Carbone Paul Bonnaventure
Paul Carbone (Paul Bonnaventure Carbone), surnommé Venture, né à midi le 15 février 1894 à Propriano, en Corse, et mort le 16 décembre 1943 à Chalon-sur-Saône, est un criminel corse impliqué dans le milieu corso-marseillais de 1920 jusqu'à sa mort en 1943. Il est le premier parrain scellant le crime organisé avec le monde politique. Associé à François Spirito qui va devenir un des leaders de la French Connection, la vie de Carbone inspire le film Borsalino avec dans les rôles principaux Alain Delon et Jean-Paul Belmondo.
Jeunesse
Paul Carbone naît à Propriano en Corse en 1894. Il est le descendant de la nourrice de Napoléon, Illéria Carbone. Carbone grandit à Marseille dans le quartier populaire du Panier où il devient un turbulent chef de bande. À l'école, il est bon élève. À l'âge de 12 ans, son père meurt et il doit quitter l'école pour aider sa mère et ses deux plus jeunes frères. Il prend n'importe quel travail pouvant l'aider à supporter financièrement sa famille. À l'âge de 15 ans, il part à Alexandrie en Égypte où il se lance dans le proxénétisme. La plupart de l'argent qu'il gagne est envoyé à sa mère en France. Son succès attise les convoitises de proxénètes rivaux. En 1913, trois proxénètes kidnappent Carbone, l'emmènent dans le désert et l'enterrent dans le sable jusqu'au cou.
Il est sauvé trois jours plus tard par François Spirito qui avait entendu les trois proxénètes se vanter de leur forfait dans un bar. Spirito est un sicilien immigré très jeune à Marseille. Entre les deux hommes se lie une solide amitié et ils deviennent partenaires en affaires. Spirito est aussi un proxénète. Avec Carbone, il monte un mini-empire basé sur la prostitution faisant venir les femmes de Paris pour les faire travailler dans les bordels égyptiens, le Caire étant une plaque tournante de la traite des blanches. Puis ils prennent des parts dans des maisons closes de Marseille avec d'autres corses, mais aussi à Paris où il est ami avec le préfet de police, Jean Chiappe, d'origine corse.
Après s'être rétabli de sa mésaventure, Carbone veut quitter l'Égypte. Carbone s'engage avec Spirito dans la compagnie des messageries maritimes et sillonne les mers du monde entier. Les corses ont constitué l'armature de l'administration coloniale française. On retrouve des corses en Indochine, en Afrique du Nord et dans toute la sphère d'influence française. Carbone et Spirito se rendent à Shangaï et trafiquent l'opium ; ils nouent des contacts dans tous les comptoirs où est implantée la diaspora corse jusqu'à ce qu'éclate la Première Guerre Mondiale. À ce moment, le duo retourne en France et s'engage dans la guerre. Carbone est envoyé en 1ère ligne sur le Chemin des Dames. Après avoir été arrêté pour coups et blessures, il est envoyé aux Bat' D'Af, un bataillon disciplinaire situé en Algérie où se côtoie l'élite de la voyoucratie. Durant la guerre, sur le front de l'Ouest, il se lie d'amitié dans les tranchées avec Simon Sabiani, futur premier adjoint au maire de Marseille, lui-aussi mobilisé. À la fin de la guerre, il est décoré d'une médaille pour sa bravoure au combat.
Entre Deux-Guerres
Après la fin de la guerre, Carbone et Spirito partent pour l’Amérique du Sud. Au Pérou, il se lancent dans le proxénétisme et font travailler 20 femmes. Le duo retourne à Marseille en 1919 où il se lance dans le proxénétisme et le trafic d'opium. Pendant 20 ans, Paul Carbone, épaulé de Spirito, est l'homme fort de Marseille. À la fin des années 1920, il se lie à des politiques, exploite de nombreuses maisons closes, pratique la traite des blanches, rackette à tour de bras sur toute la côte et pratique toutes sortes de trafics. Les deux hommes sont impliqués dans le trafic de drogue, spécialement l'héroïne et la cocaïne. Ils créent un laboratoire de transformation d'opium en provenance de Turquie, d'Égypte et d'Indochine à Bandol, près de Marseille. Après transformation, l'héroïne est envoyée aux États-Unis au réseau de Lucky Luciano. C'est les bases de la French Connection. Ils possèdent un bar rue Pavillon, le bar Amical et le restaurant Beauvau, rue Beauvau. Ils dirigent leurs empires depuis ces établissements. À Marseille, ils possèdent plus de 25 bordels, la plupart occupés par des jeunes femmes juives forcées à la prostitution. Carbone possède aussi des réseaux de prostitution en Argentine, Égypte et Espagne.
