Patrice de Mac Mahon
Patrice de Mac Mahon, comte de Mac Mahon, 1er duc de Magenta, né le 13 juin 1808 au château de Sully (Saône-et-Loire) près d'Autun et mort le 17 octobre 1893 au château de la Forêt, à Montcresson (Loiret), est un homme d’État français, maréchal de France et président de la République française de 1873 à 1879.
La famille Mac Mahon est d'origine irlandaise, réfugiée en France avec Jacques II Stuart lors de la Glorieuse Révolution de 1689, et se réclamant de la descendance des anciens rois d'Irlande. Ils revendiquent une descendance des seigneurs de Munster ; après l'installation définitive de la famille en France, leur noblesse est reconnue par lettre patente du roi Louis XV. Famille essentiellement militaire (quatorze Mac Mahon ont intégré l'armée), elle s'est établie en Bourgogne (Autun), au château de Sully, qui verra naître le 13 juin 1808 Patrice de Mac Mahon, seizième et avant-dernier enfant de Maurice-François de Mac Mahon (1754-1831), comte de Mac Mahon, et de Pélagie de Riquet de Caraman (1769-1819), elle-même descendante de Pierre-Paul Riquet, constructeur du canal du Midi.
En 1820, Mac Mahon entre au Petit Séminaire des Marbres à Autun ; il achève ses études au collège Saint-Louis à Paris, puis il entre à l’école spéciale militaire de Saint-Cyr à compter du 23 octobre 1825, il rejoint pour deux ans l’école d’application d’état-major, le 1er octobre 1827. Sorti troisième de l'école militaire de Saint-Cyr, il entre dans l'armée en 1827, il est détaché au 4e régiment de hussards en 1830, participe ensuite à la conquête de l'Algérie, où, alors sous-lieutenant au 20e régiment d'infanterie de ligne, il se fait remarquer lors de la prise d'Alger par sa capacité et sa bravoure. Le 24 novembre 1830, il s'illustre avec son régiment, durant l'expédition de l'Atlas, lors du combat du col de Mouzaïa qui lui permet de recevoir la croix de chevalier de la Légion d'honneur. Rappelé en France, il participe en 1832 à la campagne des Dix-Jours où il attire de nouveau l'attention lors de siège de la citadelle d'Anvers.
Il devient capitaine en 1833, et revient en Algérie en 1836 où il est placé sous les ordres du général Clauzel puis du général Damrémont. Il mène des raids de cavalerie audacieux à travers les plaines occupées par les Bédouins et se distingue au siège de Constantine, en 1837, où il est légèrement blessé. En 1840, il quitte l'Afrique et apprend à son arrivée en France qu'il est promu chef d'escadron. En mai 1841, il repart en Algérie à la tête du 10e bataillon de chasseurs à pied avec lequel il se distingue, en avril, au combat du col de Bab el-Thaza et devant les troupes d’Abd el-Kader, le 25 mai. Le 31 décembre 1842, il est promu lieutenant-colonel au 2e régiment de la Légion étrangère. En 1843, il prend les fonctions de chef de corps, en remplacement du titulaire malade, commandement qu'il garde jusqu’en 1845.
Il s'illustre de nouveau lors des combats de Chaab el Gitta et d'Aïn Kebira les 14 et 17 octobre 1844. Devenu colonel en décembre 1845, il prend le commandement du 41e régiment d’infanterie de ligne alors en garnison à Marnia. Début 1848, il est nommé à la tête de la subdivision de Tlemcen, il est nommé général de brigade le 12 juin de la même année. En 1849, il devient commandeur de la Légion d'honneur, et effectue l’intérim du général Pélissier, chef d'état-major de la province d'Oran. En 1852, il organise en Algérie le plébiscite de légitimation par le suffrage universel destiné à approuver le coup d'État du 2 décembre 1851 avant de recevoir, en mars, le commandement de la division de Constantine puis d'être promu général de division, en juillet.
