Aube dorée (XA)
Aube dorée (XA), ou, par son nom complet Association populaire – Aube dorée est un parti politique grec d'extrême droite, souvent classé comme néo-nazi par la presse.
Le parti en revanche ne s'est jamais défini ainsi et rejette explicitement cette appellation. Initialement nom d'une revue, le parti est dirigé par Nikólaos Michaloliákos qui le fonda en 1992. Réactivé en 2007, il fait son entrée au Parlement hellénique lors des législatives de mai 2012, et conserve sa délégation lors de celles de juin 2012. Son discours s'articule notamment autour de thèmes irrédentistes (Épire du Nord, Chypre, conflit de la mer Égée), toujours xénophobes, souverainistes, natalistes, partisans du « droit du sang », avec entre autres pour slogan « la Grèce aux Grecs ». Le parti fut membre du Front national européen. L’histoire de cette organisation débute en décembre 1980 avec la diffusion du premier numéro d’un petit magazine nommé Χρυσή Αυγ (Aube dorée), publié par de jeunes national-socialistes, des jeunes de l’ancienne organisation fasciste Parti du 4-Août et par Nikólaos Michaloliákos. La revue, quelques numéros portant le sous-titre Revue nationale-socialiste, publie des articles parlant entre autre de nazis comme, Magda Goebbels, Alfred Rosenberg, le juriste Roland Freisler, de néonazi comme Colin Jordan ou d’organisation liées au régime nazi comme les SS. Avec tout plein de photographies et d’images tirées du troisième Reich. Ce magasine à partir duquel fut créée, en 1981, Laikos syndesmos (la Ligue populaire), le premier nom de l’Aube dorée cessait sa publication en avril 1984. Nikólaos Michaloliákos devient alors chef de la section jeunesse de l’Union politique nationale. En janvier 1985, Michaloliakos quitte l’Union politique nationale et fonde le mouvement national populaire – Aube dorée.
Pendant quelques années Aube Dorée reste une petite organisation marginale semi clandestine de quelques centaines de membres. En 1990 I. Perdikaris, le numéro 2, et une quinzaine de responsables clairement néo nazis quittent Aube dorée pour désaccord sur la stratégie et l’organisation organise son premier congrès. Lors de son deuxième congrès deux ans plus tard, Aube dorée décide de se développer plus ouvertement via des activités publiques. Devenu officiellement un parti politique en 1993 ils participent un an plus tard aux élections européennes et recueille 7264 voix (0,11 %). En 1999, ils font alliance avec la section grecque du Front national européen et obtiennent 48 532 voix (0,75 %). 10 ans plus tard, en mai 2009, Aube dorée obtient 23 564 votes (0,46 %). En 1996, ils participent pour la première fois au élections législatives et recueillent 4487 voix (0,07 %) et 19 636 (0,3 %) en 2009. En 1998, Yannopoulos et plusieurs autres membres quittent pour désaccord politique. En 2005, à la suite d'affrontements avec des anarchistes, Aube dorée cesse ses activités politiques et rejoint Patriotiki Symmachia (Alliance patriotique), une alliance qui cesse de fonctionner au printemps 2007. En mars 2007, Aube dorée tient son sixième congrès où la reprise de l’activisme politique est décidée. La publication du magazine reprend et les sites web sont de nouveau tenus à jour. En 2010, Nikólaos Michaloliákos se présente au élections municipales d’Athènes. Il obtient 5,3 % des voix (près de 20 % dans certains quartiers pauvres) et siège depuis comme conseiller municipal indépendant.
