Philippe de Gaulle, né le 28 décembre 1921 à Paris, est un officier général de la Marine et homme politique français. Fils de Charles et Yvonne de Gaulle, issu de l'École navale (promotion 1940) et passé par l'Aéronautique navale, il est sénateur de Paris de 1986 à 2004.
Philippe Henri Xavier Antoine de Gaulle est baptisé le 8 janvier 1922 en l'église Saint-François-Xavier à Paris dans le 7e arrondissement ; il a pour marraine Marguerite Vendroux, sa grand-mère maternelle, et pour parrain son oncle paternel, Xavier de Gaulle. Enfant, il suit ses parents en Allemagne et au Liban, au gré des garnisons de son père, et fait ses études au collège Saint-Nicolas à Paris. Très tôt il se reconnaît une vocation de marin. Il est élevé en vertu des principes de l'éducation d'alors : "Chez nous, on ne parlait jamais d'argent... Un jour, j'ai osé demander à table : « Combien papa gagne-t-il ? » Je devais avoir huit ans ou dix ans. On m'a immédiatement rétorqué : « On ne parle pas d'argent à table, et de toute façon, les enfants n'ont rien à en dire car, n'en gagnant pas, ça ne les regarde pas".
Philippe de Gaulle est élève du Collège Stanislas en 1939. Se destinant à l'École navale, il suit la préparation militaire supérieure. Le concours d’admission à l’École navale de 1940 est interrompu par l’avancée des Allemands en France et de ce fait non validé. Il quitte Brest le 18 juin 1940 sur un cargo-transport avec sa famille. Il n'entend pas l'Appel du 18 Juin lancé par son père, mais en a connaissance le lendemain à son arrivée à Falmouth en Grande-Bretagne. Il s'engage le 20 juin dans les Forces navales françaises libres (FNFL). Il sert comme matelot sans spécialité, et comme pompier auxiliaire à Londres pendant la Bataille d'Angleterre. Ayant été reçu comme élève au concours d'admission de l'École navale (promotion 1940), il embarque à bord du cuirassé Courbet en septembre 1940, à Portsmouth. Il y sert avec la compagnie des futurs élèves-aspirants dans l’artillerie contre-avions, et y suit 6 mois de cours dont un mois de formation militaire au camp britannique de Camberley (15 octobre - 15 novembre 1940) puis 5 mois à bord du Président Théodore Tissier à Portsmouth (15 novembre 1940 - 15 avril 1941). Il en sort second maître-élève aspirant à l'examen de sortie, en avril 1941.
Après avoir participé à de nombreuses sorties le long des côtes anglaises, sur les goélettes Belle Poule et Étoile, annexes de l'École navale, il est nommé aspirant en octobre 1941. Il suit divers stages d'armes dans les écoles britanniques dont le Royal Naval College de Dartmouth. Il est nommé enseigne de vaisseau de 2e classe en février 1943. Embarqué sur la corvette Roselys, de février à mai 1942 (bataille de l'Atlantique), il est affecté successivement sur le chasseur CH.11 (effectuant escortes et patrouilles en Manche) puis à la 23e flottille de Motor Torpedo Boat (MTB) de septembre 1942 à septembre 1943 où il assume les fonctions de second de la vedette lance-torpilles MTB.96 (20 patrouilles en Manche, 3 engagements à l'ennemi). Il est promu enseigne de vaisseau de 1re classe en février 1944, puis embarque sur la frégate La Découverte, de septembre 1943 à mai 1944 (bataille de l'Atlantique).
Il participe ensuite à la Libération de la France (1944-1945) comme commandant d'un peloton du régiment blindé de fusiliers-marins de la 2e DB et combat à Alençon, Argentan et Antony. Le 25 août 1944, il participe à la libération de Paris, de la Porte d'Orléans en passant par l’École militaire, la Rue Royale, le palais du Luxembourg, la Gare du Nord, la Gare de l’Est, Saint-Denis, Le Bourget et Stains. Il est envoyé depuis la gare Montparnasse pour porter l'ordre de reddition aux Allemands retranchés au Palais Bourbon dans les locaux de l'Assemblée nationale. Il doit négocier seul et désarmé, au milieu d'eux, au risque de se faire abattre si les choses tournent mal. Il participe ensuite à la Campagne de Lorraine, la Bataille des Vosges, la Bataille d'Alsace, la Poche de Colmar, la Poche de Royan et de la pointe de Grave pour terminer au Berghof à Berchtesgaden pendant l'hiver 1944-1945.
