Sablon Jean

Publié le par Mémoires de Guerre

Jean Sablon est un auteur-compositeur-interprète français né le 25 mars 1906 à Nogent-sur-Marne et mort le 24 février 1994 à Cannes. Il est l'un des premiers chanteurs français à s'intéresser au jazz. Créateur de plusieurs œuvres de Mireille et Jean Nohain, puis de Charles Trenet, il est le premier à utiliser un microphone sur une scène française en 1936. Vedette du disque et de la radio, il quitte la France en 1937 pour un contrat à la NBC. Ses shows font de lui une vedette de premier plan aux États-Unis. Chanteur français désormais le plus international de sa génération, il devient l'ambassadeur de la chanson et se consacre à ses tournées au plan international, retrouvant régulièrement les principales salles françaises. Il conclut ses soixante-et-un ans de carrière par d'ultimes « adieux » en 1984. 

Sablon Jean
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Débuts

Élève du lycée Charlemagne, à Paris, Jean Sablon le quitte pour le Conservatoire de Paris. Arrivé cependant trop tard pour l'inscription, il se concentre sur sa carrière de chanteur. Il débute à l'âge de dix-sept ans dans l'opérette à Paris. C'est ainsi qu'il partage en 1923 la scène avec Jean Gabin dans La Dame en décolleté puis en 1925 avec Charles Boyer et Falconetti dans Simili. On le retrouve en 1927 dans la revue de Rip Au temps de Gastounet, avec Jacqueline Delubac. Paul Colin réalise la première affiche du jeune chanteur. Il est de l'opérette Lulu avec Fernand Gravey, puis s'embarque pour une traversée transatlantique notamment en compagnie de Milton pour aller inaugurer le théâtre du Copacabana Palace à Rio de Janeiro. 

En 1929, Jean Sablon effectue son premier enregistrement d'essai pour Columbia avec Georges Van Parys, et partage la distribution des opérettes Vive Leroy, avec Arletty, Dranem et Jacqueline Delubac, puis Music-hall, avec Damia et Germaine Rouer. L'année suivante, il enchaîne dans Cocktail 328, avec Damia, et tourne son premier film, Chacun sa chance. Jean Gabin y effectue également ses premiers pas dans le 7e art. Henri Diamant-Berger le sollicite en 1931 pour le tournage de Tante Aurélie, aux côtés de sa sœur, Germaine Sablon. Il remonte sur les planches dans la Revue argentine puis Parade de femmes avec Carlos Gardel. C'est toujours en 1931 qu'il rencontre Mireille par le truchement de l'éditeur Raoul Breton. Autre rencontre de taille, il découvre Django Reinhardt à la Boîte à matelots. Côté scène, il est avec Mistinguett au Casino de Paris dans Paris qui brille grâce à Oscar Dufrenne, auquel les deux artistes sont très liés.

Music Hall

1932 est riche en enregistrements, réalisés par Columbia. Jean Sablon y est accompagné de Don Baretto, chante avec sa sœur Germaine et, accompagné par la pianiste-compositrice Mireille, interprète les chansons de "l'opérette disquée" Un Mois de vacances, dont Couchés dans le foin est un succès. En 1933, Jean se retrouve avec Reda Caire dans l'opérette. Il est accompagné par Django Reinhardt. Il en grave les succès avec ce dernier qu'il impose aux studios d'enregistrement, Columbia n'osant initialement pas prendre le risque de multiplier les prises, coûteuses à l'époque, avec le guitariste qui ne peut lire la musique. Jean devient ainsi le premier interprète à avoir enregistré avec Django. Il s'envole ensuite avec Mireille pour les États-Unis à l'invitation de Ramon Novarro, célèbre Ben-Hur à l'écran, et séjourne à Hollywood. Il donne un récital dans le théâtre de l'acteur devant un parterre de stars du 7e art. Rentré à Paris, Jean Sablon crée Ce Petit chemin.

C'est en 1934 que Jean Cocteau incite Jean à faire son premier tour de chant (formule plus tard qualifiée de one man show) accompagné au piano par Wiener et Doucet, au Rococo, établissement appartenant à Louis Moyses. Le cabaret londonien Monseigneur l'engage. Son succès sur BBC radio avec son trio (Django Reinhardt, André Ekyan et Alec Siniavine) est tel que les programmes sont modifiés pour lui permettre plusieurs retransmissions. En France, il se produit à Nice avec Django Reinhardt et Joséphine Baker. Il assure l'inauguration du nouveau Bœuf sur le toit qui rouvre ses portes, donne un récital au Rex à Paris puis est de la distribution de Femmes en folie aux Folies-Bergère. En 1935, c'est au Théâtre des Dix francs de l'accueillir dans Pirouette 35. Il crée au Bœuf sur le toit la chanson These Foolish things.

