Staline Joseph
Joseph Staline, né le 18 décembre 1878 à Gori (Empire russe, actuelle Géorgie) et mort le 5 mars 1953 à Moscou, est un révolutionnaire bolchevik et homme d'État soviétique d'origine géorgienne. Il dirige l'Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) à partir de la fin des années 1920 jusqu'à sa mort en établissant un régime de dictature personnelle absolue. Les historiens le jugent responsable, à des degrés divers, de la mort de trois à plus de vingt millions de personnes. Né Iossif Vissarionovitch Djougachvili, surnommé Sosso (diminutif de Iossif ou de Iosseb) pendant son enfance, il se fait ensuite appeler Koba (d'après un héros populaire géorgien) par ses amis proches et dans ses premières années de militantisme clandestin au sein du Parti ouvrier social-démocrate de Russie (POSDR), auquel il adhère en 1898. Il utilise ensuite le pseudonyme de Staline, formé sur le mot russe сталь (stal), qui signifie acier. Acteur marginal de la révolution d’Octobre, il étend peu à peu son influence politique pendant la guerre civile russe, tissant des liens étroits avec la police politique, la Tcheka, et devenant, en 1922, secrétaire général du Comité central du Parti communiste. Après la mort de Lénine en 1924, il mène un jeu patient d'intrigues souterraines et d'alliances successives avec les diverses factions du Parti, et supplante un à un ses rivaux politiques, contraints à l’exil ou évincés des instances dirigeantes.
S'appuyant sur la bureaucratisation croissante du régime et la toute-puissance de l’appareil policier, la Guépéou puis le NKVD, il impose progressivement un pouvoir personnel absolu et transforme l'URSS en un État totalitaire. Le culte de la personnalité construit autour de sa personne, le secret systématiquement entretenu autour de ses faits et gestes, le travestissement de la réalité par le recours incessant à la propagande, la falsification du passé, la dénonciation délirante de complots, de saboteurs et de traîtres, l’organisation de procès truqués, la liquidation physique d’adversaires politiques ou de personnalités tombées en disgrâce sont des caractéristiques permanentes de son régime. Il procède à la nationalisation intégrale des terres, décrétant la « liquidation des koulaks en tant que classe », et industrialise l'Union soviétique à marche forcée par des plans quinquennaux ambitieux, au prix d'un coût humain et social exorbitant. Son long règne est marqué par un régime de terreur et de délation paroxystiques et par la mise à mort ou l'envoi aux camps de travail du Goulag de millions de personnes, notamment au cours de la « collectivisation » des campagnes et des Grandes Purges de 1937. Il pratique aussi bien des déplacements de population massifs, dont la déportation intégrale d'une quinzaine de minorités nationales, que la sédentarisation forcée non moins désastreuse de nomades d'Asie centrale. Il nie aussi l'existence des famines meurtrières de 1932-1933 (Holodomor) et de 1946-1947 après les avoir en partie provoquées par une politique impitoyable de réquisitions forcées de produits agricoles dans les campagnes.
Dans un contexte international de plus en plus tendu par la montée en puissance de l'Allemagne hitlérienne, Staline engage l'Union soviétique dans des négociations avec le régime nazi qui aboutissent, en août 1939, à la signature du pacte germano-soviétique, prélude au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. La coopération économique entre les deux pays entreprise après la signature des accords commerciaux germano-soviétiques est brutalement interrompue par l'invasion allemande de juin 1941, précipitant l'Union soviétique dans la guerre aux côtés des Alliés. La victoire militaire finale dans un conflit qui a mis l'URSS au bord du gouffre et dont la bataille de Stalingrad est un tournant majeur confère à Staline un prestige international retentissant et lui permet d'affirmer son emprise sur un empire s'étendant de la frontière occidentale de la RDA à l'océan Pacifique. Joseph Staline est également l'auteur de textes exposant ses conceptions du marxisme et du léninisme, qui contribuent à fixer pour des décennies, au sein des courants communistes liés à l'URSS, l'orthodoxie marxiste-léniniste. Sa pratique politique et ses conceptions idéologiques sont désignées sous le terme de stalinisme. Après la mort de Staline, ces pratiques sont dénoncées par Nikita Khrouchtchev au cours du XXe congrès du Parti communiste de l'Union soviétique de 1956 : la déstalinisation et la relative détente qui s'ensuivent n'entraînent cependant aucune démocratisation du bloc de l'Est. Ce n'est qu'à l'époque de la perestroïka mise en place par Mikhaïl Gorbatchev que les crimes de Staline peuvent être dénoncés en URSS dans toute leur ampleur.
La formation d'un révolutionnaire professionnel (1879-1917)
Iossif Vissarionovitch Djougachvili est né à Gori, à l’époque gros bourg de Géorgie. Son père, Vissarion, est un pauvre cordonnier, qui va marquer profondément l'enfance de Iossif par sa brutalité. Les difficultés financières amènent Vissarion Djougatchvili à quitter Gori pour aller travailler dans une usine de chaussures à Tiflis (actuelle Tbilissi), la capitale de la Géorgie. À sa mort, son fils n'avait que onze ans. Sa mère, Ekaterina, une ancienne serve, travaille durement, en faisant des lessives chez des employeurs, pour lui assurer des études.
Après avoir fréquenté l'école orthodoxe de Gori, Iossif est admis en 1894 au séminaire orthodoxe de Tiflis – seule façon pour un jeune homme pauvre de pouvoir continuer des études. Il y reste cinq ans avant d'en être expulsé. On sait peu de chose sur ses études. Il régnait une discipline sévère dans cet établissement, qui était aussi un lieu de fermentation politique. La Géorgie est alors une possession russe, et il y existe un mouvement national d'opposition à la domination des tsars ; en outre, les idées révolutionnaires ont pénétré le pays. En 1886, le principal du séminaire a été tué par un étudiant exclu, et, en 1893, peu de temps avant l'entrée de Iossif Djougachvili, une grève des séminaristes a contraint les autorités à fermer quelque temps l'établissement.
Dans une telle atmosphère, Djougatchvili fait un apprentissage plus révolutionnaire que religieux. En 1895, il publie dans la revue nationaliste Iberya un poème patriotique sous la signature de Sosselo (le « petit Jojo »). Ses lectures deviennent « subversives » : c'est ainsi qu'il est mis au cachot pour avoir lu les Travailleurs de la mer de Victor Hugo. En 1898, il adhère à un cercle clandestin nationaliste, Messame-Dassi (le « troisième groupe »), où dominent les idées socialistes, et il est chargé d'organiser des cercles d'études pour les ouvriers. La même année, dans un rapport, le directeur du séminaire écrit : « Djougatchvili est généralement irrespectueux et grossier envers les autorités. » En mai 1899, le jeune homme est exclu du séminaire.