Bien que l’absinthe produite par Pernod Fils soit bannie du territoire français en 1914, Carbone en importe clandestinement d'une distillerie de Tarragone en Espagne. En 1936 où la France décide des sanctions économiques sur les produits italiens pour sanctionner l'État fasciste après l'invasion de l'Éthiopie, Carbone passe en contrebande 34 tonnes de fromage Parmigiano Reggiano à destination de la population italienne de Marseille. Durant la guerre civile espagnole, Carbone vend des armes aux supporters de Franco. À Paris, le caïd marseillais est tout aussi connu, possédant de nombreux intérêts dans plusieurs établissements, Joseph Marini, le préfet de police, est un ami de Carbone. Ils ont d'abord installé un bordel haut de gamme à Montmartre. À cette époque, tous les bordels de Paris étaient contrôlés par un Italien obèse, Charles Codebo. Carbone et Spirito ont mis la main sur ses affaires. Avec l'argent gagné à Paris, ils ouvrent des maisons closes dans toute la France, avec des femmes en provenance d'Europe et d'Amérique du Sud.
Dans l'entre-deux-guerres, Carbone et Spirito font alliance avec Simon Sabiani, ancien communiste devenu premier adjoint au maire de Marseille, proche des fascistes et originaire de Corse. Carbone et Spirito agissent comme hommes de main pour les campagnes politiques de Sabiani, en contrepartie, ils reçoivent une protection politique. Après les émeutes du 6 février 1934, les hommes de Carbone sont lancés contre les dockers en grève sur le port de Marseille. En avril 1934, ils sont mêlés à l'affaire Prince, du nom de ce conseiller à la cour d'appel chargé de dossiers sur l'affaire Stavisky, dépouillé des documents dont il dispose et assassiné. Les deux hommes produisent des alibis solides et sont remis en liberté à la fin du mois. L'accueil triomphal que les partisans de Sabiani réservent à Carbone, lors de son retour à Marseille, fait sensation.
Carbone touchait à tout : en 1938, enchanté de découvrir la chasse sous-marine alors encore embryonnaire, il s'érige en « protecteur » des premiers chasseurs sous-marins de Provence en intimidant les pêcheurs professionnels qui, craignant cette nouvelle concurrence, tentaient d'interdire l'accès de leurs coins aux chasseurs. Pendant la guerre, pour pouvoir continuer leurs « affaires », les deux hommes se rangent du côté du pouvoir et aident la Gestapo pendant l'occupation de la « zone libre » (novembre 1942/août 1944). Le romancier et scénariste Carlo Rim qui le rencontre en 1935 à Marseille, le décrit ainsi : "À travers ses lunettes vertes, Venture ne me quitte pas des yeux. Rivée jusqu'aux maxillaires dans des épaules de gorille, sa tête grêlée, largement fendue par une bouche immense frangée de cicatrices, serait effrayante sans ce sourire presque angélique qui tout d'un coup l'éclaire et la transfigure. Sous sa chemise Lacoste de soie prune qui lui colle à la peau, ses muscles de mirmillon se contractent au moindre geste."
Seconde Guerre Mondiale
Durant la seconde guerre mondiale, Carbone et Spirito rejoignent la Carlingue qui collaborent avec l'occupant allemand. En contrepartie de leurs collaborations, les autorités locales doivent ignorer leurs activités criminelles sur Marseille. Ils profitent du marché noir en fournissant des denrées aux allemands.
Mort
Paul Carbone meurt le 16 décembre 1943 dans un sabotage de la Résistance qui, visant les soldats allemands en permission, fait dérailler le train à bord duquel il voyageait et le fait exploser. Selon sa légende, Paul Carbone, les jambes sectionnées, aurait alors dit aux secouristes : « Moi, c'est foutu, occupez-vous de ceux qui peuvent être sauvés ». Il agonise pendant des heures avant de mourir d'exsanguination, une cigarette à la bouche, en disant : « C'est la vie… ». Mais sa maîtresse, Germaine Germain, mieux connue sous le surnom de "Manouche", rapporte qu'il a été amené à un hôpital local où il serait mort quelques heures plus tard. À la Libération, son associé François Spirito s'enfuit en Espagne puis en Amérique du Sud où il se livre au trafic d'héroïne jusqu'aux années 1960, se plaçant en tête des trafiquants internationaux.
Vie privée
Carbone aurait eu un fils, François, avec sa maîtresse Germaine Germain dite "Manouche". François serait homosexuel et, selon Gérard Fauré, aurait pris des photos de lui faisant l'amour avec le chanteur Johnny Hallyday. Il se serait servi des clichés pour faire du chantage en le menaçant de les divulguer pour soutirer de l'argent à Hallyday.