Il épouse à l'église Saint-Thomas-d'Aquin de Paris le 13 mars 1854 Élisabeth de La Croix de Castries, fille d’un propriétaire gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi et de Marie Augusta d'Harcourt-Olonde. De cette union naissent quatre enfants :
- Patrice (1855-1927), 2e duc de Magenta
- Eugène (1857-1907)
- Emmanuel (1859-1930)
- Marie (1863-1954), comtesse de Piennes
Pendant la guerre de Crimée, on lui donne le commandement de la 1re division d'infanterie du 2e corps de l'armée d'Orient et, en septembre 1855, il mène avec succès, pendant le siège de Sébastopol, l’attaque sur les ouvrages fortifiés de Malakoff, où il aurait prononcé son célèbre « J’y suis, j’y reste ! », ce qui aboutit à la chute de Sébastopol.
Après son retour en France, il est comblé d'honneurs et fait sénateur. Désirant pourtant une vie plus active, il refuse le commandement suprême des troupes françaises, et est une fois encore envoyé, sur sa demande, en Algérie, où il vainc complètement les Kabyles. De retour en France, il vote comme sénateur contre la loi inconstitutionnelle sur la sécurité générale, proposée après l'attentat manqué d'Orsini contre la vie de l'empereur.
Il se distingue particulièrement lors de la campagne d'Italie de 1859. Moitié par chance, moitié par audace et par flair, il pousse ses troupes en avant sans avoir reçu d'ordres à un moment critique lors de la bataille de Magenta, ce qui assure la victoire française. Pour ses brillants services, il reçoit de Napoléon III le bâton de maréchal, et est titré duc de Magenta.
En 1861, il représente la France au couronnement de Guillaume Ier de Prusse. En 1864, il est nommé gouverneur général d'Algérie. Son action dans ce poste représente l'épisode le moins réussi de sa carrière. Bien qu'ayant effectivement mis en œuvre quelques réformes dans les colonies, les plaintes sont si nombreuses que deux fois dans la première moitié de 1870 il présente sa démission à Napoléon III. Quand le cabinet Ollivier, qui finit si mal, est formé, l'empereur abandonne ses projets algériens et Mac Mahon est rappelé.
Il participe à la guerre franco-prussienne de 1870, essuie plusieurs défaites en Alsace et lors de la bataille de Sedan où il est blessé dès le début des combats ; sa stratégie paraît confuse et marquée par une certaine indécision. Il est fait prisonnier lors de la capitulation de Sedan (1er septembre). En 1871, lors de la campagne à l'intérieur, il est nommé à la tête de l'armée régulière dite « versaillaise » qui, aux ordres du gouvernement légal, réprime durement la Commune de Paris, tuant ou capturant des milliers de personnes.
Porté par sa popularité, il est élu président de la République par la majorité royaliste de l'époque, après la chute d'Adolphe Thiers le 24 mai 1873. Après avoir limogé le président du Conseil Jules Dufaure, il le remplace par le duc Albert de Broglie, un monarchiste, projetant ainsi une restauration de la monarchie. Mais l'échec de cette restauration le conduit à voter le septennat présidentiel. Cette décision fait monter le cours des emprunts publics à la Bourse de Paris. « Bien que royaliste convaincu, il ne rencontrera pas le comte de Chambord en novembre 1873, estimant ne pas pouvoir allier son devoir de président de la République aux désirs du prince ». Avec le duc de Broglie comme président du Conseil, il prend une série de mesures d'« ordre moral ». L'Assemblée ayant, le 9 novembre 1873, fixé son mandat à sept ans, il déclare, le 4 février 1874, qu'il saurait pendant sept ans faire respecter l'ordre légalement établi. Préférant rester « au-dessus des partis », il assiste plutôt qu'il n'y prend part aux procédures qui, en janvier et février 1875, aboutissent aux lois fondamentales qui établissent finalement la République comme le gouvernement légal de la France (voir l'amendement du député Wallon du 30 janvier 1875). Mac Mahon s'estime responsable devant le pays plus que devant la chambre, ce qui amène des conflits avec cette dernière.
