Dieu a besoin des hommes
Dieu a besoin des hommes est un film français en noir et blanc réalisé par Jean Delannoy, d’après le livre d’Henri Queffélec intitulé : Un recteur de l'Île de Sein, paru en 1944, sorti en salles en 1950.Au large des côtes bretonnes vers 1850, sur la petite île de Sein, des habitants pauvres n'ont d'autre choix que de piller les épaves des navires qui s'échouent.
Le curé de la paroisse, impuissant et désolé, préfère quitter l'île. Chrétiens mais sans prêtre, les habitants désignent Thomas (P. Fresnay), le sacristain, pour le remplacer provisoirement. Celui-ci découvre avec douleur les confessions de ses semblables et constate amèrement qu'ils sont abandonnés à leur triste sort.
Adapté de Henri Queffélec par les brillants Jean Aurenche et Pierre Bost, Un recteur de l'île de Sein devient sous la caméra de Jean Delannoy Dieu a besoin des hommes, avec en tête d'affiche le formidable Pierre Fresnay, dans un rôle de brave homme, simple, chrétien et prêt à servir les autres avec désintéressement ; et quelques bons seconds rôles comme Daniel Gélin, Sylvie ou Jean Carmet.
Si l'ensemble, au premier abord, fait un peu poussiéreux avec sa mise en scène très sage (Jean Delannoy fut souvent critiqué à ce sujet, et je ne suis pas de cet avis) et ses musiques traditionnelles, il reste une très bonne histoire sur la religion et les croyances. Sur la petite île de Sein, où l'on vit encore "comme il y a un siècle", de la pêche principalement, les habitants sont très attachés à leur église et ne manquent la messe dominicale sous aucun prétexte, pas même l'absence de curé. Délaissés par les hommes d’Église, ils les remplacent par un serviteur de Dieu ; mais ils ne sont pas tous égaux, et le brave Pierre Fresnay, malgré son dévouement, ne trouve pas grâce aux yeux du curé de la paroisse voisine - l'occasion d'une scène marquante où les mots de Jean Brochard résonnent comme un couperet.
"Rien de ce que tu as pu faire ici n'a de valeur. Rien ! Tout est à recommencer ! Ils t'ont mis au presbytère, où tu t'y es fourré, mais ... on y aurait installé un cormoran, ça aurait été pareil." (Jean Brochard).
Dès lors, le film pose la question de la manière dont on pratique une religion, et des archaïsmes dont pouvait faire preuve le catholicisme au XIXe siècle. Ainsi de ces bons chrétiens, considérés comme des sauvages par les hommes du continent, car ils volent pour ne pas mourir de faim, l’Église ne veut plus en entendre parler. Condamnés sur leur petite île à ne plus recevoir les sacrements d'un prêtre, ils trouvent un homme de substitution, dévoué mais sans éducation, ce qui l'empêche de faire "autre chose que du simple pain" des hosties pour la messe.
Pierre Fresnay est remarquable dans le rôle d'un simple paroissien devenu pour quelques jours le recteur de l'île, à qui on confie des secrets (adultère, meurtres ...), de qui on attend des sacrements et des réponses. Plus qu'une attaque de la religion - bien que le film, inspiré du roman, souligne quelques points sombres (l'image du prêtre protégé par les gendarmes) - Dieu a besoin des hommes est un film sur la foi, récompensé d'ailleurs par un prix de l'Office Catholique du Cinéma, et sur la force de la croyance en Dieu, qui pousse les fidèles à s'organiser eux-mêmes pour communier, en même temps qu'un bel hommage aux petites gens du XIXe siècle.
Fiche technique
- Titre : Dieu a besoin des hommes
- Réalisation : Jean Delannoy
- Assistant réalisateur : Pierre Zimmer
- Scénario, adaptation et dialogues : Jean Aurenche et Pierre Bost, d'après Henri Queffélec
- Images : Robert Le Febvre
- Son : Jacques Carrère
- Musique : René Cloërec
- Montage : James Cuenet
- Décors : René Renoux
- Costumes : Marcel Escoffier
- Genre : Drame
- Dates de sortie : France : 4 octobre 1950
Distribution
- Pierre Fresnay : Thomas Gourvennec
- Madeleine Robinson : Jeanne Gourvennec
- Daniel Gélin : Joseph Le Berre
- Daniel Ivernel : François Guiller
- Andrée Clément : Scholastique Kerneis
- Lucienne Bogaert : Anaïs Le Berre
- Sylvie : la Karabassen (terme populaire breton désignant la « bonne du curé »)
- Marcelle Géniat : la mère Gourvennec
- Germaine Kerjean : Mme Kerneis
- Cécyl Marcyl : la vieille
- Charles Bouillaud : un gendarme
- Louise Andrès
- Antoine Balpêtré : le père Gourvennec
- Jean Brochard : l’abbé Kerhervé, le recteur de Lescoff
- Jean Carmet : Yvon
- Georges Cerf
- Gérard Darrieu
- Marcel Delaître
- Jean Favre-Bertin
- René Génin
- Jérôme Goulven
- Jeanne Herviale
- Pierre Latour
- Serge Lecointe
- Henri Maïk
- Christian Martaguet
- Albert Michel : le Bail
- Jean-Pierre Mocky : Pierre
- Pierre-Jacques Moncorbier
- Raphaël Patorni
- Fernand René
- Pierre Salas
- Jean d'Yd