Le militant révolutionnaire (1899-1917)
Dès lors commence pour Iossif Djougatchvili la vie difficile du militant révolutionnaire. Il vit en donnant des leçons, puis travaille à l'observatoire de Tiflis tout en militant activement et en lisant avec passion les ouvrages socialistes, ceux de Marx en premier lieu. En 1901, il bascule dans la clandestinité : il y vivra, à quelques exceptions près, jusqu'au début de la révolution, qui marque la chute du tsarisme (mars 1917). À la fin de l'année 1901, il part pour Batoumi, important port industriel à la frontière turque. C'est là qu'il prend son premier surnom, Koba (« l'Indomptable », nom turc d'un héros populaire géorgien). En avril 1902, il est arrêté : c'est sa première incarcération, mais non la dernière. Il restera en prison un an, sera ensuite condamné à trois ans de déportation en Sibérie orientale, mais s'évadera en janvier 1904. Dans l'intervalle, il a participé, en septembre 1901, à la création d'un journal clandestin en géorgien Brdzola (la Lutte). Il se sépare alors du groupe nationaliste Messame-Dassi. À partir de 1903, il défend les thèses des bolcheviks au sein du Parti ouvrier social-démocrate de Russie (POSDR), auquel il va désormais attacher ses pas.
À la suite de la guerre russo-japonaise et des défaites russes de l'année 1904, la révolution gronde en Russie. Grèves et manifestations ont lieu dans tout l'Empire et sont particulièrement importantes dans les régions caucasiennes, où milite Koba-Djougatchvili. Celui-ci participe même à la création d'une organisation militaire destinée à préparer l'insurrection. Toujours dans la clandestinité, Koba prend une part active à la révolution de 1905. Il est élu délégué à la conférence nationale du parti bolchevik qui se tient à Tammerfors, en Finlande (alors occupée par les Russes). C'est sa première sortie hors du Caucase et sa première rencontre avec Lénine. En avril 1906, Koba se rend à Stockholm au IVe Congrès du POSDR. En 1907, il est à Londres pour participer au Ve Congrès du parti. Son rôle politique est déjà important.
Après Londres, Koba gagne Bakou dont il fait, avec Stepan Chaoumian (le « Lénine du Caucase »), le centre des activités bolcheviques dans la région. Dans ce grand centre pétrolier, son activité est considérable auprès des ouvriers du pétrole, parmi lesquels se côtoient plusieurs nationalités : Azerbaïdjanais, Géorgiens, Arméniens et Russes. En même temps, il participe à la direction de brigades chargées d'organiser des attaques contre les banques et les transferts d'argent. Ces « expropriations » seront nombreuses dans le Caucase (la plus importante aura lieu à Tbilissi et servira, pour une large part, à alimenter les caisses du groupe bolchevik). Cependant, Koba se heurte à Chaoumian et cherche à l'évincer, au point que ses camarades le soupçonnent de l'avoir dénoncé à la police – dès cette époque, le caractère du futur Staline est marqué par sa brutalité.
En mars 1908, Koba est de nouveau emprisonné et déporté ; il s'évade en juin 1909 et reprend sa place à la direction clandestine du comité de Bakou. Réarrêté en mars 1910, il s'évade encore en février 1912. Il n'a pas pu participer au congrès de Prague (janvier 1912), au cours duquel est consommée la scission du POSDR entre un parti menchevik (« minoritaire ») réformiste et un parti bolchevik (« majoritaire ») révolutionnaire. Koba est coopté au Comité central bolchevik et devient un de ses principaux dirigeants de l'intérieur. En avril 1912, il est à Saint-Pétersbourg, capitale de l'Empire tsariste, où il participe à la création du journal Pravda (la Vérité).
C'est lui qui en signe le premier éditorial. Il est arrêté une fois encore et déporté en Sibérie occidentale, d'où il s'évade une nouvelle fois. Après un séjour en exil à Cracovie (alors en territoire autrichien), puis à Vienne, Koba prend le risque de revenir à Saint-Pétersbourg, mais est arrêté huit jours après (février 1913) sur dénonciation de Malinovski, député bolchevik et agent de l'Okhrana, la police politique du tsar. Déporté dans le nord de la Sibérie, étroitement surveillé, il reste quatre ans dans cette région au climat pénible et éloignée de tout. C'est la révolution qui éclate en février-mars 1917 qui va le libérer.
Pendant son séjour à Cracovie, où Lénine l'a appelé, en novembre 1912, à venir travailler auprès de lui, il rédige, à sa demande, plusieurs articles sur les problèmes nationaux. C'est au bas d'un article sur « le Marxisme et la question nationale » qu'apparaît pour la première fois la signature Staline (« l'homme d'acier »). Dans cet article, tout en défendant le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, il présente une vision très centraliste du problème des nationalités dans l'Empire russe. Surtout, Staline donne une définition restrictive de la nation, qui, selon lui, ne peut exister sans territoire. S'y esquisse déjà la politique impérialiste qu'il mettra en application, une fois parvenu au pouvoir.
La montée de Staline vers le pouvoir (1917-1928)
À partir de 1917, l'histoire de Staline se confond avec celle de la révolution et de l'Union soviétique.
Devant le succès du mouvement révolutionnaire à Petrograd (nouveau nom de Saint-Pétersbourg, débaptisée en 1914 après l'entrée en guerre contre l'Allemagne) et son extension en province, le tsar Nicolas II a abdiqué le 15 (le 2, selon l'ancienne datation) mars 1917. Un Gouvernement provisoire s'est formé, dirigé par le prince Gueorgui Lvov. La bourgeoisie gouverne, mais doit composer avec le soviet de Petrograd, dirigé par les mencheviks, les bolcheviks et les S-R (socialistes-révolutionnaires, non marxistes).
C'est le 25 mars 1917 que Staline, de retour de déportation revient à Petrograd. En l'absence de Lénine – encore en Suisse –, il joue un rôle important dans la direction du parti bolchevik, en particulier à la Pravda. Tout en combattant les positions de la droite du parti bolchevik – représentée par Kamenev, favorable à un « soutien critique » du Gouvernement provisoire et proche des mencheviks –, il critique la gauche du parti, qui, avec Molotov, exige la rupture complète avec le Gouvernement provisoire. Cette attitude centriste de Staline est vivement critiquée par Lénine dès son retour de Suisse le 16 avril. Lénine considère qu'il faut combattre vigoureusement la politique du Gouvernement provisoire, dirigée par la bourgeoisie et soutenue par le soviet de Petrograd et les mencheviks. Pendant ce temps, la guerre continue, et le Gouvernement provisoire se refuse à toute réforme importante. Après quelques hésitations, Staline se rallie aux thèses de Lénine ; il est élu au Comité central du parti lors de la septième conférence panrusse, où il défend la résolution proposée par Lénine. De mai à novembre 1917, il soutient Lénine sans défaillance et joue un rôle essentiel dans l'organisation du parti bolchevik, en même temps qu'il s'affirme comme un spécialiste du problème des nationalités.
Quand Lénine doit replonger dans la clandestinité à la fin de juillet 1917, après une tentative de prise de pouvoir par l'aile avancée des militants ouvriers, marins et soldats (que le parti bolchevik a d'ailleurs désavouée), c'est Staline qui dirige le parti, de nombreux leaders, Kamenev et Trotski, entre autres, ayant été arrêtés et emprisonnés. Malgré la répression, l'influence bolchevik se développe rapidement chez les ouvriers, dans l'armée et même chez les paysans, pourtant davantage tournés vers les S-R. Le Gouvernement provisoire, dirigé depuis le 6 août par Aleksandr Kerenski, se refuse à mettre fin à la participation de la Russie à la guerre et mécontente une opinion de plus en plus sensible au mot d'ordre de paix. En septembre 1917, le commandant en chef de l'armée, le général Lavr Kornilov, tente avec la complicité du Gouvernement provisoire un coup d'État destiné à instaurer une dictature militaire pour contrer l'ascension des bolcheviks. Ceux-ci organisent la lutte contre Kornilov et font échouer le putsch. En même temps, ils deviennent majoritaires aux soviets de Petrograd et de Moscou, ainsi que dans un grand nombre de soviets de villes et de régiments.
