Revue de presse de l'Histoire - La Seconde guerre mondiale le cinéma les acteurs et les actrices de l'époque - les périodes de conflits mondiales viètnamm corée indochine algérie, journalistes, et acteurs des médias
Marcel Vallée est un acteur français né le 15 janvier 1880 à Paris et décédé le 31 octobre 1957 à Fontaine-le-Port, fut un figurant de théâtre en 1902, embauché au cinéma par Max Linder en 1906. Il tourna de nombreux films muets et sonores et deux versions de Topaze en 1932 et 1950.
Jeune homme que l'on imagine encore mince, Marcel Vallée fait ses débuts en 1902 au théâtre Déjazet. Son apprentissage se fera sous le patronage de maîtres prestigieux : il travaille d'abord pour Firmin Gémier au Théâtre Antoine où, selon la critique, "… sa force comique, sa voix tonnante et sa diction remarquable" font merveille. En 1914, Jacques Copeau le dirige en vedette dans «La jalousie du Barbouillé» de Molière. Le temps d'épouser la comédienne Madeleine Geoffroy, il suit son metteur en scène à New York où il joue avec Louis Jouvet «Les fourberies de Scapin» et «La nuit des rois». Son rôle le plus fameux reste toutefois celui de Monsieur Muche lors de la création de «Topaze» en 1928 avec André Lefaur et Pierre Larquey : directeur douteux d'une sinistre pension, il se montre intraitable avec les pauvres diables de professeurs mais bassement obséquieux face aux riches parents d'élèves ; en 1941, la pièce est reprise sur scène mais c'est le grand écran qui nous permet de le retrouver à deux reprises dans ce rôle, en 1932 face à Jouvet et en 1950 avec Fernandel.
En 1905, il tâte déjà du cinéma : on le croise dans quelques courts métrages de Max Linder mais ce n'est là qu'une récréation. Jacques Feyder lui remet le pied à l'étrier avec «La faute d'orthographe» (1918) ; il enchaîne sur une quinzaine de titres au temps du muet dont le rôle de Mousqueton, le valet cocasse du colosse Porthos, dans «Les trois mousquetaires» (1921) – sérial en 10 épisodes ! - et sa suite, «Vingt ans après» (1922), deux œuvres signées Henri Diamant-Berger. Le cinéaste apprécie ses services puisqu'au début du parlant il le distribuera dans sept films : c'est ainsi qu'il sera deux fois le partenaire de Damia, dans «Tu m'oublieras» (1931) et «Sola» (1931) ; dans «Paris la nuit» (1930), il joue Valentin, tenancier d'un bar louche fréquenté par une faune interlope. L'actrice Jeanne Perez, qui débute à l'écran dans ce film, sera sa seconde épouse.
Les années 30 sont fastes : il multiplie les apparitions dès le début de la décennie et pourra se vanter d'aligner plus de soixante films en dix ans, parfois pour des rôles courts comme celui d'un journaliste dans «Le mystère de la chambre jaune» (1931) ou de l'oncle Corentin, breton de pacotille, dans la première et funeste version de «Bécassine» (1939). Il vaut mieux retenir le complice jovial de Charles Boyer dans «Tumultes» (1931) de Robert Siodmak, l'inspecteur Cocantin de «Judex 34» (1933) ou ses rôles de directeur de théâtre tonitruant et irascible dans «Zouzou» (1934) de Marc Allégret et «Divine» (1935) de Max Ophüls. Surtout, il a la chance d'animer la silhouette plaisante de l'ambassadeur Popoff dans la version française de «La veuve joyeuse» (1934) d'Ernst Lubitsch, un personnage qui subit à l'occasion une cure d'engraissement puisque c'est Edward Everett Horton qui l'incarne dans la version américaine ; il est vrai que l'année précédente, la même métamorphose s'était opérée pour le personnage de Gaston Bibi dans «L'amour guide» (1933), autre film mettant en vedette Maurice Chevalier que Marcel Vallée retrouvera dans deux bonnes comédies, «Avec le sourire» de Maurice Tourneur (1936) et «L'homme du jour» de Julien Duvivier (1936).
On le recrute pour son coffre et ses rondeurs et on l'affuble volontiers de noms comiques : Croche, Muche, Trompe ou Tonnerre sans parler de Dupetit-Flageot ou d'Ivan Barinov. Homme d'autorité, il sera préfet, directeur d'école ou de music-hall et même général. Toutefois, lorsqu'il préside le tribunal de «Belle étoile» (1938), il semble au bord de la crise de nerfs face aux dépositions farfelues de Michel Simon en clochard et de Saturnin Fabre en banquier loufoque. Directeur inventif d'un consortium bancaire, il crée «Le club des soupirants» (1941), recrute Fernandel mais ne parvient pas à gruger le fantasque milliardaire Cabarrus (Saturnin Fabre, de retour !). Dès 1938, il croisait le même Fernandel dans «Les cinq sous de Lavarède» et surtout «Fric-frac» (1939) où il joue le bijoutier Mercandieu sensible au charme canaille d'Arletty ; en revanche, il aurait pu s'abstenir des retrouvailles occasionnées par le piteux «Cœur de coq» (1947),…
Il faut dire que, tout à sa frénésie de tournages, notre homme ne choisit pas toujours judicieusement ses cinéastes. Oubliant les Cam, Cammage et autres Caron, retenons les bons cinéastes qui le recrutèrent comme Marcel Lherbier qui en fait le docteur Acario de «La comédie du bonheur» (1940) ou Pierre Chenal pour qui il sera un maire retors de «L'homme de nulle part» (1936) et un juge d'instruction sagace dans «Le dernier tournant» (1939). Béret sur le crâne et moustache frémissante, il anime de sa voix de stentor l'ouverture remarquable du film de Georges Lacombe, «Le journal tombe à cinq heures» (1942), où il campe Valentin, le dynamique chef des ventes. Impresario volubile d'une Elvire Popesco survoltée dans «Le voile bleu» (1942), il n'y a droit qu'à une scène comme dans «Monsieur Vincent» (1947) où, administrateur de l'Hôtel-Dieu, il s'oppose à Pierre Fresnay qui lui reproche son absence de charité chrétienne. On le voit aussi, dans «Le couple idéal» (1945) en cinéaste de l'époque du muet puis en préfet dans «Branquignol» (1949) de Robert Dhéry.
En fin de carrière, toutes les ambitions semblent oubliées : qu'il est loin le temps du «Paris qui dort» (1923) de René Clair… Le prolifique Émile Couzinet le recrute à quatre reprises pour une belle brochette de navets : «Trois marins dans un couvent» (1949), «Le don d'Adèle» (1950) puis un beau doublé en 1952 : «Le curé de Saint-Amour» et «Quand te tues-tu ?» ! Après un dernier salut à M. Muche pour le «Topaze» réalisé par Pagnol en 1950 et deux rôles chez Guitry – un général pour «Napoléon» (1954) et un antiquaire dans «Assassins et voleurs» (1956) – l'ami Marcel Vallée parvient malgré tout à se retirer sur une bonne impression.