Radio

Le film Le Petit Chemin réunit en 1936 Jean Sablon et Mireille. Leur interprétation de Ce petit chemin constitue en quelque sorte une préfiguration des clips vidéo. Jean devient présentateur de l'émission radiophonique Cadum Variétés. Il y chante également. Il y recevra Maurice Chevalier, Damia, Fernandel, Mistinguett, Yvette Guilbert, Albert Préjean, Henri Garat etc. On lui confie également un show radio, The Magic key. Il se rend au Café de Paris à Londres pour un tour de chant, rejoint la France pour son engagement dans Le Chant des tropiques au Théâtre de Paris. C'est au théâtre Mogador puis à Bobino qu'il fait scandale en utilisant un micro, ce qui est une première en France. En 1937, il remporte le Grand Prix du disque pour la chanson Vous qui passez sans me voir, écrite à son intention par Charles Trenet, Johnny Hess et Paul Misraki. La même année, engagé par les producteurs de Magic key, convaincus par son succès en France, il part pour New York animer l'émission depuis les studios de la NBC. Il réalise plusieurs enregistrements en anglais. Des célébrités lui proposent leurs œuvres à créer tels Cole Porter (In the Still of the night) et George Gershwin (Love walked in).

Cinéma

À Hollywood, Jean Sablon est engagé pour tourner dans The Story of Irene and Vernon Castle avec Fred Astaire et Ginger Rogers. En désaccord avec la production, il exige le retrait des passages où il figure. La version définitive conserve seulement son interprétation de Darktown strutters ball . Dans la capitale du cinéma, il se produit au Trocadero, anime et chante dans l'émission radio Hollywood Hotel où il reçoit de nombreuses stars. En janvier 1939, il se rend à Montréal, où il se produisait en 1937, et y crée une version swing du Pont d'Avignon qui connaîtra un succès international. Il y fait la rencontre de la Bolduc, dont le turlutage et les chansons truculentes l’impressionnent fortement. Il fait découvrir la Bolduc à Charles Trenet. Au cours des années 1940, il accueille le Salon Jean Sablon sur la radio Columbia Broadcasting System et est accompagné par l'accordéoniste-compositeur américain John Serry Sr. (Toots Camarata - arrangeur musical). Il revient à Paris pour se produire à l’ABC et effectue dans la capitale des essais pour la télévision encore expérimentale. Il retourne en Amérique où il habite depuis 1937. Il tient la vedette à Broadway (New York) puis à Boston de la comédie musicale Streets of Paris. Le producteur lui adjoint Carmen Miranda qui se produit à cette occasion pour la première fois hors du Brésil. Il se rend lui-même au Brésil pour des récitals au Casino Atlantico à Rio.

Jean fait sa rentrée en 1940 au Teatro Municipal (opéra) de Sao Paulo, Brésil et monte pour la première fois sur les scènes d'Argentine, d'Uruguay et du Chili. En 1941, il multiplie les prestations à New York, au Waldorf Astoria, au Plaza et au San Regis, se produit à Los Angeles et à Cuba et multiplie en 1942 les tournées aux États-Unis, au Brésil et en Argentine. Tandis qu'en Europe, à Londres, sa sœur Germaine Sablon crée en 1943 le Chant des partisans, hymne de la résistance, Jean chante encore au Brésil, en Argentine et en Uruguay. Des tournées qui se prolongent jusqu'en 1945. Il fait alors sa rentrée à New York, Chicago et Washington. L'année suivante, l'accueillent les scènes de New York, Hollywood, Boston, Bruxelles (ABC), Paris (ABC), Mexique et du Canada. Une nouvelle tournée aux États-Unis l'emmène en 1947 et 1948 à la Nouvelle-Orléans, Sans Francisco, Hollywood (Ciro's) Boston, Los Angeles (Beverly Hills), Palm Beach puis au Brésil, en Argentine et au Canada. Son enregistrement des Feuilles Mortes à New York, en été 1947 (RCA Victor 855332) est le plus précoce connu à ce jour. À Londres, il succède en1948 à Danny Kaye au Palladium, égalant le record de recettes enregistré par ce dernier. En France, Jacqueline François remporte le Grand prix du disque avec C'est le printemps (It must aswell be Spring), dont Jean a écrit les paroles françaises.