Les différentes publications du parti, ses membres et les structures affiliées, font fréquemment usage d'une symbolique plus ou moins ouvertement néonazie (saluts fascistes, croix gammées stylisées, utilisation du méandre noir sur un drapeau rouge, le tout rappelant le drapeau nazi). Les publications sur papier et les sites en ligne comportent de nombreux articles et photographies concernant des organisations ou des personnalités liées au Troisième Reich, comme la SS ou Magda Goebbels par exemple. Nikólaos Michaloliákos, fondateur du parti, s'est fait remarquer en faisant un salut nazi au conseil municipal d'Athènes, où il a été élu en novembre 201020. Néanmoins, le caractère fasciste est remis en cause par certains de ses militants ou électeurs qui affirment que le salut par le bras droit a été repris de la culture grecque par les Italiens et les Allemands, et que par conséquent, il serait un « signe d'identité culturelle ». En mars 2013, la police transmet au Parquet un enregistrement vidéo raciste et antisémite qui a fait le tour de la Grèce, montrant le candidat d'Aube dorée Alexandros Plomaritis faisant campagne à Athènes en déclarant à ses amis le sort réservé aux militants de gauche et aux immigrés : « Nous sommes prêts à ouvrir les fours (...), nous en ferons des savons pour laver les voitures et les trottoirs (...), on fabriquera des abat-jour avec leur peau », lance-t-il notamment. Le 14 mai 2012, Nikólaos Michaloliákos, le chef du parti, a remis en cause la mort des six millions de Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale au cours d'une interview accordée à une chaîne de télévision, niant l'existence des chambres à gaz et des fours crématoires dans les camps d'extermination nazis.
Ilías Kasidiáris, député et porte parole du mouvement, réfute le qualificatif de « néo-nazi » et classe politiquement Aube dorée comme l'équivalent du Front national français en Grèce. Jean-Yves Camus relevait en 1997 que « lors de la fête des BBR [Bleu Blanc Rouge] en septembre 1995, le stand du FNJ [Front national de la Jeunesse] exposait trois revues grecques Ellopia et Ellénismos, à caractère plutôt culturel, ainsi que Chrysi Avghi (L'aube dorée), mensuel du mouvement néo-nazi et négationniste du même nom qui s'est présenté sans succès aux élections législatives de 1997 ». Cependant, cet auteur distingue fortement ces deux mouvements : à la différence du Front national français des années 2010, Aube dorée est un parti ouvertement néo-nazi et relève, au sein d'une extrême droite traditionnelle se rattachant encore au fascisme, des « formations de témoignage qui s’opposent clairement à la démocratie ». Dans le même ordre d'idée, pour Magali Balent, spécialiste des extrémismes et des nationalismes en Europe, Aube dorée serait plutôt comparable, en France, au mouvement du Bloc identitaire. Plusieurs organisations d'extrême droite française sont proches du mouvement ; ainsi, pour France 3 Rhône-Alpes, les Jeunesses nationalistes « considèrent les néo-nazis grecs d'Aube dorée comme leurs camarades ».
La crise de la dette publique grecque débute fin 2009. Le gouvernement Papandréou révèle les véritables comptes de l'État. Sous la pression des règles européennes, le gouvernement enchaîne les plans d'austérité et doit s'adresser au FMI, qui n'intervient qu'en échange de privatisations nombreuses. La scène politique grecque est complètement bouleversée : les deux grands partis de gouvernement, PASOK et ND, recueillant autrefois plus des trois quarts des voix, s'effondrent et ne représentent plus qu'à peine le tiers à eux deux (une prime à la pluralité permettant une coalition). Surtout, en novembre 2011, le gouvernement Papadímos prend ses fonctions, soutenu par le parti d'extrême droite LAOS, qui fait son entrée au gouvernement. Pour Flora Genoux du Monde, cela change la donne à l'extrême droite : Aube dorée, plus radical encore, peut alors s'opposer au gouvernement. Les néo-nazis, crédités de 1,5 % des voix en avril 2011, passent à 2,5 fin janvier 2012, et dépassent le seuil de représentativité (3 %) durant la campagne, montant même à 6,5 %. À la fin du scrutin, Aube dorée devient le sixième parti en termes de voix : derrière ND, la gauche radicale « anti-austérité » (SYRIZA), le PASOK, les Grecs indépendants (AN.EL.) et le Parti communiste de Grèce (KKE), mais devant la Gauche démocrate.