C'est alors que Lénine, toujours dans la clandestinité, propose de préparer une insurrection pour éliminer le Gouvernement provisoire, complice du putsch militaire. Il faudra près d'un mois au Comité central du parti bolchevik pour se décider : c'est chose faite le 23 (10) octobre 1917. Pendant cette période, Staline est, avec Iakov Sverdlov et Trotski, un des plus solides soutiens de Lénine. Il ne joue pas cependant dans la préparation de l'insurrection un rôle majeur, pas aussi important du moins qu'il ne le prétendra par la suite, mais sans doute plus essentiel que ne le dira Trotski. Représentant du parti au Comité révolutionnaire du soviet de Petrograd et membre du Bureau politique (→ Politburo) du parti, organisme qui vient d'être créé au sein du Comité central, Staline est à Smolnyï (quartier général de l'insurrection) un des principaux relais du parti.
Staline pendant le « communisme de guerre »
Au lendemain de la révolution d'Octobre et la prise du pouvoir par les bolcheviks, lorsque le Conseil des commissaires du peuple (en fait le gouvernement) est constitué, Staline est nommé commissaire aux Nationalités. Ce poste peut apparaître comme secondaire. En réalité, il est délicat et crucial, car l'Empire russe que la révolution fait s'effondrer est une mosaïque de nationalités extrêmement diverses. Le nouveau pouvoir soviétique va, dès le 15 novembre, proclamer les droits des peuples de Russie :
- « égalité et souveraineté des peuples de Russie ;
- « droit des peuples de Russie de disposer d'eux-mêmes jusqu'à séparation et constitution d'un État indépendant ;
- « suppression de tous les privilèges nationaux ou religieux ;
- « libre développement des minorités nationales et groupes ethniques habitant le territoire russe. »
Ces principes posés, il reste à les appliquer, et ce n'est pas chose facile. Les puissances étrangères utilisent la situation pour renforcer leurs positions dans les anciennes colonies russes. Ici et là, les nationalistes de droite combattent les bolcheviks, souvent encore très faibles dans certaines régions périphériques de l'Est, dans le Caucase et même en Finlande. Enfin, la guerre civile menace de toutes parts, et le conflit continue avec l'Allemagne, qui, même après la signature du traité de Brest-Litovsk en mars 1918, poursuit ses opérations en Ukraine. Après l'armistice du 11 novembre 1918 (signé en l'absence de la Russie), Britanniques et Français relaient Allemands et Turcs contre la Russie soviétique.
Staline, dans la tâche qui lui est confiée, fait preuve de doigté et de diplomatie, du moins dans les premières années du nouveau régime. Sa position personnelle est forte, encore qu'obscure. Il est l'un des quatre membres de l'exécutif du Comité central désigné après la révolution (avec Lénine, Trotski et Sverdlov) ; il est également nommé représentant du parti bolchevik à l'exécutif du Conseil des commissaires du peuple (une sorte de cabinet restreint composé de trois bolcheviks, Lénine, Trotski et Staline, et deux S-R de gauche). C'est dire s'il est en fait, après Lénine et Trotski, l'un des premiers dirigeants de la Russie soviétique. Au moment des vives discussions qui opposent entre eux les dirigeants bolcheviks avant la signature du traité de Brest-Litovsk, Lénine est longtemps mis en minorité, mais Staline est un de ceux qui le soutiennent.
La guerre civile, cependant, s'étend et, dès l'été 1918, elle fait rage sur tout le territoire de l'ancien Empire tsariste entre les Rouges, les révolutionnaires, et les Blancs, partisans de l'ordre ancien. Comme tous les dirigeants bolcheviks, Staline se rend sur le front. À l'origine, il est chargé d'assurer le ravitaillement en blé de la capitale, et son quartier général se trouve sur la Volga, à Tsaritsyne, la future Stalingrad (rebaptisée ainsi en son honneur en 1925). En octobre-novembre 1919, les armées blanches, après de violents combats, subissent une défaite écrasante. Trotski, commissaire du peuple à la Guerre, et Staline se disputent les lauriers de la victoire.
Rappelé à Moscou avec les honneurs de la guerre, Staline repart à plusieurs reprises pour le front en 1919 contre le général Anton Denikine, puis en 1920 lors de la campagne de Pologne qui se termine par la défaite de l'Armée rouge (et Staline, qui en est le commissaire politique, en est rendu largement responsable par Trotski). C'est cependant au cours de cette période qu'il se constitue un groupe de fidèles, Caucasiens et Russes, qui l'accompagneront dans son ascension au pouvoir. Décoré de l'ordre du Drapeau rouge, Staline n'a, sans doute, pas la popularité de Trotski au lendemain de la guerre civile, mais il apparaît dans les cercles dirigeants bolcheviks comme un organisateur efficace. C'est pourquoi Lénine, tout en lui laissant le commissariat du peuple aux Nationalités, lui confie la direction de l'Inspection ouvrière et paysanne, un organisme de contrôle destiné à lutter contre la bureaucratie.
À l'héritage déjà lourd du tsarisme s'ajoute celui de la guerre. Vainqueurs, les bolcheviks se trouvent à la tête d'un pays ruiné et meurtri, après quatre ans de guerre étrangère et trois ans de guerre civile. Il y a eu au total, de 1914 à 1922, plus de 13 millions de victimes, dont 8 millions au cours de la terrible famine de l'hiver 1921-1922. L'industrie n'existe pratiquement plus, et l'agriculture est si ralentie qu'à peine la moitié des terres cultivées en 1913 sont ensemencées en 1921. La Russie soviétique, d'autre part, reste isolée. À ses frontières, les grandes puissances établissent un « cordon sanitaire » destiné à contenir le « péril bolchevik ». Proclamée le 30 décembre 1922, l'URSS n'est reconnue qu'en 1924 par la France et la Grande-Bretagne, en 1933 par les États-Unis. Un arrière-plan qu'on ne doit pas perdre de vue quand on étudie le rôle de Staline à partir de 1922.
De 1922 à 1928, alors que la nouvelle économie politique (NEP), lancée par Lénine, permet de reconstruire le pays pratiquement sans aide étrangère (les grands pays industriels boycottant l'Union soviétique pendant de longues années), au sommet de l'appareil du parti se livrent d'âpres luttes d'influence, dont Staline va sortir finalement vainqueur.
Le 3 avril 1922, après le XIe Congrès du parti, Staline est élu secrétaire général. C'est un poste relativement nouveau, à l'origine plutôt administratif. Les circonstances vont lui donner une importance grandissante. En effet, Lénine tombe gravement malade quelque temps après. Avant d'être écarté totalement des affaires par la maladie, il a eu le temps de juger avec sévérité l'action de Staline. Dans des notes rédigées en décembre 1922, considérées comme son testament, il a critiqué la conduite répressive de Staline en Géorgie et lui a reproché de ressusciter le chauvinisme russe et d'utiliser les méthodes autoritaires des tsars. « Le camarade Staline devenu secrétaire général a maintenant un énorme pouvoir entre les mains et je ne suis pas sûr qu'il sache toujours user de ce pouvoir avec assez de prudence. » « Staline est trop brutal », ajoute-t-il, et il propose de le remplacer au secrétariat général par un « homme plus patient, plus loyal, plus poli et plus attentionné envers les camarades […] ».