Les scènes internationales se succèdent encore. En 1949, New York, la Hollande, la Suisse, la France et une tournée anglaise. En 1950, c'est au tour de la Suisse (Gstaad) puis du Royaume-Uni (pour une nouvelle tournée). C'est à Londres qu'il enregistre le 30 mars 1950 C'est si bon s avec l'orchestre de Woolf Phillips. Le 23 novembre de la même année, il enregistre la version anglaise (paroles de Jerry Seelen) à Buenos Aires avec l'orchestre d'Emil Stern. Entre temps, il se rend en Hollande et au Brésil. Il clôt son parcours sud-américain en Uruguay et au Chili. Paris l'applaudit au Théâtre de l'Étoile. C'est également à Paris que Gene Kelly lui rend visite pour le convaincre -sans succès- d'accepter dans Un Américain à Paris le rôle d'Henri Baurel. Georges Guétary acceptera le rôle.

Retour en Amérique du Sud en 1951 puis aux États-Unis, Canada, Portugal, Maroc, Algérie, Grèce, Italie et en Égypte. Il rejoint Paris pour le tournage de Paris chante toujours. En 1952, il retrouve le Brésil, effectue une tournée française et rallie les États-Unis : New York, Los Angeles et Las Vegas où il devient le premier Français à avoir son propre show. Sans désemparer, il s'envole en 1953 pour le Mexique, Cuba, les États-Unis, le Brésil et accomplit la tournée Moss Empire au Royaume-Uni et en Irlande. Le public espagnol l'applaudit en 1954, ainsi que celui d'Italie, de Londres (Angleterre), et de Grèce. Il se rend ensuite au Liban, en Inde et est engagé pour le Tivoli Circuit (Australie). Il reste près d'un mois à l'affiche de l'Olympia. Toujours épris de voyages, il se produit en 1955 en Nouvelle-Zélande puis se rend à Tahiti, Panama et au Venezuela avant de se produire au Copacabana Palace (Rio de Janeiro). Il débute l'année 1956 devant le public d'Uruguay, retourne à Cuba et retrouve New York. Rien de tel ensuite qu'une année sabbatique...

En 1958, l'activité reprend : Londres l'applaudit puis diverses villes françaises dont Paris. Les déplacements redeviennent plus nombreux l'année suivante : États-Unis, Canada, Afrique du Sud, Rhodésie du Sud et du Nord, Belgique et Égypte. Retour en Belgique en 1960 puis en France et en Angleterre (Londres). La télévision, en plein essor lui permet d'éviter certains déplacements tout en touchant un large public. Il multiplie les apparitions sur le petit écran en Europe et Outre-Atlantique. Ce qui n'empêche pas l' "Ambassadeur de la chanson française" de se rendre en 1961 en Grèce, Argentine, Chili, Pérou, Uruguay, Brésil, Allemagne, USA et au Canada. C'est également au Zèbre à carreaux que le public parisien peut venir l'entendre. Jean retrouve en 1962 le public new yorkais ainsi que belge et parisien, à la Tête de l'art. Il crée Syracuse de Bernard Dimay et Henri Salvador.

Les déplacements se succèdent encore de 1963 à 1965: Hollande, Espagne, Italie, Suisse, Liban, France, Angleterre, Belgique. Retour en Italie puis déplacements en Allemagne, Grèce, Afrique du Sud et Mozambique. En France, il introduit la Fille d'Ipanéma. En 1966, il effectue plusieurs récitals à Hong-Kong. Il reste trois mois au Japon, retrouve le public australien puis se rend en Nouvelle-Calédonie, au Brésil et en Iran où il chante pour le Shah. Il est engagé aux Bermudes en 1967 puis en Angleterre et poursuit ses voyages de chanteur itinérant aux Philippines, à Hong-Kong, au Japon et fait sa rentrée au Waldorf Astoria (New York). Résolu à limiter dorénavant les voyages lointains, il s'installe dans sa maison de Théoule-sur-Mer. Il se produit au cabaret Don Camillo à Paris et est de la première émission en couleurs Musicolor. Il chante ensuite à Londres puis aux Bermudes.