Selon les résultats officiels, il obtient 440 894 voix, soit 6,97 % de l'électorat, et 21 députés sur les 300 que compte le Parlement hellénique. Le dirigeant du parti, Nikólaos Michaloliákos, déclare à la suite de ces élections : « L'heure de la peur a sonné pour les traîtres à la patrie ». De nouvelles élections ayant été prévues pour juin en raison de l'incapacité à constituer un gouvernement, Aube dorée confirme sa percée en réalisant 6,92 % des suffrages exprimés (425 981 voix, -0,05 %) et obtient 18 sièges (-3), devenant ainsi le cinquième parti de Grèce. Le 11 novembre 2011 le LAOS participe à une coalition gouvernementale faisant entrer deux ministres de ses rangs dans le gouvernement Papadímos. Ainsi le ministère des Transports et des Infrastructures revient à Makis Voridis et le secrétariat d'État au Développement, de la Compétitivité et des Affaires maritimes à Adonis Georgiades. Le LAOS s'est cependant retiré du gouvernement le 10 février 2012 par opposition au plan d'austérité présenté par Lucas Papademos. À l'occasion des élections législatives anticipées de mai 2012, elle perd tous ses élus au Parlement hellénique, n'obtenant que 2,9 % des suffrages exprimés. Dans son programme, Aube dorée veut rejeter les plans de sauvetage économique de la Grèce, effacer la dette du pays et expulser les immigrés. Le parti propose d'ailleurs de miner la frontière avec la Turquie pour empêcher l'arrivée de ceux-ci. D'après des témoignages recueillis par Le Monde, Aube dorée est très active sur le terrain auprès de son électorat cible :
- rondes dans les quartiers à forte criminalité ressentie ;
- accompagnement des personnes âgées ;
- distribution de nourriture aux familles grecques « de souche » les plus pauvres.
Ses militants se font également remarquer pour :
- des agressions, armés de barres de fer, contre les immigrés, avec une complicité supposée de la police ;
- la formation d'escadrons visant à attaquer des militants de gauche ;
- des perturbations des bureaux de vote lors des élections de mai 2012 ;
- des menaces et intimidations des employés de Médecins du monde-Grèce dans les locaux même de l'ONG.
Le parti distribue régulièrement de la nourriture et des habits aux Grecs dans le besoin. Des députés de l’Aube dorée utilisent une partie de l’argent de leur salaire afin de venir en aide à leurs compatriotes. Depuis le 23 février 2013, le parti organise des cours d'« éveil national » aux enfants de 6-10 ans, accompagnés de leurs parents ; le 31 janvier 2013, le site Internet d’une section locale d’Aube dorée avait publié un texte de l’auteur George Georgalas, initialement publié en 1967, sur la valeur et l’importance d’endoctriner les enfants. Le 8 mai 2012, à la suite de son entrée au Parlement hellénique, Aube dorée a organisé une conférence de presse dans un « style musclé qui rappelle un peu la période de la montée du nazisme » ; les journalistes présents ont été contraints de se lever « en marque de respect pour le dirigeant de ce parti ». Le 12 avril 2012, la journaliste Xenia Kounalaki avait fait l’objet de menaces sur le site Internet du parti. Le porte-parole du mouvement et député, Ilías Kasidiáris, est jugé à partir du 11 juin 2012 pour son implication dans un vol avec violence en 2007. Il est soupçonné d'avoir été au volant de la voiture qui transportait les cinq hommes qui ont attaqué, poignardé et dévalisé un étudiant. Il nie tout lien avec l'affaire. Il est aussi recherché pour avoir frappé au cours d'un débat télévisé en direct deux femmes politiques : Rena Dourou de la SYRIZA (Gauche radicale) et Liana Kanelli du Parti communiste de Grèce (KKE). Puisque le Parlement hellénique a été dissous, Kasidiaris n'est plus protégé par son immunité parlementaire. Le 18 septembre 2013, un militant d'Aube dorée poignarde à mort un militant antifasciste de 34 ans, le rappeur Pávlos Fýssas, à la sortie d'un bar dans la banlieue d'Athènes. Il est arrêté et reconnaît les faits. L'émotion populaire est forte et plusieurs milliers de manifestants se rassemblent pour protester contre cet assassinat politique. Le parti a nié toute implication dans les faits expliquant une « exploitation politique ». Le 28 septembre 2013, Nikólaos Michaloliákos et quatre autres députés sont arrêtés par la police dans le cadre de cette enquête. Le 1er novembre 2013, deux membres du parti (Emmanuel Kapelonis, 22 ans, et Giorgos Foudoulis, 27 ans) sont assassinés par un groupe d'extrême gauche « les Pouvoirs révolutionnaires combattants du peuple », en représailles de cet assassinat.