Néanmoins, Staline reste secrétaire général, et son autorité s'affirme au fil des ans. Jusqu'à la mort de Lénine, le 21 janvier 1924, les assauts contre Trotski de la « troïka » que Staline forme avec deux autres membres du Politburo – Zinoviev et Kamenev –, sont relativement modérés, d'autant que le pays est alors en crise. Staline se prononce contre la révolution permanente prônée par Trotski, il accuse ce dernier de mener une activité fractionnelle au sein du parti, d'avoir des vues économiques erronées, et critique ses Leçons d'Octobre parues en octobre 1924. Il parvient peu à peu à l'isoler, en envoyant ses partisans à l'étranger ou dans des régions reculées de l'URSS, ou en les démettant simplement de leurs fonctions. Trotski, condamné par une résolution du Comité central de janvier 1925, n'intervient pas en faveur de Kamenev et de Zinoviev, attaqués à leur tour par Staline lors du XIVe congrès du parti en décembre, mais il s'allie à eux l'année suivante. Cela n'empêche pas Staline de l'emporter : Trotski et Zinoviev sont exclus du parti le 15 novembre 1927, et leurs partisans le sont lors du XVe congrès du parti, un mois plus tard.
Tout en jouant à certains moments la modération, Staline met ses opposants dans la position d'« aventuristes », de destructeurs de la cohésion du parti, dont il se présente comme le seul garant. Son entreprise est facilitée par le fait que ses adversaires eux-mêmes renoncent à utiliser toutes les armes à leur disposition ; ainsi, Trotski et Nadejda Kroupskaïa, la veuve de Lénine, vont jusqu'à nier l'existence du « testament » de Lénine au nom de l'unité du parti. Staline sait aller jusqu'au bout de son point de vue et le parti bolchevik, compte tenu des nécessités du moment, serre les rangs derrière lui. La révolution, en effet, a échoué partout ailleurs qu'en Russie, et il semble peu probable qu'elle triomphe de sitôt. La construction du « socialisme dans un seul pays », option que défend Staline, s'impose dès lors comme un impératif, en opposition à l'internationalisme prôné par Lénine. Au-delà des querelles personnelles entre les « héritiers de Lénine » – Staline, Trotski, Kamenev, Boukharine, Zinoviev –, il y a des choix fondamentaux à faire. Staline les fait avec le plus de netteté, et sans hésiter à évincer brutalement ses opposants.
Staline maître de l'URSS (1928-1953)
À la fin de 1927, une fois Trotski, Zinoviev et Kamenev exclus du parti bolchevik, l'autorité de Staline est désormais incontestable. Staline domine le parti, et le parti domine les soviets et l'État. La construction du socialisme dans un seul pays devient le mot d'ordre du parti. Un parti unique mais qui reste faible malgré sa victoire, en raison même des conditions dans lesquelles il a triomphé. La Russie tsariste n'avait ni traditions ni structures démocratiques. La guerre civile a conduit les bolcheviks à répondre par la « terreur rouge » à la « terreur blanche ». La police politique (la Tcheka, devenue la Guépéou en 1922) a pris une importance démesurée. D'abord au service du parti et orientée vers la défense de la révolution, la « Commission extraordinaire » (Tcheka) à laquelle avait dû se résoudre Lénine est rapidement devenue une institution permanente, un appareil d'État – la dénomination GPU (Guépéou) en est révélatrice : Administration Politique d'État –, qui étend son contrôle jusque sur le parti. Depuis la révolution, le parti n'a cessé de croître : en 1929, ses effectifs sont trois fois plus nombreux qu'à la mort de Lénine, mais il ne compte pratiquement plus de vieux bolcheviks, sa base ouvrière se réduit au profit d'une couche de fonctionnaires, et le niveau intellectuel des nouveaux venus est aussi limité que leur expérience politique. Comme moyen de concrétiser le changement radical et rapide où s'engage Staline, le parti paraît inadéquat. Cela explique au moins en partie le glissement du système politique vers les forces de sécurité, dont Staline fait l'instrument de son volontarisme.
Fort des succès de la nouvelle économie politique (NEP), Staline engage alors l'Union soviétique sur la voie de l'industrialisation accélérée. L'URSS est en effet, en 1929, encore un pays rural pour les quatre cinquièmes, et la révolution, après avoir nationalisé les terres, les a distribuées aux paysans. Afin d'industrialiser rapidement, il faut, du fait de l'absence d'investissements étrangers, utiliser les capitaux d'origine rurale. Le drame, c'est que la collectivisation des terres, à la fois nécessité économique et donnée de principe de l'économie socialiste, va se faire dans la plus grande hâte et par des mesures violentes : en janvier 1930, Staline décrète « la liquidation des koulaks (paysans aisés) en tant que classe ». L'exode rural massif et la déstructuration de l'économie rurale se traduisent par une terrible famine qui, en 1932-1933, fait plusieurs millions de victimes, en Ukraine principalement.
La planification permet de concentrer les forces disponibles sur les secteurs décisifs de l'industrie lourde, mais cela ne peut se réaliser qu'au prix d'une mobilisation de toutes les énergies s’accompagnant d’une fuite en avant : les objectifs initiaux du premier plan quinquennal sont doublés, triplés, quintuplés suivant les branches. Assortie de la disparition de toute la sphère privée pour les individus, puis de l'embrigadement, voire de l'asservissement, des classes laborieuses, la course à la production se traduit aussi par les mouvements de « compétition socialiste » : « travailleurs de choc » à partir de 1929, puis stakhanovisme à partir de 1935.
L'économie socialiste fait des progrès sérieux – l'industrialisation sera une réalité en 1939 –, l'évolution culturelle est considérable et l'analphabétisme est éliminé chez les moins de quarante ans ; seule l'agriculture piétine, en raison de la collectivisation. En même temps, les méthodes de plus en plus autoritaires de Staline se heurtent à la résistance naissante de nombre de communistes, même si le monolithisme du parti est devenu total en 1933 après l'éviction de Boukharine (1929) et de l'« opposition de droite ». Pour imposer sa volonté transformatrice, Staline doit s'appuyer sur un appareil policier puissant et renforcer les institutions étatiques. Démasquant complots et réseaux de sabotage, réels ou imaginaires, il réorganise la police politique (la Guépéou est remplacée par le NKVD en 1934), qu'il confie à Guenrikh Iagoda, cadenasse tout l'appareil d'État et se débarrasse systématiquement de tous ceux qui critiquent ou pourraient critiquer sa politique.
L'assassinat en décembre 1934 de Kirov, secrétaire du parti à Leningrad (ex-Petrograd, débaptisé en 1924) et successeur potentiel du secrétaire général, ouvre une ère de terreur. Cent dix-sept exécutions capitales sont immédiatement ordonnées à la suite de cet attentat (en 1937, Staline « révèlera » que le principal assassin de Kirov était en fait Iagoda, l'un de ses plus proches collaborateurs et l'instrument de sa politique terroriste). Staline fait procéder à une vague de purges massives. Lors des procès de Moscou, de 1936 à 1938, sont jugés et condamnés la plupart des dirigeants de la révolution (des prototypes plus modestes de ces grands procès, visant des intellectuels et des mencheviks, avaient déjà été organisés au début des années 1930) ; l'épuration s'étend rapidement à des centaines de milliers de cadres administratifs, militaires, économiques et culturels. Sous le contrôle du NKVD, les camps de travail forcé se remplissent de millions de personnes, dont la plupart disparaissent dans ce qui sera plus tard connu sous le nom de Goulag.