Durant la Seconde Guerre mondiale, il a reçu six blessures légères. Pour avoir été combattant pendant l'ensemble du conflit, notamment la bataille de l'Atlantique et la campagne de la Manche, il reçoit au début d'avril 1945 à Argenton-sur-Creuse la Croix de guerre 1939-1945 avec trois citations, des mains du général Leclerc. En mai 1945, comme les deux tiers de ses camarades anciens élèves de l’École navale en Grande-Bretagne, il poursuit sa carrière dans la Marine nationale française. Il recevra la croix de chevalier de la légion d'honneur à la fin de l'année 1946. Déjà breveté fusilier à la fin des hostilités, il suit (de juillet 1945 à l'automne 1946), à la base aéronavale de Chapel Hill(Caroline du nord - États-Unis) les cours de pilotage et en sort breveté pilote. Après un stage à l'école de l'aviation embarquée de la BAN Cuers en octobre 1946, il est breveté d'aéronautique et poursuit une carrière aéronavale. D'abord affecté à la BAN Hyères (Le Palyvestre), à la flottille 4 F puis à la flottille 3 F, dotées de Douglas SBD-5 il effectuera (en 1946-1948 et en 1952-1954) deux campagnes de guerre en Indochine dans l'aéronautique navale embarquée, avec appontages sur porte-avions, de jour comme de nuit, durant deux ans et demi.
Promu au grade de lieutenant de vaisseau le 24 décembre 1948, il est affecté à l'escadrille d'instruction de l'École navale (basée à Lanvéoc) puis à Port-Lyautey, comme officier en second de la 2 F, équipée de patrouilleurs maritimes Lancaster. De 1952 à octobre 1954, il est officier en second puis commandant de la flottille 6 F, affectée à la BAN de Lartigue (Oranie) et équipée de bombardiers-torpilleurs TBM.D'octobre 1954 à avril 1956 il sert à bord du porte-avions La Fayette en tant que chef du service Pont d'Envol-Hangar (PEH). Promu capitaine de corvette le 1er avril 1956, il est breveté de l'enseignement militaire supérieur (du 2e degré) après avoir été admis comme stagiaire à l'École supérieure de Guerre navale (1957-1958). Après avoir servi comme Adjudant de Division (de la 2e DEE) - à bord de l'escorteur d'escadre Duperré - il prend, le 23 décembre 1960, le commandement de l'escorteur rapide Le Picard. Il assumera brièvement (du 7 au 15 septembre 1961) le commandement (par intérim) de la division d'escorteurs rapides à laquelle appartient son bâtiment. Promu capitaine de frégate le 1er octobre 1961, il en débarque le 21 décembre 1961. En 1962-1964, il est affecté à la division Études générales de l'État-Major des armées, puis commande (de 1964 à 1966) l'Aéronautique navale de Dugny-Le Bourget (en région parisienne).
Promu capitaine de vaisseau le 1er avril 1966, il commande la frégate lance-missiles Suffren de février 1967 à mars 1968. Il fait ensuite partie du groupe de travail sur l'avenir de la Marine (1968), puis devient auditeur au Centre des hautes études militaires (CHEM) et à l'Institut des hautes études de Défense nationale (IHEDN) en 1968-1969. Il commande ensuite l'Aéronautique navale de la 2e Région maritime (1969-1971). Il sera nommé au grade de contre-amiral le 1er septembre 1971 et commandera le Groupe naval d'essais et de mesures (GROUPEM) (1973-1974), mettant alors sa marque sur le bâtiment réceptacle Henri Poincaré. Il commandera ensuite l'Aviation de Patrouille maritime (ALPATMAR) (1974-1975). Promu au grade de vice-amiral le 1er juin 1975, il devient commandant de l'Escadre de l'Atlantique (1976-1977) puis, élevé au rang et appellation de vice-amiral d'escadre le 1er juin 1977, président de la commission permanente des essais en 1977-1980. Élevé le 25 juin 1980 au rang et appellation d'amiral, Philippe de Gaulle termine sa carrière au poste d'inspecteur général de la Marine, avant d'être admis en deuxième section, le 29 décembre 1982.
Certains écrits de Charles de Gaulle évoquent la possibilité d'une carrière politique pour son fils. Il écrit le 28 avril 1951 : "Je sais qu'à Port-Lyautey, comme ailleurs, tu feras honneur à tout ce que, désormais, notre famille représente et qui sera un jour sans doute ta propre charge" ; puis, le 15 décembre 1951 : "Si je suis mort ou hors de course lors de l'éruption du volcan, c'est toi, mon fils, qui devras devenir le De Gaulle du nouveau drame". Dans une lettre du 4 mai 1961, on trouve : "Les événements m'amènent à réfléchir à ce qui pourra peut-être prolonger ou reprendre ce que j'ai entrepris à la tête de notre pays et, par là même, Philippe de Gaulle ne manque pas de m'occuper". Le 12 avril 1964, le général donne à son fils ces instructions : « S'il devait arriver que je disparaisse prochainement sans avoir directement fait connaître qui, dans les circonstances présentes, je souhaite que le peuple français élise pour mon successeur immédiat comme Président de la République, je te confie le soin de publier aussitôt la déclaration ci-jointe. Je dis : mon successeur immédiat, parce que j'espère qu'ensuite c'est toi-même qui voudras et pourras assumer à ton tour la charge de conduire la France. » À la fin des années 1960, un parti gaulliste « légitimiste », le Centre des républicains libres se constitue. Mené par Joseph Bozzi, cousin du député Jean Bozzi, il préconisait le recours à l'amiral Philippe de Gaulle comme seul héritier possible du gaullisme. Son influence demeura néanmoins très faible. Philippe de Gaulle est élu sénateur à Paris le 28 septembre 1986 puis réélu le 24 septembre 1995. En 2006, il devient membre du comité d'honneur du Mouvement initiative et liberté.
