à montrer, des activités du bonhomme.
Restent tout de même des épisodes colorés qui restituent l'Amérique des seventies. Et une belle histoire d'amour, qui unit Flynt à Althea, jouée avec passion par l'étonnante Courtney Love.
Critique lors de la sortie en salle le 22/02/1997 Par Philippe Piazzo
Détestable, ce Larry Flynt. Ne respectant rien ni personne. D'abord propriétaire d'une minable boîte de strip-tease, puis créateur, dans les années 70, de Hustler, le concurrent « crade » de Playboy, il méprise ses collaborateurs, mène une vie dissolue, ridiculise les institutions américaines. On le traîne en justice, on l'emprisonne, mais ça ne suffit pas à le faire taire. Il devient l'homme à abattre.
La vie de cet homme-là tient du mauvais scénario à sensation (sexe, drogue et politique). Pourtant, Larry Flynt existe bel et bien, et Milos Forman l'a rencontré. Il lui a même confié le rôle... du juge qui l'avait conduit en prison. Pied de nez qui ressemble bien au cinéaste. Installé depuis vingt-cinq ans aux Etats-Unis, Milos Forman continue à observer la société américaine avec le même regard curieux et amusé. Il se régale de confrontations saugrenues, à commencer par cette invraisemblable relation entre le pornographe Larry Flynt et la soeur du président Carter, fervente baptiste qui l'a convaincu de se convertir (provisoirement)...
Provocateur, Larry Flynt l'est ni plus ni moins que McMurphy (Jack Nicholson), le « fou » de Vol au-dessus d'un nid de coucou, les hippies de Hair ou le Mozart d'Amadeus, tête à claques qui jurait comme un charretier. Milos Forman aime les héros exaspérants ; d'autant plus exaspérants que leur arrogance agressive pousse ceux qui les croisent à dévoiler leur vraie nature. Et il les filme avec une jubilation certaine, en une suite de scènes qui sont autant de sketches acides. Ici, puritains obsessionnels ou arrivistes cupides forment autour de Larry Flynt une ronde étourdissante.
Pour autant, Larry Flynt n'est pas seulement le portrait d'un affreux agitateur ni le tableau d'une société démasquée, mais on voit également s'y profiler une réflexion sur la liberté d'expression. Le véritable héros de ce film, c'est le Premier amendement de la constitution américaine (1), qui définit l'étendue illimitée de cette liberté. Mais c'est aussi, dit à juste titre Milos Forman, la Cour suprême des Etats-Unis, qui finira par donner raison à Larry Flynt.
Insensiblement, le récit se resserre autour de cette idée, qu'impose l'avocat de Flynt, Alan Isaacman : accepter cet homme détestable, c'est respecter le jeu de la démocratie. Milos Forman met le spectateur à l'épreuve, en lui demandant de tolérer un citoyen qui n'existe que dans l'affrontement, avec ses ennemis, bien sûr, mais aussi avec sa propre famille, sa femme, ses collègues, et même avec celui qui s'est chargé de le défendre.
Forman s'arrange, au final, pour forcer notre sympathie envers le héros de son film, ce pantin, dictateur au petit pied et infantile, jubilant du bordel que partout il déclenche, usant de toutes les ficelles, y compris les plus démagogiques, pour mettre les rieurs de son côté... Audace ou roublardise ? On penche pour la roublardise lorsque Forman, cherchant à séduire les réticents, en rajoute juste un peu trop dans la caricature, à l'unisson de ce personnage (et de son interprète, Woody Harrelson) pour qui la vie est un show permanent. La réflexion qu'il a lui-même suscitée passe alors un peu à l'arrière-plan.
Dans cette fresque tonitruante, Forman a cerné avec une particulière attention deux personnages clés que tout oppose : l'épouse (la chanteuse Courtney Love, étonnante dans son premier rôle à l'écran) qui vit avec passion, jusqu'à la déchéance et la mort, les excès de son mari, et l'avocat (Edward Norton, tout aussi extraordinaire) (2). Chacun à sa manière, ils le protègent. Comme on protégerait, sans condition, la part sombre qui est au fond de soi parce qu'elle est inséparable de la lumière.
C'est à travers eux que Milos Forman nous permet d'approcher vraiment Larry Flynt le détestable. De l'aimer ? C'est une autre histoire... -
(1) « Le Congrès ne fera aucune loi relativement à l'établissement d'une religion ou en interdisant le libre exercice ; ou restreignant la liberté de parole ou de presse ; ou le droit du peuple de s'assembler paisiblement et d'adresser des pétitions au gouvernement pour une réparation de ses torts. »
(2) On peut le voir dans le Woody Allen Tout le monde dit I love you.