Le stalinisme s'exprime également dans le culte du chef, dont les portraits et les statues sont omniprésents. Au XVIIe Congrès du parti, dit « des vainqueurs », en février 1934, Staline est devenu, dans la description de Kirov, « le plus grand homme de tous les temps et de tous les pays ». Cette vénération atteint son apogée en 1936 – année de l'adoption de la nouvelle Constitution soviétique, dite « stalinienne » –, puis lors des 60e et 70e anniversaire de Staline, en 1939 et 1949. Staline vit jusqu'en 1933 au Kremlin, dont il ne sort guère, sinon pour les cérémonies officielles sur la place Rouge. La plupart de ses compagnons de jeunesse et même ses amis de la révolution disparaissent tragiquement, dont un grand nombre sur son ordre. Le pouvoir suprême accentue le côté solitaire – et brutal – de sa personnalité. Une solitude que ne compense aucune vie familiale. Très jeune, Staline a épousé Ekaterina Svanidze, qui est morte en 1906 (leur fils deviendra général de l'Armée rouge). Après la révolution, il s'est remarié avec une très jeune fille, Nadejda Allilouïeva, qui se suicidera en 1932 dans des circonstances restées mystérieuses ; il fera fusiller par ailleurs deux de ses beaux-frères, et quatre de ses belles-sœurs seront déportées.
En 1939 commence la Seconde Guerre mondiale. L'Union soviétique reste neutre jusqu'en juin 1941 en vertu du pacte de non-agression avec l'Allemagne hitlérienne (août 1939). Les Occidentaux (France et Grande-Bretagne) ont refusé de signer avec l'URSS un accord militaire et économique face à l'Allemagne hitlérienne. À Munich, en septembre 1938, Français et Britanniques ont traité avec Hitler sans consulter l'URSS, tandis que les États-Unis restent neutres jusqu'en décembre 1941. Si, du point de vue soviétique, le pacte germano-soviétique se justifie – il faut gagner du temps –, on comprend mal, en revanche, que Staline ait pu être surpris par l'agression hitlérienne du 22 juin 1941, car le gouvernement soviétique a reçu des informations précises à ce sujet. Avec les difficultés de 1932-1933, dues aux conditions de la collectivisation des terres, les défaites qui suivent l'invasion allemande seront le plus grand échec de Staline. Pendant plus d'une semaine, il disparaît même de la scène politique.
Le 3 juillet 1941, Staline s'adresse cependant aux Soviétiques pour les appeler à la lutte contre l'envahisseur. Président du Conseil des commissaires du peuple depuis le 6 mai 1941 (où il remplace Molotov), il devient président du Comité d'État pour la défense, puis commandant en chef de l'Armée rouge (août), concentrant ainsi dans ses mains tous les pouvoirs civils et militaires. En octobre 1941, malgré la menace allemande, Staline décide de rester à Moscou. Le 6 novembre, il prononce, à la station de métro Maïakovski, un discours qui en appelle ouvertement aux sentiments patriotiques et, le lendemain, à l'occasion du 24e anniversaire de la révolution d'Octobre – alors les Allemands sont à moins de 100 km de la capitale –, il passe en revue les troupes sur la place Rouge.
Staline parvient à inspirer au peuple une véritable foi dans son infaillibilité, à dissiper les doutes et les rancoeurs des années précédentes ; se conciliant par des concessions l'Église orthodoxe et restaurant dans l'armée les valeurs traditionnelles, il mobilise la population au service de la « grande guerre patriotique ». Les succès militaires soviétiques, surtout après la terrible bataille de Stalingrad (février 1943) permettent au « petit père des peuples » adulé de ses concitoyens de s'attribuer une stature de grand chef militaire. En 1943 il se fait maréchal, en 1945 généralissime. Lorsque la Seconde Guerre mondiale s'achève, l'URSS, dont la participation à la victoire sur Hitler a été décisive, bénéficie d'un prestige énorme dans le monde, et Staline est au zénith de sa gloire. Son culte est célébré avec une intensité croissante tant en URSS que dans les démocraties populaires : érection de statues monumentales, diffusion d'une littérature dithyrambique, etc.
La victoire de l'URSS a été obtenue au prix de sacrifices immenses : plus de 20 millions de morts (700 000 rien que pour les victimes civiles de Leningrad) et près de la moitié du pays dévasté par les nazis.
Il faut donc reconstruire le pays, et cela demande du temps et de nouveaux sacrifices. Lors des conférences de Téhéran (nov.-déc. 1943), Yalta (février 1945) et Potsdam (juillet-août 1945), Staline a défendu avec habilité et ténacité les acquisitions de l'URSS, il a tenté de trouver un accord pour l'après-guerre avec ses alliés occidentaux britanniques et américains, mais l'URSS ne possède pas encore la bombe atomique (la première n'éclatera qu'en 1949). Il lui faut dépenser des sommes énormes pour rattraper son retard militaire, ce qui ne peut qu'entraver le développement économique. Pourtant, malgré la guerre froide (marquée par le blocus de Berlin et la guerre de Corée), l'URSS connaît un certain développement industriel et culturel après 1947. Les industries spatiale et nucléaire sont créées à cette époque ; cependant, les biens de consommation ne progressent pas aussi vite, et les difficultés agricoles sont considérables.
Après la victoire, Staline scelle la domination soviétique sur la majeure partie de l'Europe de l'Est. Subordonnant encore plus qu'auparavant toute visée internationaliste aux intérêts de l'URSS, il crée alors le Kominform (1947), qui impose aux partis communistes (notamment après la rupture avec la Yougoslavie de Tito en 1949) le soutien inconditionnel de la politique soviétique et l'adoption du dogmatisme diffusé par son collaborateur Jdanov. La dernière période voit Staline régner sans partage sur ce nouvel empire, dans un style ouvertement autocratique, et le congrès du parti n'est plus réuni avant 1952.
Vénéré à l'égal d'un dieu, Staline, qui a depuis longtemps l'obsession du complot, devient de plus en plus méfiant et soupçonneux. Ne gouvernant plus qu'avec une poignée de responsables (Jdanov, Malenkov, Beria, Boulganine, puis Khrouchtchev), il durcit de nouveau son emprise. Il écarte les militaires vainqueurs de la guerre, comme le maréchal Joukov, et s'apprête même à éliminer des collaborateurs proches ; les camps de travail forcé accueillent tous ceux qui doutent ou pourraient douter du « génie du chef ». Sur le plan idéologique, le régime devient de plus en plus nationaliste grand-russe et xénophobe, ce qui prend, entre autres, la forme d'une campagne contre le « cosmopolitisme » à partir de 1948.