Le 30 décembre 1947, Philippe de Gaulle épouse à Poncin (Ain) Henriette de Montalembert de Cers (née le 1er janvier 1929 et morte le 22 juin 2014), filleule du comte de Paris. Le mariage religieux est béni par l'amiral Georges Thierry d'Argenlieu (en religion : père Louis de la Trinité, carme déchaux) en la chapelle du Château d'Épierre (Ain) à Cerdon le 31 décembre 1947. Son épouse appartient à la famille de Montalembert. L'amiral de Gaulle dit d'elle : "Elle est le contraire de ces femmes sophistiquées et artificielles dont le genre ne me séduit guère".
Le couple a eu quatre fils :
Philippe de Gaulle est l'auteur de Mémoires accessoires (2001) et d'un ouvrage intitulé De Gaulle, mon père, publiés sous la forme d'entretiens avec l'écrivain Michel Tauriac. Cet ouvrage, qui a obtenu un succès en librairie et bénéficié d'une couverture médiatique, est sujet à de nombreuses controverses, notamment en ce qui concerne la guerre d'Algérie. Philippe de Gaulle a ainsi été condamné le 23 mars 2006 par la cour d'appel de Montpellier à verser un euro de dommages et intérêts ainsi que 1 500 € de frais de justice à chacun des trois harkis plaignants, pour « diffamation envers des agents de l'autorité publique ». Il avait en effet écrit : "Et puis, tout le monde ne voulait pas partir comme ces 100 000 harkis qui ont rejoint l'armée algérienne".
La cour a estimé qu'il insinuait par là que les harkis assassinés étaient morts par leur propre faute ou leur erreur de choix. Dans un arrêt du 29 janvier 2008, la Cour de cassation a annulé cette condamnation au motif que « les propos en cause ne visaient pas des personnes formant un groupe suffisamment restreint pour qu'un soupçon plane sur chacun de ses membres et leur donne le droit de demander réparation du préjudice résultant de l'infraction dénoncée ». D'autres passages ont été également dénoncés, tel celui attribuant les événements de Mai 68 à l'action occulte de services secrets étrangers. Lorsqu'il évoque les propos de son père sur le peuple juif, on a pu noter qu'il n'emploie pas une seule fois le terme de génocide. Quant à certains défenseurs de la mémoire du maréchal Pétain ou du général Giraud, dont le petit-fils de ce dernier Henri-Christian Giraud, ils ont évidemment peu goûté les propos sévères de Philippe de Gaulle sur Pétain qui a plongé la France dans la collaboration active avec l'Occupant, sur le régime de Vichy ou sur Giraud, qui fut un temps le rival de son père.
Certains historiens ont également été critiques à son égard. Pierre Nora par exemple, a écrit que l'amiral avait « maréchalisé » et « pétainisé » le Général. Il a fait relever par Jean Lacouture et Éric Roussel les grossières erreurs factuelles commises par Philippe de Gaulle. Néanmoins, l'ouvrage De Gaulle, mon père reste une source d'informations de première main sur le Général, dans sa vie privée et dans sa vie politique. L'amiral relate les entretiens qu'il a eus avec son père tout au long de sa vie, tant sur les actions que celui-ci a menées que sur les raisons de ses prises de décisions. L'intérêt de ces entretiens entre père et fils est que, pour chacun d'eux, Philippe de Gaulle en retrace les lieux, les dates et les circonstances, souvent par rapport à ses permissions militaires ou ses congés, ne rencontrant généralement son père que quelques fois par an.
L'amiral a également été longtemps critiqué pour son refus d'ouvrir les archives de son père (à la disposition du public depuis peu). On peut y voir une certaine pudeur du fils envers son père qui n'aurait certainement pas voulu que fût livrée au public la totalité de ses archives telles que des brouillons de discours, les fréquentes notes de réflexion pesant le pour et le contre avant une prise de décision, ainsi que des documents d'ordre privé tels des actes notariés, de la correspondance privée. Il publia les Lettres, Notes et Carnets de Charles de Gaulle en 13 tomes entre 1980 et 1997.
Le général de Gaulle n'a jamais fait son fils compagnon de la Libération, sans doute par refus de prêter le flanc à d'éventuelles accusations de népotisme. Pourtant, de l'avis de certains gaullistes et compagnons, Philippe de Gaulle n'aurait pas été le dernier à mériter cette distinction suprême, étant donné son engagement immédiat dans la France libre et ses états de services dans l'armée pendant cinq ans, souvent en première ligne. Philippe de Gaulle ne se vit pourtant même pas remettre la médaille de la Résistance, son père lui ayant dit incidemment qu'au comité chargé de l'attribution de cette distinction : "on ne t'a pas proposé".