Pierre Granier-Deferre le sollicite en 1971 pour enregistrer Le Temps des souvenirs, bande originale du film Le Chat. Jean Sablon prendra part à de nombreuses émissions télévisées tout au long des années 70 et 80, en France (Bernard Lion, Jean-Christophe Averty, Maritie et Gilbert Carpentier, Jacques Martin, Michel Drucker, Guy Lux etc.), en Suisse, Italie, Bulgarie, États-Unis, Brésil etc. Il ne néglige pas les prestations pour la bonne cause : Gala de la Croix-Rouge à Monaco en 1972, Gala pour la restauration de Versailles en 1973. Il cède cette année-là aux demandes du Brésil et se produit à Rio et à Sao Paulo pour le Festival International de la Chanson, puis en Uruguay. Il se produit en 1975 au cabaret La Tour Eiffel. George Wein et Bobby Short lui proposent de célébrer ses 75 ans au Lincolm Center (Avery Fisher Hall) avec l'orchestre de Frank Sinatra. Il fait à cette occasion ses adieux au public américain. Ses adieux à Paris, en 1982, sont transmis en prime time depuis le Pavillon Gabriel (ancien Alcazar d'été) . C'est le Copacabana Palace à Rio de Janeiro qui sera en 1984 le cadre de ses derniers adieux.

Jean Sablon est devenu l’un des chanteurs français masculins les plus applaudis ; de par sa popularité tout au long de sa carrière, il est classé juste après Maurice Chevalier. Ses disques se sont vendus par millions à travers le monde et on a souvent dit qu’il était l’équivalent en France de Bing Crosby aux États-Unis. Au cours de sa carrière, il enregistra en compagnie de grands musiciens, notamment Django Reinhardt, avec lequel il fut le premier chanteur à avoir enregistré, et Stéphane Grappelli. Comptant parmi les premiers interprètes de Francis Lemarque, il a également été auteur lyrique et compositeur. Il fut aussi le premier chanteur français à utiliser un microphone, ce qui le fit surnommer "le Chanteur sans voix" (ainsi que, par dérision, "le P'tit qu'a l'son court"). Jean Sablon meurt le 24 février 1994. Il est inhumé au cimetière du Montparnasse avec les siens. 

Famille

Jean Sablon était le fils de Charles Sablon et de Jeanne Sablon, le frère d'André Sablon, Marcel Sablon et Germaine Sablon et l'oncle de Jacques Sablon. 

Filmographie
Revues
  • 1927 : Au temps de Gastounet, revue de Rip, Théâtre des Bouffes-Parisiens.
  • 1931 : Revue Argentine, revue de Manuel Romero et Bayon Herrera. Parade de femmes, revue de Henri Varna, Léo Lelièvre et Marc-Cab, toutes deux au Palace. Paris qui brille, revue de Henri Varna, Léo Lelièvre et Earl Leslie, Casino de Paris.
  • 1932 : Ces messieurs dames, revue de Francis Carco, Le Studio de Paris.
  • 1934 : Femmes en folie, revue de Maurice Hermitte et Jean Le Seyeux, Folies Bergère.
  • 1935 : Pirouette 35, revue de Fernand Rouvray et Max Eddy, Théâtre des Dix Francs.
Opérettes
  • 1924 : Madame, opérette d’Albert Willemetz, musique de Henri Christiné. En chemyse [archive], opérette d’Albert Willemetz et Pierre Henri Cami, musique de Raoul Moretti, toutes deux au Théâtre des Bouffes-Parisiens.
  • 1928 : Lulu, opérette de Serge Veber, musique de Georges van Parys et Philippe Parès, Théâtre Daunou.
  • 1929 : Vive Leroy, opérette de Henri Géroule et René Pujol, musique de Fred Pearly et Pierre Chagnon, Théâtre des Capucines.
  • 1933 : Dix-neuf ans, opérette de Jean Bastia, musique de Pascal Bastia, Théâtre Daunou.
  • 1936 : Le Chant des tropiques, opérette de Louis Sauvat et Champfleury, musique de Moisés Simóns, Théâtre de Paris.
Comédies musicales
  • 1923 : La Dame en décolleté, comédie musicale d’Yves Mirande et Lucien Boyer, musique de Maurice Yvain, Théâtre des Bouffes-Parisiens.
  • 1925 : Trois jeunes filles nues, comédie musicale d’Yves Mirande et Albert Willemetz, musique de Raoul Moretti, Théâtre des Bouffes-Parisiens.

Publié dans Chanteurs-Chanteuses

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