En janvier 1953, l'« affaire des blouses blanches », prétendu complot de médecins juifs ayant soigné des membres du parti qui auraient empoisonné des dirigeants soviétiques et prévu d'en assassiner d'autres, donne le signal à la fois d'une vaste purge et d'une répression antisémite. Peut-être l'affaire est-elle fabriquée de toutes pièces, ou correspond-elle à une machination dirigée par Beria, qui se savait menacé par Staline dont il était pourtant l'exécuteur des basses œuvres, Khrouchtchev et Molotov qui cherchent à écarter Staline ?.
La mort du « petit père des peuples »
Depuis près de vingt ans, Staline vit solitaire dans une « datcha » près de Moscou, à Kountsevo. Il passe l'été sur les bords de la mer Noire, dans le Caucase et ne se montre jamais en public, sinon le 1er mai et le 7 novembre, lors des grands défilés sur la place Rouge. Dans la nuit du 1er mars 1953, dans sa datcha, Staline est victime d'une hémorragie cérébrale, dont il meurt le 5 mars 1953. Ce qui s'est exactement passé dans les heures qui précèdent et suivent cette attaque, et notamment le comportement des dirigeants du parti présents autour de lui comme Beria, demeure controversé. Embaumé, son cadavre est placé dans le mausolée de la place Rouge à Moscou, à côté de celui de Lénine, quelques mois après une cérémonie funèbre où des millions de personnes ont pleuré le « petit père des peuples », le vainqueur de Stalingrad.
Pourtant, dès l'année suivante, le nom de Staline commence à disparaître des journaux. En 1956, devant le XXe Congrès du parti communiste de l'URSS, le secrétaire général Khrouchtchev, dans une séance à huis clos, présente un rapport secret visant à démontrer que les succès obtenus par l'URSS sont dus pour l'essentiel au parti et non à son défunt dirigeant, dont le culte de la personnalité, les méthodes brutales et les erreurs stratégiques sont dénoncées. Il s'agit donc d'une mise en cause de Staline seul plus que du stalinisme et des méthodes qu'il a mises en œuvre : la déstalinisation amorcée lors du XXe Congrès est restée largement inachevée.
Staline : dates clés
21 décembre 1879 : Naissance à Gori (Georgie)
Joseph Vissarionovitch Djougachvili naît à Gori, en Géorgie. Son père et sa mère sont d’anciens serfs, émancipés lors de l’abolition du servage en 1861. La date de naissance de Staline est controversée depuis la découverte de son extrait de naissance, qui indique le 18 décembre 1878.
1889 : Mort de son père au cours d’une rixe
1894 : Staline entre au séminaire orthodoxe de Tiflis (Tbilissi)
1899 : Exclusion du séminaire
Staline est renvoyé du séminaire orthodoxe de Tiflis pour absentéisme. Il rejoint alors les militants socialistes et marxistes qu’il fréquente depuis un an pour militer. Beaucoup voient l’influence de ses études religieuses dans sa prose ponctuée de figure de style "messianiques".
Avril 1902 : Première arrestation
Staline est arrêté pour ses pratiques politiques. Il est alors condamné à l’exil en Sibérie pour trois ans. Il parvient à s’échapper en 1904.
1905 : Organise la grève de Bakou lors de la révolution de 1905
Décembre 1905 : Première rencontre avec Lénine
1907 : Mort de sa première femme Ekaterina Svanidze, dite "Kato"
Mars 1908 : Nouvelle arrestation
Envoyé à Vologda, il s’évade en juin 1909.
1910 : Staline à nouveau exilé
Il s’échappe durant l’été 1911.
5 janvier 1912 : Ouverture de la Conférence du POSDR de Prague
Au cours de la VIème conférence du Parti ouvrier social-démocrate de Russie, Staline entre au Comité central bolchevique.
Février 1913 : Staline est déporté à Touroukhansk
A nouveau arrêté, Staline est déporté dans une région reculée de la Sibérie, proche du cercle polaire. Mais contrairement aux fois précédentes, il ne peut s’évader. Il sera libéré lors de la révolution de février 1917.
Avril 1917 : Staline est élu au Comité central du parti bochevique
Depuis mars, Staline est également secrétaire de rédaction de la "Pravda".
Mars 1919 : Création du Politburo
Staline intègre le "Politburo" lors sa création. Le bureau politique est le principal organe décisionnel des bolcheviques.
3 avril 1922 : Staline Premier secrétaire du PC
Iossif Vissarionovitch Djougachvili, alias Joseph Staline, est élu secrétaire général du PC russe au cours du XIème Congrès du parti à Moscou. Ancien commissaire politique aux armées, Staline "l'homme de fer", est soutenu par Lénine. Mais le chef de l'URSS dira de lui quelques mois plus tard : "Je propose aux camarades de réfléchir au moyen de déplacer Staline de ce poste et de nommer à sa place un homme qui, sous tous les rapports, se distingue du camarade Staline par une supériorité, c'est-à-dire qu'il soit plus patient, plus loyal, plus poli et plus attentionné envers les camarades…". En 1929, cinq ans après la mort de Lénine, Staline deviendra le maître incontesté de la Russie. Il restera au pouvoir jusqu'en 1953.
1928 : Premier plan quinquennal
Staline supprime la Nouvelle politique économique (NEP) pour lancer le premier plan quinquennal, qui s’étale de 1928 à 1932. L’objectif est d’industrialiser rapidement l’URSS via une planification générale de l’économie. La croissance excédera les 20%, mais au prix de terribles efforts dans le monde paysan. Les kolkhozes, grandes coopératives d’Etat, remplacent les petites fermes, et la contestation paysanne engendre la déportation en masse des koulaks, les paysans riches.
7 avril 1930 : Création du Goulag
Les camps de travail, instaurés sous Lénine en 1917, deviennent dépendants d’une branche du NKVD, le Goulag. Le terme désigne une abréviation de Glavnoïe Oupravlenié Lagereï (Direction générale des camps). Staline pérennise ainsi un des instruments de la Terreur rouge et généralise son utilisation. Des millions de prisonniers passeront par ces camps, qui représentent une réserve massive de travailleurs. En effet, ces camps qui ne concernent même pas 100 000 personnes à la fin des années 1920 connaissent sous Staline une forte inflation de leur population : environ 2 millions de personnes y sont enfermées à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Ignoré pendant longtemps en Occident, le terme Goulag sera popularisé après la parution de l’ouvrage de Soljenitsyne "L'Archipel du Goulag".
1932 : L’Ukraine décimée par la famine
La politique de collectivisation et de dékoulakisation a des effets désastreux en Ukraine. L’URSS a en effet décidé de prélever plus de 40% des récoltes, ce qui provoque des manœuvres des paysans pour se soustraire à cette obligation. Face à cette situation, Staline réagit avec fermeté et fait déporter des milliers de paysans. Il s’ensuit une terrible famine qui provoque la mort de cinq à six millions de personnes entre 1932 et 1933. L’objectif de Staline est alors de réformer le système agricole ancestral et de briser les aspirations nationalistes ukrainiennes. En novembre 2006, l’Ukraine qualifiera cet événement de génocide. Il est désigné sous le nom d’Holodomor, "extermination par la faim".
1er décembre 1934 : Assassinat de Sergueï Kirov
Sergueï Kirov, membre du Politburo et figure politique de Leningrad, est assassiné à l’Institut Smolny. Le meurtre est commis par un certain Leonid Nikolaïev, jeune partisan. D’après les autorités, c'est également l’expression d’un complot trotskiste ou zinoviéviste contre le pouvoir. C’est en fait l’occasion pour Staline de lancer ses grandes purges. Un décret permet de régler de manière expéditive le sort des condamnés et autres "gardes blancs". Après le "Centre de Leningrad", plusieurs organisations seront démantelées tandis que Zinoviev sera arrêté. Ceci donnera lieu aux grands procès de 1936.