Le 26 septembre 1875, il séjourne à Vernon dans l'Eure pendant plusieurs jours, afin de préparer les grandes manœuvres de la troisième armée. À la suite des élections législatives françaises de 1876, qui sont remportées par une majorité républicaine, il consent avec réticence à la formation des gouvernements Dufaure III, Dufaure IV et Jules Simon, dominés par les républicains. Dans la nuit du 23 au 24 juin 1875, une importante crue de la Garonne se produit. Visitant des villes et des villages dévastés, ne sachant que dire, il déclara le célèbre « que d'eau… que d'eau !… » Le préfet du département lui répondit alors : « Et encore, Monsieur le Président, vous n'en voyez que le dessus… ! » Quand les mandements épiscopaux des évêques de Poitiers, Nîmes et Nevers, recommandant à la sympathie du gouvernement français le cas du pape captif Pie IX, sont suivis d'une résolution de la Chambre proposée par la gauche et demandant au Gouvernement de « réprimer les manifestations ultramontaines » (4 mai 1877), Mac Mahon, douze jours plus tard, demande à Jules Simon de démissionner, et constitue un gouvernement conservateur sous la direction du duc de Broglie ; il convainc le Sénat de dissoudre la Chambre, et fait un voyage à travers le pays pour assurer le succès des conservateurs aux élections, tout en protestant qu'il ne désire pas renverser la République. C'est ce qu'on a appelé « le coup du 16 mai ».
Cependant, les élections suivantes du 14 octobre donnent à la gauche une majorité de 120 sièges, et le ministère de Broglie démissionne le 19 novembre. Mac Mahon tente d'abord de former un gouvernement de fonctionnaires dirigé par le général de Rochebouët, mais la Chambre ayant refusé d'entrer en contact avec lui, Rochebouët démissionne dès le lendemain, et le président se voit contraint de rappeler Dufaure à la tête d'un gouvernement de gauche. Les élections sénatoriales du 5 janvier 1879 ayant livré cette assemblée à la gauche, Mac Mahon, qui ne dispose plus d'aucun soutien parlementaire, préfère démissionner le 30 janvier 1879, après avoir refusé de signer le décret retirant leur commandement à certains généraux. On prête à Léon Gambetta cette formule prononcée le 15 août 1877 : « Le Président n'a que ce choix : il lui faut se soumettre ou se démettre. » Le républicain Jules Grévy lui succède huit heures plus tard.
De 1887 à 1893, il dirige la Société de Secours aux Blessés Militaires (S.S.B.M.), devenue depuis 1940 la Croix-Rouge française. Patrice de Mac Mahon meurt le 17 octobre 1893 au château de la Forêt, à Montcresson, près de Montargis, après avoir entrepris la rédaction de ses mémoires, et est inhumé le 22 octobre aux Invalides, après des obsèques nationales et une messe à l'église de la Madeleine ; les cinq cordons du char funèbre furent tenus par le général Février, grand chancelier de la Légion d'honneur, l'amiral Henri Rieunier, ministre de la Marine, le général Loizillon, ministre de la Guerre, Monsieur Charles Merlin, du Sénat et Monsieur Malvy, de la Chambre. L'oraison funèbre est prononcée par Mgr Perraud.
Son hôtel de la rue de Bellechasse vu par son arrière-petite-fille : « J'habitais dans l'hôtel de mon arrière-grand-père le maréchal de Mac-Mahon. Une vieille maison, donnant sur les jardins de l'hôtel de Castries, appartenant aux parents de sa femme le portrait grandeur nature du maréchal par Horace Vernet, dominait le salon de ma grand 'mère; son appartement et celui de sa belle-sœur, la comtesse de Piennes (qui a eu sept ans le soir de Sedan), sont de véritables musées. Des tableaux et des aquarelles illustrent la campagne d'Italie et la guerre de Crimée. De grandes vitrines sont remplies d'armes et de décorations. Le buste en Sèvres du maréchal trône à chaque étage, sept gros manuscrits de ses Mémoires figurent dans la bibliothèque. Des portraits de Cour du Second Empire, des souvenirs du prince impérial ornent les murs. » — É. de Miribel, op. cit. C'est à propos du général Georges Boulanger que Georges Clemenceau eut ce mot cruel : « Il s'est cru Bolivar, il ne fut que Mac Mahon », ce qui montre la considération qu'il eut pour ce dernier.