2 mai 1935 : Laval et Staline signent un pacte franco-soviétique
Le Français Laval signe avec Staline un pacte d’assistance mutuelle. Face à la montée du fascisme, les deux pays tentent de réactiver les liens privilégiés qu’ils avaient entre 1891 et 1917. Mais la France ratifie ce traité avec de grosses difficultés. Par ailleurs, ce traité n’inclut pas de convention militaire. De fait, il sera laissé de côté à cause du manque de conviction des deux partis. Finalement, la Russie se tournera vers l’Allemagne avec le pacte germano-soviétique de 1939.
31 août 1935 : L'exemplaire ouvrier Stakhanov
Dans la nuit du 30 au 31 août 1935, l'ouvrier Aleksei Stakhanov extrait 105 tonnes de charbon en 6 heures de travail de la mine Irmino du bassin houiller de la rivière Donets. La norme est alors fixée à 7 tonnes. La propagande de Staline encourage les Soviétiques à suivre son exemple. Des portraits de l'ouvrier modèle sont affichés dans toutes les entreprises du pays et des systèmes de récompenses sont organisés pour stimuler les travailleurs.
18 juin 1936 : Purges staliniennes, les procès de Moscou
Evénements symboliques des grandes purges staliniennes des années 1930, les procès de Moscou s’ouvre en URSS. Véritable mise en scène destinée à attiser la peur du complot, cette suite de procès permet de décimer l’avant-garde révolutionnaire de 1917. Presque tous les proches de Lénine seront exécutés à partir d’aveux irréalistes prononcés par les accusés. Lors du premier procès, dit des 16, Zinoviev et Kamenev sont deux des accusés. Ils sont censés avoir participé au meurtre de Kirov et à des "actes de sabotages" : le chef d’accusation est "contre-terrorisme trotsky-zinovievien". Le procès, expéditif, s’achève dès le 24. Les 16 accusés sont immédiatement exécutés.
23 janvier 1937 : Deuxième procès de Moscou
Outil majeur des purges staliniennes, le deuxième procès de Moscou, ou procès des 17, met en cause essentiellement des responsables économiques. En tout, quatre procès décimeront les élites russes afin d’asseoir le pouvoir de Staline. A chaque fois, les motifs invoqués tournent autour de trahison trotskyste et de sabotage. Ils donnent lieu à des aveux fantaisistes pour finir dans le sang des accusés. Le premier procès mettait en cause des hauts dirigeants politiques, ce qui sera également le cas du quatrième. Ceci permet à Staline d’exécuter trois responsables politiques majeurs : Zinoviev, Kamenev et Boukharine. Quant au troisième procès, il décimera la tête de l’Armée rouge. La plupart des accusés sont condamnés à mort et exécutés le 30 janvier.
12 juin 1937 : Les purges staliniennes
La campagne de purges lancée par Joseph Staline contre les prétendus trotskistes atteint le haut commandement de l'Armée rouge. Le maréchal Mikhaïl Toukhatchevski, ex-commissaire adjoint à la Défense soviétique, et huit autres officiers supérieurs, sont passés au peloton d'exécution. Entre 1936 et 1938, des millions de Soviétiques seront fusillés ou envoyés dans les goulags. Ce procès, accompagné de purges massives (remplacement de 80% des cadres de toutes les administrations), aura des conséquences désastreuses lors du début de la Seconde Guerre mondiale. Staline se prive en effet de ses meilleurs généraux.
2 mars 1938 : Le bloc des droitiers en accusation à Moscou
Accusés de déviations et de trahison droitière ou trotskyste, Boukharine, Kirov et 19 co-accusés sont mis en accusation lors du dernier procès de Moscou. Là encore, les accusations reposent sur les aveux incroyables des prévenus : tentative d’assassinat sur Staline, connivence avec l’ennemi, espionnage… Parmi les accusés figure aussi Guenrikh Iagoda, un des artisans de la Grande Purge.
23 août 1939 : Le pacte germano-soviétique
L'URSS et l'Allemagne signent à Moscou un pacte de non-agression valable pour 10 ans. Un protocole secret répartit leur zone d'influence en Europe de l'Est. Hitler, qui obtient ainsi la neutralité de l'URSS, déclarera la guerre à la Pologne le 1er septembre. Staline en profitera alors pour agresser la Finlande, annexer les pays baltes et envahir la Roumanie. Ce pacte sera rompu lorsque Hitler lancera une attaque contre l'URSS le 22 juin 1941.
17 septembre 1939 : Les Soviétiques entrent en Pologne
Une clause secrète du pacte germano-soviétique signé en août 1939 entre Hitler et Staline, permet aux deux puissances d'envahir l'une après l'autre la Pologne. Deux semaines après l'entrée des allemands à l'Ouest, les soviétiques passent la frontière à l'Est. Dès le mois d'octobre, les juifs sont enfermés dans des ghettos.
20 août 1940 : Assassinat de Trotski
Léon Trotski est assassiné dans sa maison de Coyoacán, près de Mexico. Après la mort de Lénine en 1924, le révolutionnaire bolchevik a été éliminé du pouvoir par le secrétaire du Parti communiste, Staline. Il s'exila en 1928 et continua son combat politique contre le régime stalinien. Il échappa à plusieurs attentats et se fit construire une maison fortifiée au Mexique. Mais un agent de Staline parvint à y pénétrer et à lui planter un pic à glace dans la tête.
6 mai 1941 : Staline devient chef du gouvernement soviétique
Staline remplace Molotov au poste de président du Conseil des commissaires du peuple, prenant ainsi pour la première fois une responsabilité officielle au sein de l'appareil d'état soviétique. Le secrétaire général du Parti communiste de l’URSS a su, depuis la mort de Lénine en 1924, éliminer ses rivaux et s'imposer comme seul maître de l'URSS. Il le restera jusqu'à sa mort en 1953.
22 juin 1941 : Opération "Barbarossa" en URSS
Les troupes allemandes pénètrent en Union Soviétique. Nom de l'opération : "Barbarossa". Pourtant alerté par ses services secrets, Staline ne s'attendait pas à ce qu'Hitler rompe le pacte de non-agression signé deux ans plus tôt. Bien qu'ennemi du bolchevisme, le Premier ministre britannique, Winston Churchill, apporte aussitôt son soutien à l'URSS. La Wehrmacht, d'abord victorieuse face à une Armée rouge démoralisée, sera arrêtée par l'hiver avant d'atteindre Moscou. Considérant les Slaves comme des sous-hommes et le communisme comme leur principal ennemi, les nazis mèneront en URSS une guerre bien plus cruelle qu’à l’ouest. Cette attitude jouera en leur défaveur, stimulant le patriotisme russe au sein de toute la population.
28 novembre 1943 : Conférence de Téhéran
Le premier ministre britannique Winston Churchill, et les présidents des Etats-Unis et d'URSS, Franklin Roosevelt et Joseph Staline, se rencontrent en Iran pour statuer sur le destin de l'Europe après la guerre. La France est exclue des négociations. Elle paie le prix de sa collaboration avec l'Allemagne. La Russie obtient la promesse des Etats-Unis d'un débarquement allié en France, alors que Churchill aurait préféré poursuivre l'offensive en Italie. Le projet américain est baptisé "opération Overlord". La date est fixée au mois de mai 1944. Les sorts de l'Allemagne et de la Pologne sont également évoqués, ainsi que la création d'une organisation mondiale de sécurité réunissant les 4 grands (future ONU) : Etats-Unis, Grande-Bretagne, URSS et Chine.
23 février 1944 : Staline saigne la Tchétchénie
Accusés de collaborer avec l'Allemagne, les tchétchènes sont déportés massivement sur ordre du numéro un soviétique. A l'aube, 300 000 personnes sont conduites de force vers le Kirghizstan et le Kazakhstan. Dans les jours qui suivent, plus de 500 000 autres subiront le même sort. Des milliers d'entre eux meurent de froid, de faim ou d'étouffement dans les wagons qui les transportent vers les camps de travail.
4 février 1945 : Ouverture de la conférence de Yalta
Alors que la guerre n'est pas encore terminée, Winston Churchill, Joseph Staline et Franklin Delano Roosevelt se rencontrent sur les bords de la mer Noire en Crimée, pour statuer sur le sort de l'Allemagne et du Japon après le conflit. Les Etats-Unis obtiennent l'appui de l'URSS pour vaincre définitivement les Japonais sur le front asiatique. Il est convenu que l'Allemagne sera démilitarisée et divisée en trois zones d'occupations (plus tard la France obtiendra elle aussi une zone). Enfin, les trois puissances se mettent d'accord pour laisser aux pays européens libérés le choix de leur destin. Mais dans la pratique, les territoires libérés par l’Armée rouge ne connaîtront pas d’élections libres (à l’exception de l'Autriche) et se verront imposer le communisme par Staline. C’est d’ailleurs une des causes du déclenchement de la Guerre froide.
17 juillet 1945 : Conférence de Postdam
Alors que la Deuxième Guerre mondiale n'est pas encore terminée, les représentants des États-Unis (Truman et Byrnes), de l'URSS (Staline et Molotov) et de la Grande-Bretagne (Churchill et Eden) se réunissent à Potsdam, au Sud-Ouest de Berlin, pour débattre du sort de l'Allemagne. La France n'est pas conviée. La conférence annonce le début de la "dénazification". Chaque puissance alliée aura sa zone d'occupation délimitée en Allemagne. Les trois pays se mettent également d'accord sur la formation d'un conseil des Cinq Grands (Chine, États-Unis, France, Royaume-Uni, URSS), chargé d'assurer la paix avec les anciens alliés du Reich. Ils posent ainsi les prémices de l’ONU.
2 août 1945 : Le sort de l'Allemagne réglé à Potsdam
La conférence de Postdam se clôt en ayant scellé le sort de l’Allemagne : celle-ci est séparée de l’Autriche, elle perd une partie de son territoire au profit de la Pologne et de l’URSS, et enfin, elle est découpée en trois zones d’occupation (la zone française sera décidée plus tard). La conférence a également été l’occasion de redessiner les frontières de la Pologne et de lancer un ultimatum au Japon. Alors que Roosevelt a annoncé à Staline que les Etats-Unis maîtrisent la bombe atomique et que des tensions commencent à apparaître au sujet de l’Europe centrale, Potsdam est le dernier lieu qui reçoit les trois Alliés. Bientôt, la Grande Alliance se disloquera pour laisser place à la Guerre froide.
24 juin 1948 : Début du blocus de Berlin
En riposte à la décision des Alliés de violer les accords de Postdam en fusionnant les zones d’occupation américaine, anglaise et française et en instaurant le Deutschemark, Staline décide d’établir un blocus autour de Berlin. Face à ce blocage, les occidentaux ne mettront que deux jours pour trouver une solution qui évite la guerre et dont l’efficacité, tant factuelle que symbolique, est garantie : il mettent en place un blocus aérien pour ravitailler la ville. Mais désormais, la rupture entre les deux blocs, et par conséquent entre les deux Allemagnes, semble entérinée. Même si le blocus dure moins d’un an, Berlin-Ouest revêt son statut d’enclave pour plus de quarante ans.
5 octobre 1952 : Ouverture du XIXème Congrès du Parti communiste
Le XIXème Congrès du Parti communiste s’ouvre à Moscou, plus de treize ans après le précédent. Six mois avant sa mort, Staline ne fait qu’une brève intervention. C’est pourtant lui qui dispose à présent de la majorité des pouvoirs qu’il a su concentrer et conserver pendant la guerre. D’ailleurs, ce Congrès n’est pas l’occasion de présenter de grandes ambitions pour l’avenir, sinon par le doublement des membres du Comité central et la suppression du Politburo au profit d’un praesidium.
3 décembre 1952 : Purges Staliniennes, le procès de Prague
A Prague, le procès spectaculaire de 14 hauts dirigeants du parti communiste tchécoslovaque se termine par la condamnation à mort de 11 d'entre eux. Les hommes sont accusés d'avoir comploté pour écarter le PC de Tchécoslovaquie. Durant le procès, les accusés sont forcés d'avouer des crimes politiques absurdes, leur chef Rudolf Slansky déclarant avoir lui-même organisé l'arrestation de ses collaborateurs. Les 14 prévenus, essentiellement des juifs, sont inculpés de trahison au profit d'Israël.
13 janvier 1953 : Complot des blouses blanches
C’est par l’intermédiaire de la Pravda que Staline annonce sa nouvelle purge. Le motif invoqué est à nouveau la suspicion de complot. Il touche des médecins du Kremlin, d’où le nom de "complot des blouses blanches". Suspecté de l’assassinat de Jdanov, ces derniers payent avant tout l’antisémitisme et l’anti-cosmopolitisme de Staline, qui ont déjà conduit au procès de Prague. Certainement prémices d’une nouvelle campagne de purge contre une grande conspiration imaginaire, ce complot sera désamorcé après la mort de Staline et ses accusés blanchis.
5 mars 1953 : Mort de Staline
A 21h50, Joseph Vissarionovich Djougachvili meurt dans sa datcha des environs de Moscou, victime d'une hémorragie cérébrale. Il a 73 ans. Appelé Staline, "l'homme d'acier" en russe, il a dirigé la Russie durant plus de 20 ans. A sa mort, toutes les organisations communistes du monde orchestrent des manifestations de deuil conformes au culte de la personnalité que Staline avait instauré. La communauté internationale rend hommage au vainqueur de Stalingrad, qui a libéré la Russie du nazisme durant la Seconde Guerre mondiale. Son "règne", symbolisé par des collectivisations massives et une période de répression sans précédent, aura des conséquences désastreuses sur la Russie et l'ensemble de ses dominions communistes.
24 février 1956 : Khrouchtchev dénonce les crimes staliniens
Lors du XXème Congrès du Parti communiste d'URSS, le Premier secrétaire Nikita Khrouchtchev brosse un bilan désastreux des années Staline (1941-1953). Pendant sept heures, il lira un rapport édifiant sur les "purges staliniennes", et remettra en cause les qualités militaires du "petit père des peuples". Ces accusations provoqueront la scission du PC d'URSS avec le PC chinois de Mao Tsé-toung, qui défendra la mémoire de Staline.